EPITRE CATHOLIQUE DE JACQUES APÔTRE

ARGUMENT

Cette Epître, et les suivantes sont appelées catholiques ou universelles parce qu’elles ont été écrites aux chrétiens en général et non à quelques personnes ou à quelques églises en particulier. Celle de St. Jacques s’adresse aux Juifs des douze tribus qui étaient dispersés en divers pays depuis longtemps et qui avaient embrassé le christianisme et elle tend à les affermir contre les persécutions et principalement contre certains faux docteurs et certains hypocrites qui faisant professions d’être chrétiens et, se vantant d’être plus éclairés que les autres, vivaient dans le péché et dans la licence. On ne sait pas bien en quel temps cette épître a été écrite. 

Chapitres :  Chapitre I.   Chapitre II. Chapitre III.   Chapitre IV.   Chapitre V.   Livres du Nouveau Testament.

CHAPITRE I.

 

L’apôtre exhorte les fidèles à se réjouir dans les afflictions et à chercher dans la prière le secours dont ils avaient besoin pour les soutenir. II. Il console les chrétiens qui étaient persécutés ou méprisés dans le monde et il exhorte les riches à l’humilité. III. Il parle contre ceux qui, succombant aux persécutions et aux autres tentations, en rejetaient la faute sur Dieu et disaient que Dieu poussait les hommes au péché et il montre que Dieu, étant parfaitement saint, ne porte les hommes qu’au bien. IV. Il condamne ceux qui se contentaient d’écouter la parole de Dieu sans pratiquer ce qu’elle ordonne et ces docteurs orgueilleux qui présumaient d’eux-mêmes et qui parlaient mal des autres. Il dit que la religion de ces gens-là était vaine et il enseigne que la vraie religion consistait dans la pratique des œuvres de charité et dans le renoncement au monde. 

1 Jacques, serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus-Christ, aux douze tribus qui sont dispersées, salut !

2 Mes frères, regardez comme le sujet d’une parfaite joie les diverses afflictions qui vous arrivent,

3 sachant que l’épreuve de votre foi produit la patience.

4 Mais il faut que l’ouvrage de la patience soit parfait, afin que vous soyez parfaits et accomplis, en sorte qu’il ne vous manque rien.

5 Que si quelqu’un de vous manque de sagesse, qu’il la demande à Dieu, qui la donne à tous libéralement, sans rien reprocher ; et elle lui sera donnée.

6 Mais qu’il la demande avec foi, sans hésiter ; car celui qui hésite, est semblable au flot de la mer qui est agité et poussé çà et là par le vent.

7 Que cet homme-là ne s’attende pas à recevoir aucune chose du Seigneur.

8 L’homme dont le cœur est partagé, est inconstant en toutes ses voies.

9 Que le frère qui est dans la bassesse, se glorifie dans son élévation.

10 Que le riche, au contraire, s’humilie dans sa bassesse, car il passera comme la fleur de l’herbe.

11 Car, comme un soleil brûlant étant levé, l’herbe sèche, sa fleur tombe, et son éclat périt ; ainsi le riche se flétrira dans ses entreprises.

12 Heureux est l’homme qui endure la tentation ; car quand il aura été éprouvé, il recevra la couronne de vie que le Seigneur a promise à ceux qui l'aiment.

13 Que personne ne dise, lorsqu’il est tenté : C’est Dieu qui me tente ; car comme Dieu ne peut être tenté par aucun mal, aussi ne tente-t-il personne.

14 Mais chacun est tenté quand il est attiré et amorcé par sa propre convoitise.

15 Et après que la convoitise a conçu, elle enfante le péché ; et le péché, étant consommé, engendre la mort.

16 Mes frères bien-aimés, ne vous abusez point ;

17 toute grâce excellente et tout don parfait vient d’en haut, et descend du Père des lumières, en qui il n’y a point de variation, ni aucune ombre de changement.

18 Il nous a engendrés de sa pure volonté par la parole de la vérité, afin que nous fussions comme les prémices de ses créatures.

19 Ainsi, mes frères bien-aimés, que tout homme soit prompt à écouter, lent à parler, et lent à se mettre en colère ;

20 car la colère de l’homme n’accomplit point la justice de Dieu.

21 C’est pourquoi, rejetant toute ordure et tous les excès de la malice, recevez avec douceur la parole qui est plantée au dedans de vous, et qui peut sauver vos âmes.

22 Mettez en pratique la parole, et ne vous contentez pas de l’écouter, en vous séduisant vous-mêmes par de faux raisonnements.

23 Car si quelqu’un écoute la parole, et ne la met point en pratique, il est semblable à un homme qui regarderait dans un miroir son visage naturel ;

24 et qui, après s’être regardé, s’en irait, et oublierait aussitôt quel il était.

25 Mais celui qui aura considéré avec attention la loi parfaite, qui est celle de la liberté, et qui y aura persévéré, n’étant pas un auditeur oublieux, mais pratiquant les œuvres qu'elle commande, il sera heureux dans ce qu’il aura fait.

26 Si quelqu’un parmi vous croit avoir de la religion, et qu’il ne tienne point sa langue en bride, mais qu’il séduise son cœur, la religion d’un tel homme est vaine.

27 La religion pure et sans tache devant Dieu notre Père, consiste à visiter les orphelins et les veuves dans leurs afflictions, et à se préserver de la souillure du monde. 

REFLEXIONS

Nous avons dans ce chapitre plusieurs belles instructions.

I. La première, que les afflictions et particulièrement celles qu’on souffre à cause de l’Évangile sont un sujet de joie pour les chrétiens, puisqu’elles servent à les éprouver, à les rendre parfaits et à leur faire obtenir la couronne de vie que Dieu a promise à ceux qui l’aiment.

II. Le seconde, que Dieu ne refuse jamais sa grâce et les dons spirituels à ceux qui les lui demandent avec foi et qu’ainsi il ne tient qu’à nous d’en être enrichis.

III. La troisième, que ceux qui sont d’une condition basse dans le monde doivent se glorifier au Seigneur pourvu qu’ils soient du nombre des vrais fidèles et que les riches doivent avoir des sentiments d’humilité.

IV. La quatrième instruction doit être bien remarquée. C’est que Dieu n’est en aucune façon l’auteur du péché et des tentations, mais que le péché vient uniquement de nous-mêmes et de notre propre volonté et que, bien loin que Dieu, soit la cause du mal que les hommes font, il est l’auteur de tout bien, puisqu’il nous a régénérés par sa parole afin de nous rendre de nouvelles créatures.

V. St. Jacques nous enseigne que ce n’est pas assez d’écouter la parole de Dieu, mais que le principal est d’observer ce qu’elle nous commande et que, pour cet effet, il faut l’écouter avec un esprit paisible, doux et docile et avec un cœur dégagé des passions.

VI. Enfin, St. Jacques déclare ici que ceux qui se croient pieux et meilleurs que les autres et qui ne tiennent pas leur langue en bride, mais qui condamnent le prochain ne sont que de faux dévots et que la solide piété et la vraie religion consiste principalement à exercer la charité envers les misérables et à se conserver pur en sorte qu’on ne soit pas souillé par la corruption de ce monde. 

CHAPITRE II.

 

Ce chapitre a deux parties : I. St. Jacques reprend ceux qui avaient des égards pour les riches et qui méprisaient les pauvres dans les assemblées de l’église. Il montre que la foi en Jésus-Christ ne permettait pas de faire ces sortes de distinctions, puisque Dieu a choisi les pauvres aussi bien que les riches pour leur donner le royaume des Cieux et que la loi de l’Évangile par laquelle nous devons être jugés est la loi de la charité et de la liberté.  II. Dans la seconde partie, St. Jacques réfute ceux qui croyaient qu’on pouvait être justifié par la foi en Jésus-Christ sans les bonnes œuvres et il fait voir par la nature même de la foi et par les exemples d’Abraham et de Rahab que la foi qui n’est pas accompagnée de bonnes œuvres est une foi fausse par laquelle on ne peut point obtenir le salut. 

1 Mes frères, que la foi que vous avez en notre Seigneur Jésus-Christ glorifié, soit exempte de toute acception de personnes.

2 Car s’il entre dans votre assemblée un homme qui ait un anneau d’or et un habit magnifique, et qu’il y entre aussi un pauvre avec un méchant habit ;

3 et qu’ayant égard à celui qui porte l’habit magnifique, vous lui disiez : Toi, assieds-toi ici honorablement ; et que vous disiez au pauvre : Toi, tiens-toi là debout, ou assieds-toi ici sur mon marchepied ;

4 ne faites-vous pas en vous-mêmes de la différence entre l’un et l’autre, et n’avez-vous pas de mauvaises pensées dans les jugements que vous faites ?

5 Ecoutez, mes chers frères ; Dieu n’a-t-il pas choisi les pauvres de ce monde qui sont riches en la foi et héritiers du royaume qu’il a promis à ceux qui l’aiment ?

6 Et vous, au contraire, vous méprisez les pauvres. Ne sont-ce pas les riches qui vous oppriment et qui vous tirent devant les tribunaux ?

7 Ne sont-ce pas eux qui blasphèment le beau nom qui a été invoqué sur vous ?

8 Si vous accomplissez la loi royale, selon l’Ecriture, qui dit : Tu aimeras ton prochain comme toi-même, vous faites bien.

9 Mais si vous avez égard à l’apparence des personnes, vous commettez un péché, et vous êtes condamnés par la loi comme des transgresseurs.

10 Car, quiconque aura observé toute la loi, s’il vient à pécher dans un seul commandement, il est coupable comme s’il les avait tous violés.

11 Car, celui qui a dit : Tu ne commettras point adultère, a dit aussi : Tu ne tueras point. Si donc tu ne commets pas adultère, mais que tu tues, tu es transgresseur de la loi.

12 Parlez et agissez comme devant être jugés par la loi de la liberté.

13 Car il y aura une condamnation sans miséricorde sur celui qui n’aura point usé de miséricorde ; mais la miséricorde s’élève par-dessus la condamnation.

14 Mes frères, que servira-t-il à un homme de dire qu’il a la foi, s’il n’a point les œuvres ? Cette foi le pourra-t-elle sauver ?

15 Et si un frère ou une sœur sont nus, et qu’ils manquent de la nourriture qui leur est nécessaire chaque jour ;

16 et que quelqu’un d’entre vous leur dise : Allez en paix, chauffez-vous et vous rassasiez, et que vous ne leur donniez point ce qui leur est nécessaire pour le corps, à quoi cela servira-t-il ?

17 De même aussi la foi, si elle n’a pas les œuvres, elle est morte en elle-même.

18 Quelqu’un dira : Tu as la foi, et moi, j’ai les œuvres. Montre-moi donc ta foi sans tes œuvres, et moi, je te montrerai ma foi par mes œuvres.

19 Tu crois qu’il y a un seul Dieu ; tu fais bien ; les démons le croient aussi et ils en tremblent.

20 Mais, ô homme vain, veux-tu savoir que la foi qui est sans les œuvres est morte ?

21 Abraham notre père, ne fut-il pas justifié par les œuvres lorsqu’il offrit Isaac son fils sur un autel ?

22 Ne vois-tu pas que la foi agissait avec ses œuvres, et que par ses œuvres sa foi fut rendue parfaite ?

23 Et qu’ainsi ce que dit l’Ecriture, s’accomplit : Abraham a cru en Dieu, et cela lui a été imputé à justice, et il a été appelé ami de Dieu.

24 Vous voyez donc que l’homme est justifié par les œuvres, et non par la foi seulement.

25 De même aussi Rahab l’hôtelière, ne fut-elle pas justifiée par les œuvres, lorsqu’elle reçut les messagers, et qu’elle les renvoya par un autre chemin ?

26 Car comme un corps sans âme est mort, de même, la foi sans les œuvres est morte. 

REFLEXIONS

La première partie de ce chapitre nous apprend :

I. Que les chrétiens doivent faire paraître qu’ils se regardent les uns les autres comme frères, surtout dans les assemblées de l’église et qu’en général on ne doit pas estimer les riches à cause de leurs richesses, ni mépriser les pauvres à cause de leur pauvreté, puisque la foi et la piété peuvent se rencontrer dans les pauvres tout de même que dans les riches et dans les grands du monde et que Dieu a aussi choisi les pauvres qui sont riches en foi pour les rendre héritiers de son royaume. Cela apprend aussi aux riches qu’ils ne doivent pas avoir des sentiments d’orgueil, ni mépriser ou opprimer les petits.

II. St. Jacques nous enseigne que la loi de Jésus-Christ est la loi de la charité, de l’humilité et de la vraie liberté et que c’est par cette loi que Dieu nous jugera.

III. Que celui qui a violé la loi de Dieu dans un seul commandement est aussi bien coupable que s’il l’avait violée dans les autres, puisque tous les commandements de cette loi viennent de Dieu et qu’on ne peut en transgresser volontairement aucun sans mépriser l’autorité et la majesté du Législateur. Cela nous montre que la vraie piété consiste dans la pratique de tous nos devoirs et qu’il suffit de s’adonner à un seul péché et d’entretenir en nous une seule mauvaise habitude pour être exclus du salut.

Il importe après cela de bien remarquer ce que St. Jacques enseigne sur la justification dans la seconde partie de ce chapitre et avec quelle force il réfute la doctrine impie de ceux qui disaient qu’on était justifié par la foi sans les bonnes œuvres. Cet Apôtre montre que la vraie foi est nécessairement accompagnée des bonnes œuvres, ce qui est aussi la doctrine de St. Paul sur cette matière et que la foi qui ne produit pas les œuvres est fausse et morte. C’est ce qu’il confirme par l’exemple d’Abraham qui prouva la sincérité de sa foi en obéissant à Dieu lorsqu’il offrit son fils Isaac et par l’exemple de Rahab qui fit voir en recevant les espions que Josué avait envoyés à Jérico qu’elle était persuadée que Dieu donnerait le pays de Canaan aux enfants d’Israël.

D’où nous devons recueillir que ceux qui négligent les bonnes œuvres et qui ne font pas voir par une vie sainte et par l’obéissance aux commandements de Dieu qu’ils ont la foi en sont destitués et qu’ils ne sauraient en aucune façon être justifiés, ni avoir part au salut. 

CHAPITRE III.

Dans ce chapitre, St. Jacques défend aux chrétiens, de s’ériger en docteurs et en maîtres par-dessus les autres, de les condamner et d’en parler mal et il représente combien la langue peut causer de maux et de désordres, Il dit ensuite que la douceur, le support et l’amour de la paix sont la marque à laquelle on discerne les vrais chrétiens et c’est par là qu’il montre la différence qu’il y a entre la vraie et la fausse sagesse. Il faut savoir que ce que St. Jacques dit ici regarde certains docteurs qui se croyaient plus éclairés et plus parfaits que les autres et qui, poussé par l’envie de dominer, condamnaient avec beaucoup d’orgueil et de rigueur ceux qui n’étaient pas dans leurs sentiments et troublaient par ce moyen la paix de l’église. 

1 Mes frères, qu’il n’y ait pas plusieurs maîtres parmi vous, sachant que nous en recevrons une plus grande condamnation.

2 Car nous bronchons tous en plusieurs choses. Si quelqu’un ne bronche point en paroles, c’est un homme parfait, et il peut tenir tout son corps en bride.

3 Nous mettons, comme vous savez, des mors dans la bouche des chevaux, afin qu’ils nous obéissent, et par là, nous menons çà et là tout leur corps.

4 Voyez aussi les navires ; quelque grands qu’ils soient, et quoique poussés par des vents violents, ils sont menés de côté et d’autre avec un petit gouvernail, selon la volonté de celui qui les gouverne.

5 Ainsi la langue est un petit membre, et elle se vante de grandes choses. Considérez combien de bois un petit feu peut allumer.

6 La langue est aussi un feu, un monde d’iniquité ; la langue est posée entre nos membres d’une manière qu’elle souille tout le corps ; elle enflamme tout le cours de notre vie, et elle est enflammée du feu de la géhenne.

7 Toutes sortes de bêtes sauvages, d’oiseaux, de reptiles et de poissons de mer se domptent et ont été domptés par la nature humaine ;

8 Mais aucun homme ne peut dompter la langue : c’est un mal qu’on ne peut réprimer ; elle est pleine d’un venin mortel.

9 Par elle nous bénissons Dieu notre Père, et par elle nous maudissons les hommes qui sont faits à l’image de Dieu.

10 D’une même bouche sort la bénédiction et la malédiction. Il ne faut point, mes frères, que cela soit ainsi.

11 Une fontaine jette-t-elle, par une même ouverture, de l’eau douce et de l’eau amère ?

12 Mes frères, un figuier peut-il porter des olives ; ou une vigne des figues ? Ainsi aucune fontaine ne peut jeter de l’eau salée et de l’eau douce.

13 Y a-t-il parmi vous quelque homme sage et intelligent ? Qu’il montre par une bonne conduite et par ses œuvres, une sagesse pleine de douceur.

14 Mais si vous avez un zèle amer et un esprit de contention dans vos cœurs, ne vous glorifiez point et ne mentez point contre la vérité.

15 Car ce n’est point-là la sagesse qui vient d’en haut, mais elle est terrestre, sensuelle et diabolique.

16 Car partout où il y a ce zèle amer et cet esprit de contention, il y a du trouble, et toutes sortes de mauvaises actions.

17 Mais pour la sagesse qui vient d’en haut, premièrement elle est pure, puis paisible, modérée, traitable, pleine de miséricorde et de bons fruits ; elle n’est point difficultueuse, ni dissimulée.

18 Or, le fruit de la justice se sème dans la paix, pour ceux qui s’adonnent à la paix. 

REFLEXIONS

Ce chapitre traite premièrement des péchés où l’on peut tomber par la langue et l’on doit faire une grande attention à ce qui y est dit sur ce sujet.

St. Jacques nous y apprend que la langue peut causer des maux sans nombre et auxquels il n’y a souvent point de remède, que, par les discours, on peut pécher en une infinité de manières contre Dieu et contre le prochain, ruiner l’édification de l’église et allumer le feu de la division et de la discorde. Cela nous oblige à régler nos paroles par la crainte de Dieu et par la sagesse, à parler peu, à fuir surtout la médisance et à nous abstenir de tous les discours contraires à la charité et à l’humilité. Ce devoir est des plus importants et St. Jacques le montre lorsqu’il dit que l’une des plus sûres marques de la vraie piété est de savoir régler sa langue.

En second lieu, cet Apôtre nous donne dans ce chapitre un autre caractère auquel on reconnaît les personnes qui ont une piété solide et qui sont véritablement sages, c’est la douceur, la paix et une grande modération dans leurs discours et dans toute leur conduite. Il déclare, dans les termes les plus forts, que ceux qui pensent avoir des connaissances plus sublimes que les autres et une piété plus parfaite, mais qui sont indiscrets, hautains dans leurs paroles, aigres et pleins d’envie et d’orgueil, qui médisent du prochain et qui causent du trouble ne sont que des hypocrites.

Il ajoute que partout où il y a de l’envie et de l’irritation, il y a toute sorte de mal et qu’on n’y doit rien chercher de bon.

Enfin, il dit : que la vraie sagesse qui vient du Ciel est pure, paisible, modérée, pleine de miséricorde et de bons fruits, sincère et sans hypocrisie.

Tous ceux donc qui prétendent être véritablement sages doivent s’étudier à acquérir cette divine sagesse dont la charité est le principe et à revêtir un esprit de douceur, de modération, de sincérité et de paix. C’est par là qu’ils éprouveront, en ce monde et dans l’autre, la vérité de ce que St. Jacques dit dans les dernières paroles de ce chapitre : que le fruit de la justice est semé dans la paix pour tous ceux qui s’adonnent à la paix. 

CHAPITRE IV.

St. Jacques, après avoir parlé des maux que la langue et l’esprit d’aigreur et de dissension peuvent causer, montre, dans ce chapitre, que tous ces désordres venaient des passions de la chair et en particulier de l’amour des voluptés, de l’orgueil, du désir de s’élever les uns par-dessus les autres, de l’amour du monde et de l’esprit d’envie et de jalousie. Il exhorte ceux en qui ces passions régnaient à s’humilier et à se rapprocher de Dieu par la conversion et il défend en particulier la médisance et les jugements téméraires. Enfin, il condamne ceux qui forment des entreprises, sans penser à la vanité de la vie et sans considérer qu’ils dépendent de la providence de Dieu. 

1 D’où viennent parmi vous les dissensions et les querelles ? N’est-ce pas de ceci, savoir, de vos désirs déréglés, qui combattent dans vos membres ?

2 Vous désirez, et vous n’obtenez pas ce que vous souhaitez ; vous êtes envieux et jaloux, et vous ne pouvez rien obtenir ; vous avez des querelles, et vous vous faites la guerre, et vous n’avez pas ce que vous recherchez, parce que vous ne demandez pas.

3 Vous demandez, et vous ne recevez point, parce que vous demandez mal, et dans la vue de fournir à vos voluptés.

4 Hommes et femmes adultères, ne savez-vous pas que l’amour du monde est une inimitié contre Dieu ? Qui voudra donc être ami du monde, se rend ennemi de Dieu.

5 Pensez-vous que l’Ecriture parle en vain ? L’Esprit qui habite en nous porte-t-il à l’envie ?

6 Au contraire, il accorde plus de grâces. C’est pourquoi, l’Ecriture dit : Dieu résiste aux orgueilleux, mais il fait grâce aux humbles.

7 Soumettez-vous donc à Dieu ; résistez au diable, et il s’enfuira de vous.

8 Approchez-vous de Dieu, et il s’approchera de vous. Pécheurs, nettoyez vos mains ; et vous qui avez le cœur partagé, purifiez vos cœurs ;

9 Sentez vos misères, et soyez dans le deuil, et pleurez ; que votre ris se change en pleurs, et votre joie en tristesse.

10 Humiliez-vous devant le Seigneur, et il vous élèvera.

11 Mes frères, ne médisez point les uns des autres. Celui qui médit de son frère, et qui condamne son frère, médit de la loi, et condamne la loi. Or, si tu juges la loi, tu n’es point observateur de la loi, mais tu t’en rends le juge.

12 Il y a un seul législateur, qui peut sauver et détruire. Toi, qui es-tu, qui juges les autres ?

13 Je m’adresse maintenant à vous qui dites : Nous irons aujourd’hui ou demain en une telle ville, et nous y passerons une année, nous y trafiquerons et nous y gagnerons.

14 Vous ne savez pourtant pas ce qui arrivera le lendemain, car qu’est-ce que votre vie ? Ce n’est qu’une vapeur qui paraît pour peu de temps, et qui s’évanouit ensuite.

15 Au lieu que vous devriez dire : Si le Seigneur le veut, et si nous sommes en vie, nous ferons telle ou telle chose.

16 Mais, au contraire, vous vous glorifiez dans vos pensées orgueilleuses. Toute vanterie de cette sorte est mauvaise.

17 Celui-là donc pèche, qui sait faire le bien et qui ne le fait pas. 

REFLEXIONS

St. Jacques nous apprend ici :

I. Que les passions et surtout l’amour des plaisirs, et l’envie sont la principale cause des maux que les hommes se font les uns aux autres et des divisions qu’il y a dans l’église. C’est pourquoi il faut garantir son cœur de ces passions et en particulier de l’amour du monde qui en est la cause et de l’orgueil, nous souvenant : que ce n’est pas en vain que l’Écriture dit que si quelqu’un veut aimer le monde, il se rend ennemi de Dieu et que Dieu résiste aux orgueilleux, mais qu’il fait grâce aux humbles.

II. Nous voyons dans ce chapitre que quand, on s’est éloigné de Dieu par les passions et par l’amour du monde, il faut se rapprocher de lui par la repentance, sentir ses misères, pleurer ses fautes, résister aux tentations, renoncer aux choses du monde et purifier son cœur et toute sa conduite, moyennant quoi Dieu se rapprochera de nous.

III. L’apôtre nous enseigne que la médisance est un très grand péché, ce qu’il prouve par cette considération particulière que celui qui parle mal de son frère, qui le juge et qui le condamne fait ce qui n’appartient qu’à Dieu.

IV. St. Jacques nous avertit de nous souvenir dans tous nos desseins, et en particulier dans ceux qui ont l’intérêt et le gain pour but, que notre vie est courte et incertaine, qu’elle n’est que comme une vapeur qui s’évanouit, qu’ainsi c’est une grande folie de faire des projets pour l’avenir en comptant sur la vie et sur notre propre industrie, mais qu’en toutes choses nous devons nous remettre à la providence de Dieu.

V. Il faut apprendre d’ici qu’il ne suffit pas de connaître notre devoir, mais qu’il faut faire un bon usage de nos lumières et des moyens que nous avons de faire le bien, à moins de quoi nous n’en serons que plus coupables devant Dieu, c’est l’instruction importante que renferment ces paroles : Il y a du péché à celui qui sait faire le bien et qui ne le fait pas. 

CHAPITRE V.

L’apôtre ayant parlé sur la fin du chapitre précédent de ceux qui travaillent à amasser du bien, sans penser qu’ils dépendent de la providence, dénonce les jugements de Dieu aux riches avares, à ceux qui vivent dans les délices et à ceux qui oppriment les petits. Il s’adresse ensuite aux chrétiens affligés et il les exhorte à attendre patiemment la venue du Seigneur, à ne se plaindre pas trop amèrement de ceux qui leur font du mal et à éviter tout ce qui pouvait marquer l’impatience et en particulier les jurements. Il marque enfin le devoir de ceux qui sont dans la souffrance, il ordonne aux malades d’appeler les pasteurs de l’église et il leur promet qu’ils seraient guéris après que les pasteurs auraient priés pour eux et qu’ils les auraient oints d’huile. Cette onction était une cérémonie qui se pratiquait en ces temps-là et par le moyen de laquelle Dieu opérait des guérisons miraculeuses. St. Jaques parle aussi de la confession des péchés, de l’efficace de la prière et des fruits de la correction fraternelle. 

1 Vous, riches, je viens maintenant à vous ; pleurez et jetez des cris, à cause des malheurs qui vont tomber sur vous.

2 Vos richesses sont pourries, et les vers ont mangé vos habits.

3 Votre or et votre argent se sont rouillés, et leur rouille s’élèvera en témoignage contre vous, et dévorera votre chair comme un feu. Vous avez amassé un trésor pour les derniers jours.

4 Voici, le salaire des ouvriers qui ont moissonné vos champs, et dont vous les avez frustrés, crie contre vous ; et les cris de ces moissonneurs sont parvenus jusqu’aux oreilles du Seigneur des armées.

5 Vous avez vécu dans les voluptés et dans les délices sur la terre, et vous vous êtes rassasiés comme en un jour de sacrifice.

6 Vous avez condamné et mis à mort le juste, qui ne vous résistait point.

7 Mais vous, mes frères, attendez patiemment jusqu’à l’avènement du Seigneur. Vous voyez que le laboureur attend le précieux fruit de la terre avec patience, jusqu’à ce qu’il reçoive du ciel la pluie de la première et de la dernière saison.

8 Vous donc de même attendez patiemment, et affermissez vos cœurs ; car l’avènement du Seigneur est proche.

9 Mes frères, ne vous plaignez point les uns des autres, de peur que vous ne soyez condamnés. Voilà, le juge est à la porte.

10 Mes frères, prenez pour exemple de patience dans les afflictions les prophètes qui ont parlé au nom du Seigneur.

11 Vous savez que nous regardons comme heureux ceux qui ont souffert constamment ; vous avez ouï parler de la patience de Job, et vous avez vu la fin que le Seigneur lui accorda ; car le Seigneur est plein de miséricorde et de compassion.

12 Sur toutes choses, mes frères, ne jurez point, ni par le ciel, ni par la terre, ni par quelque autre serment ; mais que votre oui soit oui, et votre non, non, de peur que vous ne tombiez dans la condamnation.

13 Quelqu’un parmi vous souffre-t-il ; qu’il prie. Quelqu’un est-il dans la joie ; qu’il chante des cantiques.

14 Quelqu’un est-il malade parmi vous ; qu’il appelle les pasteurs de l’Eglise, et qu’ils prient pour lui, et l’oignent d’huile au nom du Seigneur.

15 Et la prière faite avec foi sauvera le malade, et le Seigneur le relèvera ; et s’il a commis des péchés, ils lui seront pardonnés.

16 Confessez vos fautes les uns aux autres, et priez les uns pour les autres, afin que vous soyez guéris ; car la prière du juste, faite avec zèle, a une grande efficace.

17 Elie était un homme sujet aux mêmes affections que nous ; et néanmoins il demanda par ses prières qu’il ne plût point ; et il ne plut point sur la terre pendant trois ans et demi.

18 Et il pria de nouveau, et le ciel donna de la pluie, et la terre produisit son fruit.

19 Mes frères, si quelqu’un d’entre vous s’écarte de la vérité, et que quelqu’un le redresse ;

20 qu’il sache que celui qui aura ramené un pécheur de son égarement, sauvera une âme de la mort, et couvrira une multitude de péchés. 

REFLEXIONS

Ce qui est dit dans ce chapitre doit servir d’avertissement

I. Premièrement aux riches, puisque St. Jacques menace de la malédiction divine les riches avares, les riches injustes et les riches qui se servent de leurs biens pour vivre dans le faste et dans les délices. Les personnes à qui Dieu a donné du bien doivent éviter soigneusement l’avarice, l’injustice et les voluptés et considérer pour cet effet la vanité des richesses, les tentations où elles exposent les hommes et les malheurs terribles où tombent ceux qui y mettent leur cœur ou qui en abusent.

II. L’apôtre exhorte les justes affligés, tels qu’étaient alors la plupart des chrétiens, à souffrir leurs maux sans se plaindre, sans murmurer et sans s’aigrir contre personne et attendre patiemment que le Seigneur vienne les délivrer et il leur apprend que pour se former à la patience, il est très utile de méditer sur les souffrances des Saints et sur l’heureuse issue que Dieu leur en a accordée.

III. On voit ici que tous les jurements vains et téméraires, quels qu’ils soient, sont absolument défendus aux chrétiens, de même que toutes les paroles d’aigreur et d’impatience.

IV. Que ceux qui sont affligés doivent chercher leur consolation dans la prière, qu’en particulier les malades doivent appeler leurs pasteurs pour prier avec eux et que la confession des péchés et les prières, lorsqu’elles sont faites avec zèle, avec foi et dans un esprit de charité, ont beaucoup d’efficace devant Dieu.

V. Les dernières paroles de cette épître nous enseignent que les corrections et les remontrances que l’on adresse aux pécheurs qui s’égarent sont d’une très grande utilité, tant pour ceux que l’on avertit, que pour ceux qui donnent ces avertissements, puisque par là on retire une âme de la mort et que l’on obtient même de Dieu la rémission de ses propres péchés.