LIVRE DES JUGES

ARGUMENT

Le livre des juges comprend l’histoire de ce qui est arrivé au peuple d’Israël, pendant environ 300 ans, depuis la mort de Josué jusqu’au temps d’Héli qui fut le dernier juge. Les juges étaient des personnes que Dieu suscitait extraordinairement pour délivrer les Israélites de leurs ennemis et pour les gouverner.

Chapitres  CHAPITRE I. CHAPITRE II.  CHAPITRE III.  CHAPITRE IV.   CHAPITRE V.  CHAPITRE VI.  CHAPITRE VII.  CHAPITRE VIII.   CHAPITRE IX. CHAPITRE X.   CHAPITRE XI.   CHAPITRE XII. CHAPITRE XIII.  CHAPITRE XIV.   CHAPITRE XV.   CHAPITRE XVI. CHAPITRE XVII.  CHAPITRE XVIII.  CHAPITRE XIX.   CHAPITRE XX.  CHAPITRE XXI.  LIVRES DU VIEUX TESTAMENT.

CHAPITRE I

Les tribus de Juda et de Siméon continuent la guerre contre les Cananéens qui n’avaient pas été subjugués par Josué, en telle sorte pourtant qu’ils ne les détruisirent pas entièrement. La même chose arriva dans le pays des autres tribus.

 1 Après la mort de Josué, les enfants d’Israël consultèrent l’Eternel et dirent : Qui est-ce de nous qui montera le premier contré les Cananéens pour combattre contre eux ?

2 Et l’Eternel répondit : Juda y montera ; voici, j’ai livré le pays entre ses mains.

3 Et Juda dit à Siméon son frère : Monte avec moi en mon partage, et nous combattrons contre les Cananéens, et j’irai aussi avec toi en ton partage. Ainsi Siméon s’en alla avec lui.

4 Juda donc monta, et l’Eternel livra les Cananéens et les Phérésiens entre leurs mains, et ils en battirent à Bézek dix mille hommes ;

5 car ayant trouvé Adoni-bézek à Bézek, ils combattirent contre lui, et battirent les Cananéens et les Phérésiens.

6 Et Adoni-bézek s’enfuit, mais ils le poursuivirent, et l’ayant saisi, ils lui coupèrent les pouces des mains et des pieds.

7 Alors Adoni-bézek dit : J’ai eu soixante et dix rois, dont les pouces des pieds et des mains avaient été coupés, qui recueillaient sous ma table ce qui en tombait. Dieu m’a rendu ce que j’ai fait aux autres. Et ayant été amené à Jérusalem, il y mourut.

8 Or, les descendants de Juda avaient combattu contre Jérusalem, et l’avaient prise, et avaient fait passer ses habitants au fil de l’épée, et mis la ville en feu.

9 Ensuite les descendants de Juda étaient descendus pour combattre contre les Cananéens qui habitaient dans les montagnes, et au midi, et dans la plaine.

10 Juda donc s’en était allé contre les Cananéens qui habitaient à Hébron (or, le nom de Hébron était auparavant Kirjath-arbah), et il avait battu Scesçaï, Ahiman et Talmaï ;

11 Et de là il était allé contre les habitants de Débir, dont le nom était auparavant Kirjath-sépher.

12 Et Caleb avait dit : Qui battra Kirjath-sépher et la prendra, je lui donnerai ma fille Hacsa pour femme.

13 Hothniel donc, fils de Kénaz, frère puîné de Caleb, la prit ; et Caleb lui donna sa fille Hacsa pour femme.

14 Et comme elle venait vers lui, elle l’incita à demander à son père un champ ; puis elle se jeta fort impétueusement de dessus l’âne où elle était ; et Caleb lui dit : Qu’as-tu ?

15 Et elle lui répondit : Donne-moi un présent ; puisque tu m’as donné une terre sèche, donne-moi des sources d’eaux. Et Caleb lui donna les sources de dessus, et les sources de dessous.

16 Or, les enfants du Kénien, beau-père de Moïse, étaient montés de la ville des palmes, avec les descendants de Juda, au désert de Juda, qui est au midi de Harad ; car ils avaient marché, et ils étaient demeurés avec le peuple.

17 Puis Juda s’en alla avec Siméon son frère, et ils battirent les Cananéens qui habitaient à Tséphat, et ils la détruisirent, à la façon de l’interdit, et on appela la ville Horma.

18 Juda prit aussi Gaza avec ses confins, Asçkélon avec ses confins, et Hékron avec ses confins.

19 Et l’Eternel fut avec Juda, et ils dépossédèrent les habitants de la montagne ; mais ils ne dépossédèrent point les habitants de la vallée, parce qu’ils avaient des chariots de fer.

20 Et on donna, selon que Moïse l’avait dit, Hébron à Caleb, qui en déposséda les trois fils de Hanak.

21 Quant aux descendants de Benjamin, ils ne dépossédèrent point le Jébusien, qui habitait à Jérusalem ; c’est pourquoi le Jébusien a habité avec les enfants de Benjamin, à Jérusalem, jusqu’à ce jour.

22 Ceux aussi de la maison de Joseph montèrent contre Beth-el, et l’Eternel fut avec eux.

23 Et ceux de la maison de Joseph furent épier Beth-el, dont le nom était auparavant Luz ;

24 et les espions virent un homme, qui sortait de la ville, auquel ils dirent : Nous te prions que tu nous montres par où l’on peut entrer dans la ville, et nous te ferons grâce.

25 Il leur montra donc l’endroit par ou l’on pouvait entrer dans la ville, et ils la firent passer au fil de l’épée ; mais ils laissèrent aller cet homme-là et toute sa famille.

26 Puis, cet homme s’en étant allé au pays des Héthiens, y bâtit une ville et l’appela Luz, qui est le nom qu'elle porte jusqu’à ce jour.

27 Et Manassé ne déposséda point les habitants de Beth-scean, ni des villes de son ressort, ni les habitants de Tahanac, ni des villes de son ressort, ni les habitants de Dor, ni des villes de son ressort, ni les habitants de Jibléham, ni des villes de son ressort, ni les habitants de Méguiddo, ni des villes de son ressort ; ainsi les Cananéens osèrent encore habiter dans ce pays-là.

28 Il est vrai que quand Israël fut devenu plus fort, il rendit les Cananéens tributaires ; mais il ne les chassa pas entièrement.

29 Et Ephraïm ne déposséda point les Cananéens qui habitaient à Guézer ; mais les Cananéens habitèrent avec lui à Guézer.

30 Zabulon ne déposséda point les habitants de Kitron, ni les habitants de Nahalol ; mais les Cananéens habitèrent avec lui, et ils lui furent tributaires.

31 Ascer ne déposséda point les habitants de Hacco, ni les habitants de Sidon, ni d’Alab, ni d’Aczib, ni d’Helba, ni d’Aphik, ni de Réhob ;

32 mais ceux d’Ascer habitèrent parmi les Cananéens, habitants du pays ; car ils ne les dépossédèrent point.

33 Nephthali ne déposséda point les habitants de Beth-scémès, ni les habitants de Beth-hanath ; mais il habita parmi les Cananéens, habitants du pays ; et les habitants de Beth-scémès et de Beth-hanath leur furent tributaires.

34 Et les Amorrhéens tinrent les descendants de Dan fort resserrés dans la montagne, de sorte qu’ils ne souffraient point qu’ils descendissent dans la vallée.

35 Et ces Amorrhéens osèrent encore habiter à Har-hérès, à Ajalon, et à Sçahalbim ; mais la maison de Joseph étant devenue plus forte, ils furent rendus tributaires.

36 Or, la contrée des Amorrhéens était depuis la montée de Hakrabbim, depuis la roche, et au-dessus.

REFLEXIONS

La première chose qu’on voit dans ce livre, c’est que Dieu n’abandonna pas les enfants d’Israël après que Josué fut mort et qu’il continua à leur assujettir les Cananéens. Cependant, il ne les détruisit pas tout à fait et dans presque toutes les tribus ils demeurèrent maîtres de quelques endroits du pays, Dieu le voulant ainsi, afin que ces peuples fussent un instrument en sa main pour châtier les Israélites lorsqu’ils l’offenseraient. Ce fut en effet ce qui arriva à diverses fois comme on le voit dans ce livre des juges. Il y a une réflexion particulière à faire sur Adonibések à qui les enfants d’Israël coupèrent les gros doigts des pieds et des mains et qui avait traité soixante et dix princes de la même manière. Cet exemple fait voir que Dieu est un juste juge et qu’il fait retomber sur les hommes injustes et cruels le même mal qu’ils avaient fait aux autres.

CHAPITRE II.

Les enfants d’Israël étant tombés dans l’idolâtrie après la mort de Josué, Dieu leur envoya son ange pour les reprendre de leur rébellion, il les en punit en les livrant à diverses fois à leurs ennemis et lorsqu’ils se convertissaient, il suscitait des juges pour les délivrer.

1 Or, l’ange de l’Éternel monta de Guilgal à Bokim, et il dit : Je vous ai fait monter hors d’Égypte, et je vous ai fait entrer au pays dont j’avais juré à vos pères, et j’ai dit : Je n’enfreindrai jamais l’alliance que j’ai traitée avec vous.

2 Et vous ne traiterez point aussi d’alliance avec les habitants de ce pays, et vous démolirez leurs autels. Mais vous n’avez point obéi à ma voix. Pourquoi avez-vous fait cela ?

3 Aussi j’ai dit : Je ne les chasserai point de devant vous ; mais ils seront à vos côtés ; et leurs dieux vous seront en piège.

4 Et sitôt que l’ange de l’Éternel eut dit ces paroles à tous les enfants d’Israël, le peuple éleva sa voix, et pleura.

5 Et ils appelèrent ce lieu-là Bokim, et ils sacrifièrent là à l’Éternel.

6 Or, Josué ayant renvoyé le peuple, les enfants d’Israël étaient allés chacun à son héritage, pour posséder le pays.

7 Et le peuple avait servi l’Éternel, tout le temps de Josué, et tout le temps des anciens qui survécurent à Josué, et qui avaient vu les grandes œuvres que l’Éternel avait faites en faveur d’Israël ;

8 puis Josué, fils de Nun, serviteur de l’Éternel, était mort, âgé de cent et dix ans.

9 Et on l’avait enseveli dans les bornes de son héritage, à Timnath-hérès, sur la montagne d’Ephraïm, du côté du septentrion de la montagne de Gahas.

10 Et toute cette génération avait aussi été recueillie avec ses pères ; puis une autre génération s’était levée après eux, laquelle n’avait point connu l’Éternel, ni les œuvres qu’il avait faites pour Israël.

11 Les enfants d’Israël donc firent ce qui déplaît à l’Éternel, et ils servirent les Bahalims.

12 Et ayant abandonné l’Éternel, le Dieu de leurs pères, qui les avait fait sortir du pays d’Égypte, ils allèrent après d’autres dieux, d’entre les dieux des peuples qui étaient autour d’eux, et ils se prosternèrent devant eux ; ainsi ils irritèrent l’Éternel.

13 Ils abandonnèrent donc l’Éternel, et servirent Bahal et Hasçtaroth.

14 Et la colère de l’Éternel s’embrasa contre Israël, et il les livra entre les mains de gens qui les pillèrent, et il les livra à leurs ennemis qui étaient autour d’eux, et ils ne purent plus subsister devant leurs ennemis.

15 Partout où ils allaient, la main de l’Éternel était contre eux en mal, comme l’Éternel en avait parlé, et comme l’Éternel le leur avait juré ; ainsi ils furent dans de grandes angoisses.

16 Et l’Éternel leur suscitait des juges, qui les délivraient de la main de ceux qui les pillaient.

17 Mais ils ne voulaient pas même écouter leurs juges, et ils se prostituaient après d’autres dieux ; ils se prosternaient devant eux, et ils se détournaient aussitôt du chemin par lequel avaient marché leurs pères, qui avaient obéi aux commandements de l’Éternel ; ils n’en usaient pas ainsi.

18 Or, quand l’Éternel leur suscitait des juges, l’Éternel était aussi avec le juge, et les délivrait de la main de leurs ennemis, pendant tout le temps de la vie du juge ; car l’Éternel se repentait, lorsqu’il entendait les sanglots qu’ils jetaient à cause de ceux qui les opprimaient et qui les accablaient.

19 Puis, quand le juge mourait, ils se corrompaient de nouveau plus que leurs pères, allant après d’autres dieux, pour les servir et se prosterner devant eux ; ils ne rabattaient rien de leurs déportements, ni de leur train obstiné.

20 C’est pourquoi, la colère de l’Éternel s’embrasa contre Israël, et il dit : Puisque cette nation a violé mon alliance, que j’avais commandé à leurs pères de garder, et qu’ils n’ont point obéi à ma voix,

21 aussi ne déposséderai-je plus de devant eux aucune des nations que Josué laissa quand il mourut,

22 afin d’éprouver par elles Israël, s’ils garderont, ou non, la voie de l’Éternel pour y marcher, comme leurs pères l’ont gardée.

23 L’Éternel donc laissa ces nations-là, sans les déposséder sitôt, et il ne les livra point entre les mains de Josué.

REFLEXIONS

Ce chapitre contient plusieurs instructions importantes et particulièrement ces quatre :

I. Ce qui est dit que les Israélites se corrompirent après la mort de Josué et des anciens et qu’il s’éleva une nouvelle génération qui n’avait point connu Dieu fait voir que les hommes oublient facilement les bienfaits du Seigneur et leur devoir, que les peuples se corrompent lorsqu’ils n’ont pas de bons conducteurs et que l’un des plus grands malheurs qui puisse arriver à un peuple, c’est lorsque Dieu retire des conducteurs et des magistrats pieux.

II. Ce chapitre nous apprend que Dieu pour punir les Israélites les livra à leurs ennemis, que la main de Dieu était partout contre eux en mal, en sorte qu’ils se virent dans d’extrêmes angoisses. On voit par-là que, dès que l’on abandonne Dieu, on ne peut être que très misérable et que sa protection se retire de dessus ceux qui l’offensent.

III. La troisième réflexion regarde la bonté de Dieu envers les Israélites. Les voyants engagés dans la rébellion et dans l’idolâtrie, il leur envoya son ange pour leur reprocher leur infidélité et dès qu’ils reconnurent et pleurèrent leurs égarements, il fut touché de leurs larmes et il leur suscita des libérateurs.

Dieu ne cherche que le salut et le retour des pécheurs, c’est pour les rappeler à lui qu’il les fait avertir et qu’il joint à ses avertissements les coups de sa verge, mais dès qu’il les voit sincèrement humiliés, il s’apaise envers eux.

IV. Enfin, l’on doit faire une attention particulière à ce qui est dit ici, que, quand les juges étaient morts et que les enfants d’Israël avaient du repos, ils perdaient bientôt les bons sentiments qu’ils avaient pris dans l’affliction, qu’ils retournaient à leurs péchés et qu’ils s’attiraient par-là de nouveaux châtiments.

Voilà quelle est l’inconsistance des hommes, ils abusent facilement du repos et cela fait voir combien il est nécessaire que Dieu les châtie et les réveille de temps en temps, de peur que la prospérité ne les corrompe et ne les perde.

CHAPITRE III.

Ce chapitre contient : I. Le dénombrement des nations qui demeurèrent de reste parmi les enfants d’Israël et qui les engagèrent dans l’idolâtrie. II. L’histoire des trois premiers juges d’Israël, savoir Hotniel qui fut le premier après Josué et qui affranchit le peuple de la servitude du roi de Mésopotamie. III. Ehud qui les délivra des Moabites, et Sçamgar qui les délivra des Philistins.

1 Ce sont ici les nations que l’Éternel laissa pour éprouver par elles Israël, savoir tous ceux qui n’avaient point eu de connaissance de toutes les guerres de Canaan ;

2 afin, au moins que la postérité des enfants d’Israël sussent et apprissent ce que c’est que la guerre ; au moins ceux qui n’en avaient rien connu auparavant.

3 Ces nations furent, les cinq gouvernements des Philistins, et tous les Cananéens, les Sidoniens et les Héviens, qui habitaient dans la montagne du Liban, depuis la montagne de Bahal-hermon, jusqu’à l’entrée de Hémath.

4 Ces nations donc servirent à éprouver Israël, pour voir s’ils obéiraient aux commandements que l’Éternel avait faits à leurs pères par Moïse.

5 Ainsi les enfants d’Israël habitèrent parmi les Cananéens, les Héthiens, les Amorrhéens, les Phérésiens, les Héviens, et les Jébusiens.

6 Et ils prirent leurs filles pour leurs femmes, et ils donnèrent leurs filles à leurs fils, et servirent leurs dieux.

7 Les enfants d’Israël donc firent ce qui est mauvais devant l’Éternel, et ils oublièrent l’Éternel leur Dieu, et ils rendirent un culte aux Bahalims et aux bocages.

8 C’est pourquoi la colère de l’Éternel s’embrasa contre Israël, et il les livra entre les mains de Cusçan-risçhathajim, roi de Mésopotamie. Et les enfants d’Israël furent assujettis à Cusçan-risçhathajim huit ans.

9 Puis les enfants d’Israël crièrent à l’Éternel, et l’Éternel leur suscita un libérateur qui les délivra, savoir, Hothniel, fils de Kénaz, frère puîné de Caleb.

10 Et l’Esprit de l’Éternel fut sur lui, et il jugea Israël, et il sortit en bataille, et l’Éternel livra entre ses mains Cusçan-risçhathajim, roi d’Aram, et sa main fut fortifiée contre Cusçan-risçhathajim.

11 Et le pays fut en repos quarante ans ; et Hothniel, fils de Kénaz, mourut.

12 Puis les enfants d’Israël se mirent de nouveau à faire ce qui est mauvais devant l’Éternel ; et l’Éternel fortifia Héglon, roi de Moab, contre Israël, parce qu’ils avaient fait ce qui est mauvais devant l’Éternel ;

13 il se joignit donc avec les Hammonites et les Hamalékites, et il alla et battit Israël, et ils possédèrent la ville des palmes.

14 Et les enfants d’Israël furent asservis à Héglon, roi de Moab, dix-huit ans.

15 Puis les enfants d’Israël crièrent à l’Éternel, et l’Éternel leur suscita un libérateur, savoir, Ehud, fils de Guéra, Benjamite, dont la main droite était serrée. Et les enfants d’Israël envoyèrent par son moyen un présent à Héglon, roi de Moab.

16 Or, Ehud s’était fait une épée à deux tranchants, de la longueur d’une coudée, qu’il avait ceinte sous ses habits, sur sa cuisse droite.

17 Et il offrit le présent à Héglon, roi de Moab ; et Héglon était un homme fort gras.

18 Or, quand il eut achevé d’offrir le présent, il renvoya le peuple qui avait apporté le présent.

19 Puis, étant retourné depuis les carrières qui étaient vers Guilgal, il dit : O roi ! j’ai à te dire un mot en secret. Et il lui répondit : Tais-toi. Et tous ceux qui étaient auprès de lui, sortirent d’avec lui.

20 Alors Ehud vint à lui (or, il était assis seul dans la salle d’été), et il dit : J’ai un mot à te dire de la part de Dieu. Alors Héglon se leva du trône ;

21 et Ehud, avançant sa main gauche, prit l’épée de dessus sa cuisse droite, et la lui enfonça si avant dans le ventre,

22 que la poignée entra après la lame ; et la graisse serra tellement la lame qu’il ne pouvait tirer l’épée du ventre ; les excréments en sortirent.

23 Après cela, Ehud sortit par le vestibule, fermant après soi les portes de la chambre, qu’il ferma à la clef.

24 Ainsi il sortit ; et les serviteurs de Héglon vinrent et regardèrent ; et voilà, les portes de la chambre étaient fermées à la clef ; et ils dirent : Sans doute il est à ses affaires dans sa chambre d’été.

25 Et ils attendirent tant qu’ils en furent honteux, voyant qu’il n’ouvrait point les portes de la chambre, et ils prirent la clef, et l’ouvrirent ; et voici, leur seigneur était étendu mort sur la terre.

26 Mais Ehud échappa pendant qu’ils s’amusaient, et il passa les carrières, et se sauva à Séhira.

27 Et quand il y fut entré, il sonna de la trompette dans la montagne d’Ephraïm, et les enfants d’Israël descendirent avec lui de la montagne ; il marchait devant eux.

28 Et il leur dit : Suivez-moi, car l’Éternel a livré vos ennemis, savoir, les Moabites, entre vos mains. Ainsi ils descendirent après lui, et se saisissant des passages du Jourdain contre les Moabites, ils ne laissèrent passer personne.

29 Et en ce temps-là ils tuèrent des Moabites environ dix mille hommes, tous en bon état, et tous vaillants, et il n’en échappa aucun.

30 En ce jour-là donc Moab fut humilié sous la main d’Israël. Et le pays eut du repos pendant quatre-vingts ans.

31 Et après Ehud, Sçamgar, fils de Hanath, fut en sa place. Ce fut lui qui frappa six cents Philistins avec un aiguillon à bœufs, et qui délivra aussi Israël.

REFLEXIONS

Ce chapitre nous oblige à considérer :

I. Que Dieu laissa les Cananéens parmi les enfants d’Israël pour éprouver ce peuple et pour le châtier par le moyen de ces nations idolâtres. C’est là une image de l’état où nous sommes en ce monde. Dieu nous dispense toujours des maux et nous expose à des tentations afin de nous obliger à être sur nos gardes et d’éprouver notre fidélité.

II. Nous voyons ici que le peuple d’Israël, s’étant mêlé et allié par des mariages avec les Cananéens contre la défense expresse de Dieu et ayant adoré leurs idoles, le Seigneur l’en punit par le moyen de ces peuples mêmes et des rois voisins afin de le ramener à son devoir.

Nous devons considérer sur cela que le commerce avec les méchants est un engagement dans le crime et que Dieu par un effet de sa justice et de l’amour qu’il a pour les hommes les châtie pour les retirer de leurs égarements et leur fait trouver la punition de leurs péchés dans leurs péchés mêmes.

III. Lorsque les Israélites reconnaissaient leurs fautes et qu’ils criaient au Seigneur, il leur envoyait des libérateurs. Cela montre combien il est utile aux hommes d’être affligés et quelle est la miséricorde de Dieu envers ceux qui profitent de ses châtiments.

IV. Ce qui est remarqué qu’aussitôt que les Israélites jouissaient du repos, ils se corrompaient de nouveau nous apprend que la prospérité est un état dangereux et que l’adversité nous est très nécessaire.

Enfin, il y a une réflexion particulière à faire sur l’action d’Éhud qui tua Héglon roi des Moabites.  Cette action serait criminelle si Éhud ne l’eût pas faite par l’ordre de Dieu. Ainsi elle ne doit point être tirée à conséquence et il ne faut pas abuser de cet exemple pour s’autoriser à faire rien de semblable, ni envers des princes injustes et oppresseurs, ni envers qui que ce puisse être.

CHAPITRE IV

Ce chapitre contient l’histoire de Débora qui jugea les Israélites après la mort de Sçamgar et qui les délivra avec Barac de la tyrannie de Jabin roi de Hatsor.

1 Après qu’Ehud fut mort, les enfants d’Israël se mirent de nouveau à faire ce qui est mauvais devant l’Éternel.

2 C’est pourquoi l’Éternel les livra entre les mains de Jabin, roi de Canaan, qui régnait à Hatsor, et qui avait pour chef de son armée Sisera, qui habitait à Harosceth des gentils.

3 Alors les enfants d’Israël crièrent à l’Éternel ; car Jabin avait neuf cents chariots de fer, et il avait opprimé avec beaucoup de violence les enfants d’Israël, vingt ans.

4 En ce temps-là, Débora, prophétesse, femme de Lappidoth, jugeait Israël.

5 Et cette Débora se tenait sous un palmier, entre Rama et Beth-el, dans la montagne d’Ephraïm, et les enfants d’Israël montaient vers elle pour être jugés.

6 Or, elle envoya appeler Barac, fils d’Abinoham, de Kédès, de Nephthali, et lui dit : L’Éternel, le Dieu d’Israël, n’a-t-il pas donné ce commandement : Va, fais venir en la montagne de Tabor dix mille hommes des enfants de Nephthali et des enfants de Zabulon, et prends-les avec toi ;

7 j’attirerai aussi à toi, au torrent de Kisçon, Sisera, chef de l’armée de Jabin, avec ses chariots et la multitude de ses gens, et je le livrerai entre tes mains ?

8 Et Barac lui dit : Si tu viens avec moi, j’irai ; mais si tu ne viens pas avec moi, je n’irai pas.

9 Et elle répondit : Je ne manquerai point d’aller avec toi ; mais tu n’auras point d’honneur dans ton entreprise ; car l’Éternel livrera Sisera entre les mains d’une femme. Débora donc, se levant, s’en alla avec Barac à Kédès.

10 Et Barac ayant assemblé Zabulon et Nephthali à Kédès, fit monter après lui dix mille hommes ; et Débora monta avec lui.

11 Or, Héber, Kénien, des enfants de Hobab, parent de Moïse, s’étant séparé des Kéniens, avait tendu ses tentes jusqu’au chêne de Tsahanajim, qui est auprès de Kédès.

12 Alors on rapporta à Sisera que Barac, fils d’Abinoham, était monté à la montagne de Tabor.

13 Et Sisera assembla tous ses chariots, neuf cents chariots de fer, et tout le peuple qui était avec lui, depuis Harosceth des gentils jusqu’au torrent de Kisçon.

14 Et Débora dit à Barac : Lève-toi ; car c’est ici le jour que l’Éternel a livré Sisera en ta main. L’Éternel n’est-il pas sorti devant toi ? Barac donc descendit de la montagne de Tabor, et il avait dix mille hommes après lui.

15 Et l’Éternel mit en déroute Sisera, et tous les chariots, et tout le camp, et il les fit passer au fil de l’épée devant Barac, de sorte que Sisera descendit du chariot, et s’enfuit à pied.

16 Et Barac poursuivit les chariots et le camp jusqu’à Harosceth des gentils, et tout le camp de Sisera fut passé au fil de l’épée ; il n’en demeura pas un seul.

17 Et Sisera s’enfuit à pied à la tente de Jahel, femme de Héber, Kénien ; car il y avait paix entre Jabin, roi de Hatsor, et entre la maison de Héber, Kénien.

18 Et Jahel étant sortie au-devant de Sisera, lui dit : Mon seigneur, retire-toi, retire-toi chez moi ; ne crains point. Il se retira donc chez elle dans la tente, et elle le cacha sous une couverture.

19 Puis il lui dit : Je te prie, donne-moi un peu d’eau à boire, car j’ai soif. Et elle, ouvrant un baril de lait, lui donna à boire et le couvrit.

20 Il lui dit encore : Demeure à l’entrée de la tente, et au cas que quelqu’un vienne et t’interroge, disant : Y a-t-il ici quelqu’un ? alors tu répondras : Non.

21 Et Jahel, femme de Héber, prit un clou de la tente ; et prenant un marteau en sa main, elle vint à lui doucement, et lui transperça la tempe de ce clou, qui s’enfonça en terre, pendant qu’il dormait profondément, étant fort las ; et ainsi il mourut.

22 Et Barac poursuivait Sisera, et Jahel sortit au-devant de lui, et lui dit : Viens, et je te montrerai l’homme que tu cherches. Et Barac entra chez elle, et voici, Sisera était étendu mort, et le clou était dans sa tempe.

23 En ce jour-là donc, Dieu humilia Jabin, roi de Canaan, devant les enfants d’Israël.

24 Et la puissance des enfants d’Israël allait se renforçant de plus en plus contre Jabin, roi de Canaan, jusqu’à ce qu’ils l’eussent exterminé.

REFLEXIONS

Il y a trois considérations principales à faire sur ce chapitre :

I. La première, que les enfants d’Israël offensèrent Dieu de nouveau et que Dieu pour les punir les assujettit à Jabin roi de Hatsor qui les opprima pendant vingt ans. Voilà comment les hommes oublient dans la prospérité les maux qu’ils ont soufferts et s’en attirent de nouveaux et de plus grands en retournant dans leurs péchés.

II. La seconde considération est que Dieu fléchi par les cris et par la repentance des Israélites les délivra par le moyen de Débora qui les jugeait en ce temps-là. Le choix que Dieu fit de cette femme devait apprendre aux Israélites que c’était à Dieu seul qu’ils étaient redevables de leur délivrance et cela montre que Dieu se sert de toutes sortes d’instruments, même des plus faibles, pour exécuter ses desseins.

III. Pour ce qui est de l’action de Jahel, qui tua Sisera endormi à qui elle avait donné retraite chez elle et avec qui elle et son peuple étaient en paix, cette action est tout-à-fait condamnable en elle-même et n’est point à imiter, bien que Dieu voulût s’en servir pour détruire entièrement les ennemis de son peuple.

CHAPITRE V

Débora loue le Seigneur par un cantique après qu’elle eût remporté la victoire avec Barac sur le roi de Hatsor. Elle célèbre la puissance de Dieu et surtout cette grande délivrance qu’il venait d’accorder à son peuple. Ce cantique est écrit dans un style poétique et figuré. On y voit des images et des façons de parler éloignées de nos usages, ce qui répand quelque obscurité.

1 En ce jour-là, Débora, avec Barac, fils d’Abinoham, chanta ce cantique, en disant :

2 Bénissez l’Eternel de ce qu’il a fait de telles vengeances en Israël, et de ce que le peuple a été porté de bonne volonté.

3 Vous rois, écoutez-moi ; vous princes, prêtez l’oreille ; c’est moi, c’est moi qui chanterai à l’Eternel, et qui psalmodierai à l’Eternel, le Dieu d’Israël.

4 O Eternel ! quand tu sortis de Séhir, quand tu partis du territoire de l’Idumée, la terre fut ébranlée, même les cieux se fondirent, même les nuées se fondirent en eaux,

5 les montagnes s’écoulèrent de devant l’Eternel, et ce mont de Sinaï même, de devant l’Eternel, le Dieu d’Israël.

6 Aux jours de Sçamgar, fils de Hanath, aux jours de Jahel, les grands chemins n’étaient plus fréquentés, et les voyageurs allaient par des routes détournées ;

7 les bourgs n’étaient plus habités en Israël, ils n’étaient plus habités jusqu’à ce que je me suis levée, moi Débora, je me suis levée, pour être une mère en Israël.

8 Israël choisissait-il des dieux nouveaux, aussitôt la guerre était aux portes. On ne voyait ni bouclier ni lance parmi quarante mille soldats d’Israël.

9 Mon cœur se tourne vers les gouverneurs d’Israël, vers ceux du peuple qui ont été de bonne volonté ;

10 bénissez l’Eternel, vous qui montez sur des ânesses blanches, qui êtes assis sur le siège de la justice, et qui allez par les chemins ; parlez

11 du bruit des archers qu’on entendait dans les lieux où l’on puisait l’eau ; qu’on s’entretienne de la justice de l’Eternel, et de ses jugements dans ses bourgs en Israël. Alors le peuple de Dieu est descendu aux portes.

12 Réveille-toi, réveille-toi, Débora, réveille-toi, réveille-toi, prononce le cantique ; lève-toi, Barac, et emmène en captivité ceux que tu as faits captifs, toi, fils d’Abinoham.

13 Alors celui qui était demeuré de reste a dominé sur les puissants du peuple. L’Eternel m’a fait dominer sur les plus forts.

14 C’est d’Ephraïm qu’est venu celui qui les a déracinés jusqu’à Hamalek ; Benjamin a été après toi parmi les peuples ; c’est de Makir que sont descendus les législateurs, et de Zabulon ceux qui portent le sceptre et qui écrivent.

15 Et les principaux d’Issacar ont été avec Débora et Issacar, aussi bien que Barac ; il a été envoyé avec sa suite dans la vallée. Dans les partages de Ruben, ils ont eu de grandes contestations dans leur cœur.

16 Pourquoi es-tu demeuré entre les barres des étables, pour entendre le bêlement des troupeaux ? Dans les partages de Ruben, ils ont eu, de grandes contestations dans leur cœur.

17 Galaad est demeuré au-delà du Jourdain ; et Dan, pourquoi se tient-il dans ses navires ? Ascer s’est tenu aux ports de la mer, et il est demeuré dans ses havres.

18 Zabulon est un peuple qui a exposé sa vie à la mort, avec Nephthali, en rase campagne.

19 Les rois sont venus, ils ont combattu ; les rois de Canaan ont combattu à Tahanac, près des eaux de Méguiddo ; mais ils n’ont point remporté d’argent.

20 On a combattu des cieux ; même les étoiles ont combattu contre Sisera, du lieu où elles font leur cours.

21 Le torrent de Kisçon les a entraînés, le torrent ancien, le torrent de Kisçon ; mon âme foulera aux pieds leur force.

22 Alors les cornes des pieds des chevaux se sont rompues par la course, par la course des vaillants hommes qui fuyaient.

23 Maudissez Méroz, a dit l’ange de l’Éternel, maudissez, maudissez ses habitants, car ils ne sont point venus au secours de l’Éternel, au secours de l’Éternel, avec les hommes puissants.

24 Que Jahel, femme de Héber, Kénien, soit bénie par-dessus toutes les femmes ! qu’elle soit bénie par-dessus les femmes qui demeurent dans les tentes !

25 Sisera lui a demandé de l’eau ; elle lui a donné du lait, elle lui a présenté de la crème, dans la coupe des grands seigneurs ;

26 ses mains ont pris un clou, et sa main droite un marteau d’ouvrier ; elle a frappé Sisera, et lui a fendu la tête ; elle lui a transpercé et traversé les tempes.

27 Il se courba, il tomba à ses pieds, il fut étendu par terre ; il se courba, il tomba à ses pieds ; et là où il se courba, il tomba là tout défiguré.

28 La mère de Sisera regardait par la fenêtre et s’écriait, en regardant par les treillis : Pourquoi son char tarde-t-il à venir ? Pourquoi ses chariots vont-ils si lentement ?

29 Et les plus sages de ses dames lui répondirent, et elle se le disait aussi à elle-même :

30 N’ont-ils pas trouvé du butin ? Ils le partagent ; une fille, deux filles à chacun, par tête. Le butin des habits de couleurs est à Sisera, le butin des habits de couleurs et faits en broderie ; il a pris pour butin des habits de couleurs brodés en deux endroits, pour mettre autour du cou.

31 Ainsi périssent, ô Éternel, tous tes ennemis, et que ceux qui t’aiment soient comme le soleil quand il sort en sa force ! Et le pays fut en repos quarante ans.

REFLEXIONS

Ce cantique de Débora nous montre que cette femme n’était pas moins illustre par son zèle que par sa valeur et sa prudence, en quoi elle doit servir d’exemple tant aux personnes de son sexe qu’à ceux qui sont élevés en autorité et leur apprendre à se confier en Dieu seul et à lui rendre la gloire de tous les heureux succès qu’ils ont.

Après cela il paraît ici que c’est un usage fort ancien de louer Dieu publiquement par des cantiques quand on a reçu de lui des faveurs signalées. C’est aussi ce que nous devons faire avec zèle et reconnaissance, non seulement dans la vue des faveurs temporelles, mais surtout dans le sentiment des grâces et des délivrances spirituelles, rapportant à la puissance et à la bonté de Dieu tous les biens qui nous arrivent et lui en rendant des louanges et des bénédictions publiques et solennelles.

CHAPITRE VI.

Ce chapitre a quatre parties on y voit : I. La rébellion des Israélites contre Dieu et la punition qu’il en fit en les assujettissant aux Madianites, aussi bien que les reproches qu’il leur fit faire par un prophète. II. La vocation de Gédéon qui fut le cinquième juge d’Israël. III. Le zèle que Gédéon témoigna en abattant l’autel de bahal.IV. Le miracle de la toison.

1 Or, les enfants d’Israël firent ce qui est mauvais devant l’Éternel, et l’Éternel les livra entre les mains des Madianites, pendant sept ans.

2 Et la puissance des Madianites se renforça tellement contre Israël, qu’à cause des Madianites, les enfants d’Israël se firent des antres dans les montagnes, et des cavernes, et des forts.

3 Car il arrivait que, quand Israël avait semé, les Madianites montaient avec les Hamalékites et les Orientaux, et ils montaient contre lui ;

4 et faisant un camp contre eux, ils faisaient le dégât des fruits du pays jusqu’à Gaza, et ne laissaient rien de reste en Israël, ni vivres, ni menu bétail, ni bœufs, ni ânes.

5 Car eux et leurs troupeaux montaient, et ils venaient avec leurs tentes en grande multitude comme des sauterelles, et eux et leurs chameaux étaient sans nombre, et ils venaient dans le pays pour le ravager.

6 Israël donc fut fort abaissé par les Madianites, et les enfants d’Israël crièrent à l’Éternel.

7 Et les enfants d’Israël ayant crié à l’Éternel, à l’occasion des Madianites,

8 l’Éternel envoya un prophète vers les enfants d’Israël, qui leur dit : Ainsi a dit l’Éternel, le Dieu d’Israël : Je vous ai fait monter hors d’Égypte, et je vous ai tirés de la maison de servitude,

9 et je vous ai délivrés de la main des Égyptiens, et de la main de tous ceux qui vous opprimaient, et je les ai chassés loin de vous, et je vous ai donné leur pays ;

10 je vous ai dit aussi : Je suis l’Éternel votre Dieu, vous ne servirez point les dieux des Amorrhéens, au pays desquels vous habitez ; mais vous n’avez point obéi à ma voix.

11 Puis l’ange de l’Éternel vint, et s’assit sous un chêne qui était à Hophra, qui appartenait à Joas, Abihézérite. Et Gédéon, son fils, battait le froment près d’un pressoir, pour l’ôter de devant les Madianites.

12 Alors l’ange de l’Éternel lui apparut, et lui dit : Très-fort et vaillant homme, l’Éternel est avec toi.

13 Et Gédéon lui répondit : Hélas ! mon Seigneur, est-il possible que l’Éternel soit avec nous ? Et pourquoi donc toutes ces choses nous sont-elles arrivées ? Et où sont toutes ces merveilles que nos pères nous ont racontées, disant : L’Eternel ne nous a-t-il pas fait monter hors d’Egypte ? Car maintenant l’Eternel nous a abandonnés, et nous a livrés entre les mains des Madianites.

14 Et l’Eternel le regardant, lui dit : Va avec cette force dont tu es rempli, et tu délivreras Israël de la main des Madianites. Ne t’ai-je pas envoyé ?

15 Et il lui répondit : Hélas ! mon Seigneur, par quel moyen délivrerai-je Israël ? Voici, mon millier est le plus pauvre qu’il y ait dans Manassé ; et je suis le plus petit de la maison de mon père.

16 Et l’Eternel lui dit : Parce que je serai avec toi ; et tu battras les Madianites comme s’ils n’étaient qu’un seul homme.

17 Et il lui répondit : Je te prie, si j’ai trouvé grâce devant toi, de me donner un signe que c’est toi qui parles avec moi.

18 Je te prie, ne pars point d’ici, jusqu’à ce que je revienne à toi, et que j’apporte mon offrande, et que je la mette devant toi. Et il dit : J’y demeurerai jusqu’à ce que tu reviennes.

19 Alors Gédéon rentra, et apprêta un chevreau de lait, et des gâteaux sans levain d’un épha de farine, et il mit la chair dans un panier, et le bouillon dans un pot, et il les lui apporta sous le chêne, et les lui présenta.

20 Et l'ange de Dieu lui dit : Prends cette chair et ces gâteaux sans levain, et mets-les sur ce rocher, et répands le bouillon. Et il fit ainsi.

21 Alors l’ange de l’Eternel, ayant avancé le bout du bâton qu’il avait en sa main, toucha la chair et les gâteaux sans levain, et le feu monta du rocher, et consuma la chair et les gâteaux sans levain ; et l’ange de l’Eternel s’en alla de devant lui.

22 Et Gédéon vit que c’était l’ange de l’Eternel, et il dit : Ha, Seigneur Eternel ! car j’ai vu l’ange de l’Eternel face à face.

23 Et l’Eternel lui dit : La paix est avec toi ; ne crains point, tu ne mourras point.

24 Et Gédéon bâtit là un autel à l’Eternel, et l’appela JÉHOVAH-SÇALOM. Il est jusqu’à ce jour à Hophra des Abihézérites.

25 Et il arriva, en cette nuit-là, que l’Eternel lui dit : Prends un jeune taureau, d’entre les taureaux qui sont à ton père, savoir, le second taureau âgé de sept ans, et démolis l’autel de Bahal qui est à ton père, et coupe le bocage qui est auprès,

26 et bâtis un autel à l’Eternel ton Dieu, sur le haut de ce fort, dans un lieu convenable ; tu prendras ce second taureau, et tu l’offriras en holocauste, avec les arbres du bocage que tu couperas.

27 Gédéon donc ayant pris dix hommes d’entre ses serviteurs, fit comme l’Eternel lui avait dit ; et parce qu’il craignait la maison de son père, et les gens de la ville, s’il l’eût fait de jour, il le fit de nuit.

28 Et les gens de la ville se levèrent de bon matin, et voici, l’autel de Bahal avait été démoli, et le bocage qui était auprès, était coupé, et le second taureau était offert en holocauste sur l’autel qu’on avait bâti.

29 Et ils se disaient les uns aux autres : Qui a fait ceci ? Et s’en étant enquis, et ayant recherché la chose, ils dirent : C’est Gédéon, fils de Joas.

30 Puis les gens de la ville dirent à Joas : Fais sortir ton fils, et qu’il meure ; car il a démoli l’autel de Bahal, et il a aussi coupé le bocage qui était auprès.

31 Et Joas répondit à tous ceux qui s’adressèrent à lui : Est-ce à vous à défendre la cause de Bahal ? Est-ce à vous à le sauver ? quiconque aura pris en main sa cause, sera mis à mort avant que le matin vienne. S’il est Dieu, qu’il défende sa cause, de ce qu’on a démoli son autel.

32 Et en ce jour-là, il appela Gédéon, Jérubbahal, disant : Que Bahal défende sa cause contre lui, de ce que Gédéon a démoli son autel.

33 Or, tous les Madianites, les Hamalékites et les Orientaux, s’assemblèrent tous, et ayant passé le Jourdain, ils campèrent dans la vallée de Jizréhel.

34 Et l’Esprit de l’Eternel revêtit Gédéon, et il sonna de la trompette, et on convoqua les Abihézérites pour le suivre.

35 Il envoya aussi des messagers par toute la tribu de Manassé, qui fut aussi convoquée pour marcher après lui ; puis il envoya des messagers à Ascer, à Zabulon, et à Nephthali, qui montèrent pour aller à leur rencontre.

36 Et Gédéon dit à Dieu : Si tu dois délivrer Israël par mon moyen, comme tu l’as dit,

37 voici, je vais mettre une toison dans l’aire ; si la rosée est sur la toison seule, et que la terre soit sèche, je connaîtrai que tu délivreras Israël par mon moyen, selon que tu m’en as parlé.

38 Et la chose arriva ainsi ; car s’étant levé de bon matin le lendemain, et ayant pressé cette toison, il en fit sortir plein une tasse d’eau de rosée.

39 Gédéon dit encore à Dieu : Que ta colère ne s’embrase point contre moi, et je parlerai seulement encore cette fois ; je te prie, que je fasse un essai en la toison, pour cette fois seulement ; je te prie, que la toison seule soit sèche, et que la rosée soit sur toute cette terre.

40 Et Dieu fit ainsi cette nuit-là ; car la toison seule fut sèche, et la rosée fut sur toute cette terre.

REFLEXIONS

Il faut considérer ici :

I. Premièrement une nouvelle rébellion des Israélites dans laquelle on voit avec combien de promptitude ce peuple retournait à l’idolâtrie, nonobstant tous les châtiments qu’il avait déjà soufferts et les délivrances que Dieu lui avait accordées,

II. En second lieu, la punition que Dieu en fit en les livrant aux Madianites qui les opprimèrent et les réduisirent à de grandes extrémités

III. Et en troisième lieu la bonté que Dieu eut lorsqu’ils crièrent à lui de leur envoyer un prophète pour les exhorter à la repentance et de susciter Gédéon qui fut leur libérateur.

Cette histoire nous fait voir quelle est ordinairement la malice et l’ingratitude des hommes envers Dieu. On y remarque la nécessité et le fruit des afflictions et l’on y découvre la miséricorde du Seigneur envers ceux qui recourent à lui avec humilité.

Il est à remarquer que lorsque l’ange du Seigneur appela Gédéon et qu’il l’assura que Dieu était avec lui, Gédéon ne pouvait croire que Dieu fût avec son peuple dans un temps où les Madianites l’opprimaient si cruellement, mais l’ange du Seigneur ne laissa pas de lui promettre que les Israélites seraient délivrés par son moyen.

L’église et les enfants de Dieu se trouvent quelque-fois réduits dans un état où il semble que Dieu ne prend plus soin d’eux, mais il ne faut jamais désespérer de son secours et c’est même dans ces circonstances fâcheuses que Dieu est le plus prêt de les délivrer.

Les deux merveilles que Dieu fit l’une en consumant par le feu la chair et les gâteaux que Gédéon avait présentés à l’ange et l’autre en faisant à la prière de Gédéon le miracle de la toison tendaient à assurer ce chef du peuple de Dieu de sa protection et de son secours.

Enfin, il paraît de ce chapitre que Gédéon avait beaucoup de piété, d’humilité et de foi. On en voit des marques dans l’entretien qu’il eut avec l’ange, mais il fit surtout paraître un grand zèle en démolissant l’autel de bahal. On peut voir par cet exemple que la piété et l’humilité ne sont point incompatibles avec la valeur et que Dieu assiste et protège ceux qui soutiennent les intérêts de sa gloire. En effet, quoique Gédéon en abattant l’autel de l’idole de bahal se fut exposé à un grand danger, il ne lui arriva aucun mal, non plus qu’à Joas son père.

CHAPITRE VII.

Dieu commande à Gédéon de choisir trois cents hommes de toute l’armée d’Israël et il promet de détruire les Madianites par leur moyen.Gédéon fut assuré de cette victoire par le récit qu’il entendit faire à un soldat madianite d’un songe que ce soldat avait eu. Après quoi il attaqua les Madianites et les défit entièrement.

1 Jérubbahal donc, qui est Gédéon, s’étant levé de bon matin, et tout le peuple qui était avec lui, ils campèrent près de la fontaine de Harod ; et ils avaient le camp de Madian du côté du septentrion, vers le coteau de Moreh, dans la vallée.

2 Or, l’Eternel dit à Gédéon : Le peuple qui est avec toi, est en trop grand nombre pour livrer Madian en leurs mains ; de peur qu’Israël ne se glorifie contre moi, disant : Ma puissance m’a délivré.

3 Maintenant donc fais publier, et que le peuple l’entende et qu'on dise : Que celui qui est timide et qui a peur, s’en retourne et parte dès le matin, du côté de la montagne de Galaad. Et vingt-deux mille du peuple s’en retournèrent, et il en resta dix mille.

4 Et l’Eternel dit à Gédéon : Il y a encore trop de peuple ; fais-les descendre vers l’eau, et je te les choisirai là ; et celui dont je te dirai : Celui-ci ira avec toi, ira avec toi ; et celui duquel je te dirai : Celui-ci n’ira point avec toi, n’ira point.

5 Il fit donc descendre le peuple vers l’eau, et l’Eternel dit à Gédéon : Quiconque lapera l’eau de sa langue, comme le chien lape, tu le mettras à part ; et tu mettras aussi à part tous ceux qui se courberont sur leurs genoux pour boire.

6 Et le nombre de ceux qui lapaient l’eau dans leur main, la portant à leur bouche, fut de trois cents hommes ; et tout le reste du peuple se courba sur ses genoux pour boire de l’eau.

7 Alors l’Eternel dit à Gédéon : Je vous délivrerai par ces trois cents hommes, qui ont lapé l'eau, et je livrerai Madian entre tes mains ; et que tout le peuple s’en aille, chacun chez soi.

8 Ainsi le peuple prit en sa main de la provision, avec leurs trompettes. Et Gédéon renvoya tous les hommes d’Israël, chacun en sa tente, et il retint les trois cents hommes. Or, le camp de Madian était au-dessous, dans la vallée.

9 Et il arriva cette nuit-là, que l’Eternel lui dit : Lève-toi, descends au camp, car je l’ai livré entre tes mains.

10 Et si tu crains d’y descendre, descends vers le camp, toi et Purah ton serviteur,

11 et tu entendras ce qu’ils diront, et tes mains seront fortifiées, et tu descendras au camp. Il y descendit donc avec Purah son serviteur, jusqu’au premier corps de garde qui était au camp.

12 Or, les Madianites, les Hamalékites et tous les Orientaux étaient étendus dans la vallée comme des sauterelles, tant il y en avait, et leurs chameaux étaient sans nombre, comme le sable qui est sur le bord de la mer, tant il y en avait.

13 Gédéon donc y étant arrivé, voici un homme qui comptait à son compagnon un songe, et qui disait : Voici, j’ai fait un songe ; il me semblait qu’un gâteau de pain d’orge roulait vers le camp des Madianites, et qu’étant venu jusqu’aux tentes, il les a frappées, de sorte qu’elles sont tombées, et il les a renversées du haut en bas, et elles sont tombées.

14 Alors son compagnon répondit, et dit : Ce songe ne signifie autre chose que l’épée de Gédéon, fils de Joas, homme d’Israël. Dieu a livré Madian et tout ce camp entre ses mains.

15 Et quand Gédéon eut entendu le récit du songe et son interprétation, il se prosterna ; et étant retourné au camp d’Israël, il dit : Levez-vous ; car l’Éternel a livré le camp de Madian entre vos mains.

16 Puis il divisa ces trois cents hommes en trois bandes, et il leur donna à chacun des trompettes à la main, et des cruches vides, et des flambeaux dans les cruches ;

17 et il leur dit : Prenez garde à moi, et faites comme je ferai ; quand je serai arrivé au bout du camp, vous ferez ce que je ferai.

18 Quand donc je sonnerai de la trompette, et tous ceux qui sont avec moi, alors vous sonnerez aussi des trompettes autour de tout le camp, et vous direz : L’ÉPÉE DE L’ÉTERNEL ET DE GÉDÉON.

19 Gédéon donc, et les cent hommes qui étaient avec lui, vinrent au bout du camp, comme on venait de poser la seconde garde. Ils réveillèrent les gardes, lorsqu’ils sonnèrent des trompettes, et qu’ils cassèrent les cruches qu’ils avaient en leurs mains.

20 Ainsi les trois bandes sonnèrent des trompettes, et cassèrent les cruches, tenant en leur main gauche les flambeaux, et en leur main droite les trompettes pour sonner ; et ils criaient : L’ÉPÉE DE L’ÉTERNEL ET DE GÉDÉON.

21 Et ils se tinrent, chacun en sa place, autour du camp ; et toute l’armée courait çà et là, s’écriant et fuyant.

22 Car comme les trois cents hommes sonnaient des trompettes, l’Éternel tourna l’épée d’un chacun contre son compagnon, même par tout le camp. Et l’armée s’enfuit jusqu’à Beth-scittah, vers Tséréra, jusqu’au bord d’Abelméholah, vers Tabbat.

23 Et les hommes d’Israël, savoir, de Nephthali, et d’Ascer, et de tout Manassé, s’assemblèrent, et poursuivirent les Madianites.

24 Alors Gédéon envoya des messagers par toute la montagne d’Ephraïm, disant : Descendez, pour rencontrer les Madianites, et saisissez-vous les premiers des eaux, savoir, du Jourdain jusqu’à Beth-bara. Les hommes d’Ephraïm donc s’étant assemblés, se saisirent des eaux, savoir, du Jourdain jusqu’à Beth-bara.

25 Et ils prirent deux des chefs des Madianites, savoir, Horeb et Zéeb ; et ils tuèrent Horeb au rocher de Horeb ; mais ils tuèrent Zéeb au pressoir de Zéeb ; et ils poursuivirent les Madianites, et apportèrent les têtes de Horeb et de Zéeb à Gédéon, au deçà du Jourdain.

REFLEXIONS

L’on découvre dans cette histoire des marques toutes particulières de la providence.

I. Elle paraît premièrement en ce que Dieu fit renvoyer tous ceux d’Israël qui étaient timides et que de ceux qui restèrent de l’armée il n’en prit que trois cents, ce qui faisait bien voir que la victoire de Gédéon procédait de Dieu seul.

II. La providence intervint dans ce songe qu’eut un soldat madianite et qui servit d’un côté à intimider les ennemis du peuple d’Israël et de l’autre à remplir de confiance Gédéon et ceux qui étaient avec lui.

III. Il est surtout à remarquer que les Madianites furent effrayés et mis en déroute à l’ouïe des trompettes et à la vue des flambeaux que portaient les soldats de Gédéon, ce qui jeta tellement les Madianites dans le désordre qu’ils se tuèrent les uns les autres.

Ce sont là des marques tout à fait illustres de la puissance de Dieu et qui montrent clairement qu’il combattait pour son peuple.

On doit aussi reconnaître par-là que le Seigneur fait souvent son œuvre par les moyens les plus faibles en apparence, qu’il détruit les méchants et les ennemis de l’église et des gens de bien par eux-mêmes et qu’après avoir châtié et affligé ceux qu’il aime, il ne manque jamais de moyens pour les secourir et pour les délivrer.

 CHAPITRE VIII.

Gédéon, après avoir apaisé les Éphraïmites, poursuit la victoire qu’il avait remportée sur les Madianites et il punit les villes de Succoth et de Pénuel qui avaient refusé des rafraîchissements à ses soldats. Après ces victoires, les Israélites voulurent le faire roi, mais il le refusa. Il fit faire un éphod et le peuple d’Israël fut en repos pendant sa vie. Après sa mort, les Israélites retombèrent dans l’idolâtrie.

 1 Alors les hommes d’Ephraïm dirent à Gédéon : Que veut dire ce que tu nous as fait, de ne nous avoir point appelés, quand tu es allé à la guerre contre les Madianites ? et ils le querellèrent fort rudement.

2 Et il leur répondit : Qu’ai-je fait maintenant au prix de vous ? Les grappillages d’Ephraïm ne sont-ils pas meilleurs que la vendange d’Abihézer ?

3 Dieu a livré les chefs des Madianites entre vos mains, savoir, Horeb et Zéeb ; et qu’ai-je pu faire au prix de vous ? Et leur esprit fut apaisé envers lui, quand il leur eut ainsi parlé.

4 Or, Gédéon étant arrivé au Jourdain, le passa ; mais les trois cents hommes qui étaient avec lui, étaient las, et cependant ils poursuivaient l’ennemi.

5 C’est pourquoi, il dit aux gens de Succoth : Donnez, je vous prie, au peuple qui me suit, quelques pièces de pain, car ils sont las, et je poursuivrai Zébah et Tsalmunah, rois des Madianites.

6 Mais les principaux de Succoth répondirent : As-tu déjà la paume de Zébah et de Tsalmunah en ta main que nous donnions du pain à ton armée ?

7 Et Gédéon dit : Lors donc que l’Eternel aura livré Zébah et Tsalmunah entre mes mains, je froisserai votre chair avec des épines du désert, et avec des chardons.

8 Puis de là il monta à Pénuel, et il tint les mêmes discours à ceux de Pénuel. Et les gens de Pénuel lui répondirent comme les gens de Succoth avaient répondu.

9 Il parla donc aussi aux hommes de Pénuel, disant : Quand je retournerai en paix, je démolirai cette tour.

10 Or, Zébah, et Tsalmunah étaient à Karkor, et leurs armées étaient avec eux, environ quinze mille hommes, savoir tous ceux qui étaient demeurés de reste de toute l'armée des Orientaux ; car il y avait cent vingt mille hommes, tirant l’épée, qui étaient tombés morts.

11 Et Gédéon monta par le chemin de ceux qui habitent dans les tentes, du côté oriental de Nobah et de Jogbéha, et défit l’armée qui se tenait fort assurée.

12 Et comme Zébah et Tsalmunah fuyaient, il les poursuivit, et prit ces deux rois de Madian, Zébah et Tsalmunah, et mit en déroute toute l’armée.

13 Puis Gédéon, fils de Joas, revint de la bataille, de la montée de Hérès.

14 Et prenant un garçon de Succoth, il l’interrogea ; et ce garçon lui donna par écrit les noms des principaux de Succoth et de ses anciens, savoir, soixante et dix-sept hommes.

15 Et étant venu vers les gens de Succoth, il dit : Voici Zébah et Tsalmunah, sur le sujet desquels vous m’avez insulté, disant : As-tu déjà la paume de Zébah et de Tsalmunah en ta main, que nous donnions du pain à tes gens qui sont fatigués ?

16 Il prit donc les anciens de la ville, et des épines du désert, et des chardons, et il châtia les hommes de Succoth.

17 Il démolit aussi la tour de Pénuel, et fit mourir les principaux de la ville.

18 Puis il dit à Zébah et à Tsalmunah : Comment étaient faits ces hommes que vous avez tués à Tabor ? Ils répondirent : Ils étaient tout à fait comme toi ; chacun d’eux avait l’air des enfants d’un roi.

19 Et il leur dit : C’étaient mes frères, enfants de ma mère ; l’Eternel est vivant, si vous leur eussiez sauvé la vie, je ne vous tuerais point.

20 Puis il dit à Jéther, son premier-né : Lève-toi, tue-les. Mais le jeune garçon ne tira point son épée ; car il craignait, parce qu’il était encore un jeune garçon.

21 Et Zébah et Tsalmunah dirent : Lève-toi, toi-même, et te jette sur nous ; car tel qu’est l’homme, telle est sa force. Et Gédéon se leva, et tua Zébah et Tsalmunah, et prit les colliers qui étaient aux cous de leurs chameaux.

22 Et ceux d’Israël, tous d’un accord, dirent à Gédéon : Règne sur nous, tant toi que ton fils, et le fils de ton fils, car tu nous as délivrés de la main des Madianites.

23 Et Gédéon leur répondit : Je ne dominerai point sur vous, ni mon fils ne dominera point sur vous ; l’Eternel dominera sur vous.

24 Mais Gédéon leur dit : Je vous ferai une prière, c’est que vous me donniez, chacun de vous, les bagues d’or qu’il a eues pour butin ; car les ennemis avaient des bagues d’or, parce qu’ils étaient Ismaélites.

25 Et ils répondirent : Nous les donnerons très volontiers. Et étendant un manteau, ils jetèrent tous là les bagues qu’ils avaient eues de leur butin.

26 Et le poids des bagues d’or qu’il avait demandées fut de mille et sept cents sicles d’or, sans les colliers, les boîtes de senteur et les habits d’écarlate qui étaient sur les rois de Madian, et sans les colliers qui étaient aux cous de leurs chameaux.

27 Et Gédéon en fit un éphod, et il le mit dans sa ville, qui était Hophra ; et tout Israël se prostitua après lui, en ce lieu-là ; ce qui tourna en piège à Gédéon et à sa maison.

28 Ainsi Madian fut humilié devant les enfants d’Israël, et il n’éleva plus sa tête, et le pays fut en repos quarante ans, du temps de Gédéon.

29 Jérubbahal donc, fils de Joas, s’en revint et se tint dans sa maison.

30 Or, Gédéon eut soixante et dix fils, qui naquirent de lui, parce qu’il eut plusieurs femmes.

31 Et sa concubine, qui était à Sichem, lui enfanta aussi un fils, et il lui donna le nom d’Abimélec.

32 Et Gédéon, fils de Joas, mourut dans une bonne vieillesse, et il fut enseveli dans le sépulcre de Joas son père, à Hophra, qui était des Abihézérites.

33 Et après que Gédéon fut mort, les enfants d’Israël se détournèrent du vrai Dieu, et se prostituèrent après les Bahalims, et s’établirent Bahalbérith pour dieu.

34 Ainsi les enfants d’Israël ne se souvinrent point de l’Eternel leur Dieu, qui les avait délivrés de la main de tous leurs ennemis, de tous côtés ;

35 et ils ne donnèrent aucune marque de leur affection à la maison de Jérubbahal-Gédéon, après tout le bien qu’il avait fait à Israël.

REFLEXIONS

On doit remarquer ici :

I. La continuation des succès heureux que Dieu accorda à Gédéon et des avantages qu’il remporta sur les Madianites.

II. Le juste châtiment des habitants de Succoth et de Pénuel qui avaient refusé des vivres à son armée et qui l’avaient insulté.

III. La modération qu’il fit paraître dans la punition de Zébah et de Tsalmunah auxquels il n’aurait pas ôté la vie si ces deux princes n’avaient pas été coupables du meurtre de ses frères.

IV. La piété et l’humilité qu’il marqua en refusant d’être roi.

V. La faute qu’il commis en faisant un éphod qu’on croit avoir été un habit ou un ornement que les sacrificateurs portaient ou quelque image. Bien que Gédéon ne fit peut-être pas cet éphod à mauvaise intention, mais seulement pour être un monument de sa victoire et de la reconnaissance des Israélites, cependant comme il le fit contre la loi de Dieu, il pécha en cela et cet éphod fut dans la suite une occasion d’idolâtrie pour le peuple et causa même la ruine de la famille de Gédéon comme l’histoire sainte le remarque.

C’est ici un de ces exemples qui font voir que ceux à qui Dieu a accordé de grandes grâces et qu’il a enrichi de plusieurs vertus font parfois des fautes très considérables qui attirent sur eux et sur leur postérité et même sur le public les jugements de Dieu.

Enfin, nous voyons ici l’ingratitude des Israélites envers Gédéon à la famille duquel ils ne donnèrent aucune marque d’affection après sa mort, quoiqu’ils lui eussent tant d’obligation. Mais on y voit surtout leur ingratitude envers Dieu puisque, lorsque Gédéon fut mort, ils abandonnèrent encore le service de Dieu et adorèrent les idoles. Voici un nouvel exemple de la facilité avec laquelle les hommes se corrompent et oublient les grâces de Dieu lorsqu’ils sont dans la prospérité.

CHAPITRE IX.

Abimélec fils de Gédéon est établi prince par ceux de Sichem. Il est compté pour le sixième juge d’Israël et il gouverna trois ans. Il fit tuer tous ses frères à la réserve de Jotham qui, s’étant sauvé, reprocha aux Sichémites leur ingratitude et leur dénonça leur ruine par une parabole prise des arbres et de l’épine. Le sens de cette parabole est que Gédéon et ses fils avaient refusé de régner pendant qu’Abimélec avait été fait prince, quoiqu’il en fût indigne, étant très méchant et fils d’une concubine. Ensuite la division s’étant mise entre Abimélec et les principaux de Sichem, un homme nommé Gahal fit révolter les Sichémites contre Abimélec, mais il fut défait et la ville de Sichem fut détruite avec ses habitants. Après cela, Abimélec assiégeant la ville de Tebets fut tué par une femme et ce fut ainsi que ce prince et les Sichémites furent punis comme Jotham le leur avait prédit.

1 Et Abimélec, fils de Jérubbahal, s’en alla à Sichem, vers les frères de sa mère, et il leur parla, et à toute la famille de la maison du père de sa mère, disant :

2 Je vous prie, faites entendre ces paroles à tous les seigneurs de Sichem : Lequel vous semble le meilleur, ou que soixante et dix hommes, qui sont tous enfants de Jérubbahal, dominent sur vous, ou qu’un seul homme domine sur vous ? Et même souvenez-vous que je suis votre os et votre chair.

3 Les frères donc de sa mère dirent de lui toutes ces paroles à tous les seigneurs de Sichem, et leur cœur fut tourné vers Abimélec ; car, dirent-ils, c’est notre frère.

4 Et ils lui donnèrent soixante et dix pièces d’argent, de la maison de Bahalbérith, avec lesquelles Abimélec leva des hommes qui n’avaient rien et des vagabonds, qui le suivirent.

5 Et il vint dans la maison de son père à Hophra, et il tua, sur une même pierre, ses frères, enfants de Jérubbahal, savoir, soixante et dix hommes ; il ne resta que Jotham, le plus petit fils de Jérubbahal ; car il s’était caché.

6 Et tous les Seigneurs de Sichem s’assemblèrent, avec toute la maison de Millo, et ils vinrent, et établirent Abimélec pour roi, auprès du chêne qui est à Sichem.

7 Et on le rapporta à Jotham, qui s’en alla et se tint au haut de la montagne de Guérizim, et élevant sa voix, il cria et leur dit : Ecoutez-moi, Seigneurs de Sichem, et Dieu vous écoutera.

8 Les arbres allèrent un jour avec empressement pour oindre un roi sur eux, et ils dirent à l’olivier : Règne sur nous.

9 Mais l’olivier leur répondit : Me ferait-on quitter mon huile, dont Dieu et les hommes sont honorés, afin que j’aille çà et là pour être au-dessus des autres arbres ?

10 Puis les arbres dirent au figuier : Viens, et règne sur nous.

11 Et le figuier leur répondit : Me ferait-on quitter ma douceur, mon bon fruit, afin que j’aille çà et là pour être au-dessus des autres arbres ?

12 Puis les arbres dirent à la vigne : Viens, et règne sur nous.

13 Et la vigne répondit : Me ferait-on quitter mon bon vin, qui réjouit Dieu et les hommes, afin que j'aille çà et là pour être au-dessus des autres arbres ?

14 Alors tous les arbres dirent à l’épine : Viens, toi, et règne sur nous.

15 Et l’épine répondit aux arbres : Si c’est sincèrement que vous m’oignez pour roi sur vous, venez et vous retirez sous mon ombre ; sinon, que le feu sorte de l’épine, et qu’il dévore les cèdres du Liban.

16 Maintenant donc, continua Jotham, considérez si vous avez agi en sincérité et en intégrité, en établissant Abimélec pour roi, et si vous en avez bien usé envers Jérubbahal et envers sa maison, et si vous lui avez rendu ce qu’il a fait pour vous.

17 Car mon père a combattu pour vous, et il a exposé sa vie, et vous a délivrés de la main des Madianites.

18 Mais vous vous êtes élevés aujourd’hui contre la maison de mon père, et vous avez tué, sur une pierre, ses enfants, savoir, soixante et dix hommes, et vous avez établi pour roi Abimélec, fils de sa servante, sur les Seigneurs de Sichem, parce qu’il est votre frère.

19 Si vous avez agi aujourd’hui en sincérité et en intégrité envers Jérubbahal et envers sa maison, réjouissez-vous d’Abimélec, et qu’il se réjouisse aussi de vous ;

20 sinon, que le feu sorte d’Abimélec, et dévore les Seigneurs de Sichem et la maison de Millo ; et que le feu sorte des Seigneurs de Sichem, et de la maison de Millo, et qu’il dévore Abimélec.

21 Puis Jotham s’enfuit en diligence et s’en alla à Béer, et il y demeura, par la crainte qu’il avait d’Abimélec son frère.

22 Et Abimélec domina sur Israël trois ans.

23 Mais Dieu envoya un mauvais esprit entre Abimélec et les Seigneurs de Sichem ; et les Seigneurs de Sichem furent infidèles à Abimélec ;

24 afin que la violence faite aux soixante et dix enfants de Jérubbahal, et leur sang répandu, retournât sur Abimélec leur frère, qui les avait tués, et sur les Seigneurs de Sichem, qui l’avaient aidé à tuer ses frères.

25 Les Seigneurs de Sichem donc lui tendirent des embûches sur le haut des montagnes, et ils pillaient tous ceux qui passaient par le chemin près d’eux ; ce qui fut rapporté à Abimélec.

26 Alors Gahal, fils de Hébed, et ses frères, vinrent et passèrent à Sichem ; et les Seigneurs de Sichem eurent une entière confiance en lui.

27 Et étant sortis à la campagne, ils vendangèrent leurs vignes, et en foulèrent les raisins, et firent bonne chère ; et ils entrèrent dans la maison de leur dieu, et ils mangèrent et burent, et maudirent Abimélec.

28 Alors Gahal, fils de Hébed, dit : Qui est Abimélec, et quelle est Sichem, que nous servions Abimélec ? N’est-il pas fils de Jérubbahal ? et Zébul, n’est-il pas son prévôt ? Servez plutôt les hommes d’Hémor, père de Sichem. Mais pour quelle raison servirions-nous celui-ci ?

29 Plût à Dieu qu’on me donnât ce peuple sous ma conduite ! et je chasserais Abimélec. Et il dit à Abimélec : Augmente ton armée, et sors.

30 Et Zébul, capitaine de la ville, entendit les paroles de Gahal, fils de Hébed, et sa colère s’embrasa.

31 Puis il envoya adroitement des messagers vers Abimélec, lui dire : Voici Gahal, fils de Hébed, et ses frères, qui sont entrés à Sichem, et voici, ils arment la ville contre toi.

32 Maintenant donc, lève-toi de nuit, toi et le peuple qui est avec toi, et dresse des embûches dans la campagne ;

33 et le matin, au lever du soleil, tu te lèveras et tu viendras fondre sur la ville ; et voici, Gahal et le peuple qui est avec lui, sortiront contre toi, et tu lui feras selon la commodité qui se présentera.

34 Abimélec donc se leva de nuit, et tout le peuple qui était avec lui, et ils mirent des embuscades contre Sichem, et les partagèrent en quatre bandes.

35 Alors Gahal, fils de Hébed, sortit, et s’arrêta à l’entrée de la porte de la ville ; et Abimélec et tout le peuple qui était avec lui, se levèrent de l’embuscade.

36 Et Gahal ayant aperçu ce peuple-là, dit à Zébul : Voici du peuple qui descend du haut des montagnes. Et Zébul lui dit : Tu vois l’ombre des montagnes, et il te semble que ce sont des hommes.

37 Et Gahal parla encore et dit : Voici du peuple qui descend du milieu du pays, et une bande vient du chemin de la chênaie des devins.

38 Et Zébul lui dit : Où est maintenant ta vanterie, quand tu disais : Qui est Abimélec, que nous le servions ? N’est-ce pas ici le peuple que tu as méprisé ? Sors maintenant, je te prie, et combats contre eux.

39 Alors Gahal sortit, conduisant les Seigneurs de Sichem, et il combattit contre Abimélec.

40 Et Abimélec le poursuivit, comme il s’enfuyait de devant lui, et plusieurs tombèrent morts jusqu’à l’entrée de la porte.

41 Et Abimélec s’arrêta à Aruma ; et Zébul repoussa Gahal et ses frères, afin qu’ils ne demeurassent plus à Sichem.

42 Et dès le lendemain le peuple sortit aux champs ; ce qui fut rapporté à Abimélec,

43 qui prit de ce peuple, et le divisa en trois bandes, et les mit en embuscade dans les champs ; et ayant aperçu que le peuple sortait de la ville, il se leva contre eux et les défit.

44 Car Abimélec et la troupe qui était avec lui, se répandirent, et se tinrent à l’entrée de la porte de la ville ; mais les deux autres bandes se jetèrent sur tous ceux qui étaient dans la campagne, et ils les défirent.

45 Ainsi Abimélec combattit tout ce jour-là contre la ville, et prit la ville, et tua le peuple qui y était ; et ayant rasé la ville, il y sema du sel.

46 Et tous les Seigneurs de la tour de Sichem, ayant appris cela, se retirèrent dans le fort, qui était la maison du dieu Bérith.

47 Et on rapporta à Abimélec que tous les Seigneurs de la tour de Sichem s’étaient assemblés dans le fort.

48 Alors Abimélec monta sur le mont de Tsalmon, lui et tout le peuple qui était avec lui ; et Abimélec prit des haches en sa main, et il coupa une branche d’arbre, et la porta, l’ayant mise sur son épaule ; et il dit au peuple qui était avec lui : Avez-vous vu ce que j’ai fait ? Dépêchez-vous, faites comme moi.

49 Tout le peuple donc coupa chacun une branche, et ils suivirent Abimélec, et ils les mirent tout autour du fort, et y ayant mis le feu, ils brûlèrent le fort. Et toutes les personnes de la tour de Sichem moururent ; ils étaient environ mille, tant hommes que femmes.

50 De là, Abimélec s’en alla à Tébets, qu’il assiégea et la prit.

51 Or, il y avait au milieu de la ville une forte tour, où s’enfuirent tous les hommes et toutes les femmes, et tous les Seigneurs de la ville ; et ayant fermé les portes après eux, ils montèrent sur la plate-forme de la tour.

52 Alors Abimélec venant jusqu’à la tour, l’attaqua, et s’approcha jusqu’à la porte de la tour, pour y mettre le feu.

53 Mais une femme jeta une pièce de meule sur la tête d’Abimélec, et lui cassa le crâne.

54 Et ayant appelé incontinent le jeune homme qui portait ses armes, il lui dit : Tire ton épée et me tue, de peur qu’on ne dise de moi : Une femme l’a tué. Le jeune homme donc le transperça, et il mourut.

55 Et ceux d’Israël voyant qu’Abimélec était mort, chacun s’en alla chez soi.

56 Ainsi Dieu fit retourner la méchanceté d’Abimélec, qu’il avait commise contre son père, en tuant ses soixante et dix frères, sur Abimélec même ;

57 et Dieu fit retourner toute la méchanceté des hommes de Sichem sur leur tête. Ainsi la malédiction de Jotham, fils de Jérubbahal, vint sur eux.

REFLEXIONS

Ce qui se présente ici à considérer:

I. c’est premièrement l’ambition d’Abimélec qui, au lieu d’imiter la piété et la modestie de Gédéon son père lequel avait refusé de régner, voulut être roi de Sichem et la cruauté qu’il exerça envers ses frères en les faisant mourir. Dieu permit cet étrange événement tant pour la punition de la famille de Gédéon que pour celle des Sichémites qui se soumirent à Abimélec au lieu de demeurer dans l’état où ils étaient pendant la vie de Gédéon.

C’est de la même manière et pour de semblables raisons que Dieu permet qu’il s’élève des tyrans et que les hommes cruels et injustes viennent à bout de leurs entreprises.

II. Jotham reprocha aux Sichémites leur ingratitude et leur perfidie et il leur dénonça leur ruine et celle d’Abimélec, ce qui arriva aussi dans la suite. Il est vrai qu’Abimélec, quoiqu’il régnât injustement et qu’il fût coupable du meurtre de ses frères eut d’abord des succès heureux et qu’il vainquit Gahal et les Sichémites qui s’étaient soulevés contre lui, Dieu l’ayant ainsi permis pour les punir, mais à la fin il fut tué par une femme lorsqu’il assiégeait la ville de Tebets. Ainsi les Sichémites, qui avaient contribué à la mort des fils de Gédéon et à l’élévation d’Abimélec, furent détruits par ce prince même qu’ils avaient choisi et Abimélec, après avoir été un instrument dans la main de Dieu pour punir ces peuples, porta la peine qu’il avait méritée et que Jotham lui avait dénoncée et Dieu fit retomber par ce moyen sur lui, comme le remarque l’histoire sainte, la méchanceté qu’il avait commise contre son père et contre ses frères.

Voilà comment la malédiction de Dieu tombe tôt ou tard sur les hommes injustes et cruels et comment il les amène enfin à leur jour après leur avoir accordé des succès heureux et s’être servi d’eux pour châtier les autres.

CHAPITRE X

Il est parlé dans ce chapitre de Tolab qui fut le septième juge d’Israël et de Jaïr qui fut le huitième. Les enfants d’Israël étant retombés dans l’idolâtrie, Dieu les livra aux Philistins et aux Hammonites et il refusa même d’abord de les délivrer, mais enfin voyant leur humiliation, il eut pitié d’eux.

1 Après Abimélec, Tolah, fils de Puah, fils de Dodo, homme d’Issacar, se leva pour délivrer Israël, et il habitait à Sçamir, en la montagne d’Ephraïm.

2 Et il jugea Israël vingt-trois ans ; puis il mourut, et il fut enseveli à Sçamir.

3 Après lui se leva Jaïr, Galaadite, qui jugea Israël vingt-deux ans.

4 Et il eut trente fils, qui montaient sur trente ânons, et qui avaient trente villes, qu’on appelle les villes de Jaïr jusqu’à ce jour, qui sont au pays de Galaad.

5 Et Jaïr mourut, et il fut enseveli à Kamon.

6 Puis les enfants d’Israël recommencèrent à faire ce qui est mauvais devant l’Éternel, et ils servirent les Bahalims, et Hasçtaroth, savoir, les dieux de Syrie, les dieux de Sidon, les dieux de Moab, les dieux des Hammonites et les dieux des Philistins, et ils abandonnèrent l’Éternel, et ils ne le servaient plus.

7 Alors la colère de l’Éternel s’embrasa contre Israël, et il les livra entre les mains des Philistins et entre les mains des Hammonites,

8 qui opprimèrent et foulèrent les enfants d’Israël, en cette année-là jusqu’à la dix-huitième, tous les enfants d’Israël, qui étaient au delà du Jourdain, au pays des Amorrhéens, qui est en Galaad.

9 Et les Hammonites passèrent le Jourdain, pour combattre aussi contre Juda, et contre Benjamin, et contre la maison d’Ephraïm ; et Israël fut dans de très grandes angoisses.

10 Alors les enfants d’Israël crièrent à l’Éternel, disant : Nous avons péché contre toi, et nous avons en effet abandonné notre Dieu, et nous avons servi les Bahalims.

11 Mais l’Éternel répondit aux enfants d’Israël : N’avez-vous pas été opprimés par les Égyptiens, par les Amorrhéens, par les Hammonites, par les Philistins,

12 par les Sidoniens, par les Amalékites, et par les Mahonites ? Cependant, quand vous avez crié vers moi, je vous ai délivrés de leurs mains.

13 Mais vous m’avez abandonné, et vous avez servi d’autres dieux ; c’est pourquoi je ne vous délivrerai plus.

14 Allez et criez aux dieux que vous avez choisis ; qu’ils vous délivrent au temps de votre angoisse.

15 Mais les enfants d’Israël répondirent à l’Éternel : Nous avons péché ; fais-nous toi-même comme il te semblera bon ; nous te prions seulement que tu nous délivres aujourd’hui.

16 Alors ils ôtèrent du milieu d’eux les dieux des étrangers, et ils servirent l’Éternel, qui fut touché en son cœur de l’affliction d’Israël.

17 Or, les Hammonites s’assemblèrent, et campèrent à Galaad ; et les enfants d’Israël aussi s’assemblèrent et campèrent à Mitspa.

18 Et le peuple, savoir, les principaux de Galaad, se dirent l’un à l’autre : Qui sera l’homme qui commencera à combattre contre les Hammonites ? Il sera le chef de tous les habitants de Galaad.

REFLEXIONS

Ce qu’il y a de principal à considérer ici, c’est que les Israélites oubliant les bienfaits du Seigneur et abusant du repos qu’il leur avait accordé retournèrent à leur idolâtrie après la mort de Tolah et de Jaïr, jusque-là qu’ils adorèrent tous les dieux des nations voisines, qu’ils abandonnèrent Dieu et qu’ils cessèrent de le servir. Toutes ces rechutes des Israélites montrent combien ils avaient de penchant au culte des idoles et combien il était nécessaire que Dieu les affligeât pour les en retirer. On peut voir par-là que les hommes s’oublient d’ordinaire dans la paix et dans la prospérité et qu’ils en abusent.

Il faut remarquer après cela que Dieu, voyant que les Israélites l’avaient abandonné, permit que leurs ennemis les opprimassent, que même, lorsqu’ils crièrent à lui, il refusa de les écouter et les renvoya aux faux dieux qu’ils avaient adorés, mais qu’enfin touché de leurs maux et voyant qu’ils avaient ôtés les idoles du milieu d’eux, il en eut encore pitié cette fois-là et leur suscita un libérateur. Ce qu’il y a à considérer sur cette conduite du Seigneur envers les Israélites, c’est que Dieu déploie ses châtiments sur ceux qui l’offensent, que les premiers mouvements de repentance que les pécheurs ressentent dans l’affliction ne sont pas toujours sincères, qu’à cause de cela Dieu ne les exauce et ne les délivre pas incontinent et qu’il ne leur pardonne que lorsqu’il les voit véritablement humiliés et qu’ils montrent la sincérité de leur repentance en y persévérant et en renonçant à leur péchés.

CHAPITRE XI

C’est ici que commence l’histoire de Jephthé qui fut le neuvième juge d’Israël. Dans cette histoire, il y a principalement trois choses à remarquer, savoir : I. L’établissement de Jephthé dans la charge de chef du peuple d’Israël. II. La guerre qu’il fit aux Hammonites et son vœu. 

1 Jephthé, Galaadite, était un fort et vaillant homme, mais fils d’une femme débauchée, et Galaad était son père.

2 Et la femme de Galaad lui avait enfanté des fils ; et quand les fils de cette femme-là furent grands, ils chassèrent Jephthé, en lui disant : Tu n’auras point de part à l’héritage dans la maison de notre père ; car tu es fils d’une femme étrangère.

3 Jephthé donc s’enfuit de devant ses frères, et habita au pays de Tob ; et des gens qui n’avaient rien se ramassèrent vers Jephthé, et ils allaient et venaient avec lui.

4 Or, quelques jours après les Hammonites firent la guerre à Israël.

5 Et comme les Hammonites faisaient la guerre à Israël, les anciens de Galaad s’en allèrent pour faire revenir Jephthé de la contrée de Tob.

6 Et ils dirent à Jephthé : Viens, et sois notre capitaine, afin que nous combattions contre les Hammonites.

7 Et Jephthé répondit aux anciens de Galaad : N’est-ce pas vous qui m’avez haï, et chassé de la maison de mon père ? Et pourquoi êtes-vous venus à moi, maintenant que vous êtes en peine ?

8 Alors les anciens de Galaad dirent à Jephthé : La raison pourquoi nous sommes maintenant revenus à toi, c’est afin que tu viennes avec nous, et que tu combattes contre les Hammonites, et que tu sois notre chef, savoir de nous tous qui habitons à Galaad.

9 Et Jephthé répondit aux anciens de Galaad : Si vous me ramenez pour combattre contre les Hammonites, et que l’Éternel les livre entre mes mains, je serai votre chef.

10 Et les anciens de Galaad dirent à Jephthé : Que l’Éternel écoute et soit juge entre nous, si nous ne faisons tout ce que tu as dit.

11 Jephthé donc s’en alla avec les anciens de Galaad, et le peuple l’établit pour son chef et pour son capitaine, et Jephthé prononça devant l’Éternel, à Mitspa, toutes les paroles qu’il avait à dire.

12 Puis Jephthé envoya des députés au roi des Hammonites, pour lui dire : Qu’y a-t-il entre toi et moi, que tu sois venu contre moi pour faire la guerre dans mon pays ?

13 Et le roi des Hammonites répondit aux députés de Jephthé : C’est parce qu’Israël a pris mon pays quand il montait d’Égypte, depuis Arnon jusqu’à Jabbok, et jusqu’au Jourdain ; maintenant donc, rends-moi ces contrées-là à l’amiable.

14 Mais Jephthé envoya de nouveau des députés au roi des Hammonites,

15 qui lui dirent : Ainsi a dit Jephthé : Israël n’a rien pris du pays de Moab, ni du pays des enfants de Hammon.

16 Mais après qu’Israël, étant monté d’Égypte, fut venu par le désert, jusqu’à la mer Rouge, et fut arrivé à Kadès,

17 et qu’il eut envoyé des députés au roi d’Edom, pour lui dire : Que je passe, je te prie, par ton pays, et que le roi d’Edom n’y voulut point entendre, et qu’il eut envoyé de même au roi de Moab, qui n’en voulut rien faire non plus, et qu’Israël, ayant demeuré à Kadès,

18 et ayant marché par le désert, eut fait le tour du pays d’Edom et du pays de Moab, et fut arrivé au pays de Moab, du côté d’orient, il campa au-delà d’Arnon, et n’entra point dans les frontières de Moab ; parce qu’Arnon était la frontière de Moab.

19 Mais Israël envoya des députés à Sihon, roi des Amorrhéens, qui etait roi de Hesçbon, et Israël lui fit dire : Nous te prions que nous passions par ton pays, jusqu’à ce que nous arrivions à notre lieu.

20 Mais Sihon ne se fiant point à Israël pour le laisser passer par son pays, assembla tout son peuple, et ils campèrent vers Jahats, et ils combattirent contre Israël.

21 Et l’Éternel, le Dieu d’Israël, livra Sihon et tout son peuple entre les mains d’Israël, et Israël les défit, et conquit tout le pays des Amorrhéens, qui habitaient en ce pays-là.

22 Ils conquirent donc tout le pays des Amorrhéens, depuis Arnon jusqu’à Jabbok, et depuis le désert jusqu’au Jourdain.

23 C’est pourquoi, l’Éternel, le Dieu d’Israël, a maintenant dépossédé les Amorrhéens de devant son peuple d’Israël : aurais-tu donc la possession de leur pays ?

24 N’aurais-tu pas la possession de ce que Kémos, ton Dieu, t’aurait donné à posséder ? Ainsi nous posséderons le pays de tous ceux que l’Éternel notre Dieu aura chassés de devant nous.

25 Au reste, vaux-tu mieux que Balak, fils de Tsippor, roi de Moab ? Et n’a-t-il pas contesté et combattu tant qu’il a pu contre Israël ?

26 Pendant qu’Israël a habité à Hesçbon et dans les villes de son ressort, et à Haroher, et dans les villes de son ressort, et dans toutes les villes qui sont le long d’Arnon, l’espace de trois cents ans, pourquoi ne les avez-vous pas recouvrées pendant ce temps-là ?

27 Je ne t’ai point offensé, mais tu agis mal contre moi, de me faire la guerre. Que l’Éternel qui est le juge, juge aujourd’hui entre les enfants d’Israël et les enfants de Hammon.

28 Mais le roi des Hammonites ne voulut point écouter les paroles que Jephthé lui avait fait dire.

29 L’esprit de l’Éternel fut donc sur Jephthé, qui passa au travers de Galaad et de Manassé ; il passa jusqu’à Mitspa de Galaad, et de Mitspa de Galaad, il passa jusqu’aux Hammonites.

30 Et Jephté fit un vœu à l’Éternel et dit : Si tu livres les Hammonites en ma main,

31 alors tout ce qui sortira des portes de ma maison au-devant de moi, quand je retournerai en paix d’après les Hammonites, sera à l’Éternel, et je l’offrirai en holocauste.

32 Jephthé donc passa jusqu’où étaient les Hammonites, pour combattre contre eux, et l’Éternel les livra en sa main ;

33 et il en fit un très grand carnage, depuis Haroher jusqu’à Minith, dans lequel espace il y avait vingt villes, et jusqu’à la plaine des vignes ; et les Hammonites furent abaissés devant les enfants d’Israël.

34 Et comme Jephthé venait à Mitspa, en sa maison, voici, sa fille, qui était seule et unique, sans qu’il eût d’autre fils ni fille, sortit au-devant de lui avec des tambours et des flûtes.

35 Et sitôt qu’il l’eut aperçue, il déchira ses vêtements, et dit : Ha ! ma fille, tu es du nombre de ceux qui me troublent ; car j’ai ouvert ma bouche à l’Éternel, et je ne m’en pourrai rétracter.

36 Et elle répondit : Mon père, as-tu ouvert la bouche à l’Éternel ? Fais-moi selon ce qui est sorti de ta bouche, puisque l’Éternel t’a vengé de tes ennemis, les Hammonites.

37 Toutefois, elle dit à son père : Accorde-moi ceci ; laisse-moi pour deux mois, afin que je m’en aille, et que je descende par les montagnes, et que je pleure ma virginité, moi et mes compagnes.

38 Et il dit : Va. Et il la laissa aller pour deux mois. Elle s’en alla donc avec ses compagnes, et pleura sa virginité sur les montagnes.

39 Et au bout de deux mois elle retourna vers son père, et il lui fit selon le vœu qu’il avait fait, et elle ne connut point d’homme. De là vint la coutume en Israël,

40 qu’annuellement les filles d’Israël allaient pour pleurer la fille de Jephthé Galaadite, pendant quatre jours chaque année.

REFLEXIONS

Nous devons remarquer ici :

I. Que Jephthé, quoiqu’il eût été chassé et maltraité par ceux de Galaad voulut bien embrasser leur défense lorsqu’il en fut requis,

II. Qu’avant que de marcher contre le roi des Hammonites qui faisait la guerre aux enfants d’Israël, il leur envoya des ambassadeurs par deux fois pour tâcher de le détourner de son dessein et pour lui représenter la justice de la cause des Israélites. Cette conduite sage et modérée nous enseigne qu’avant que d’en venir aux voies de rigueur et que de rompre la paix, il faut tenter les voies de douceur et c’est un exemple dont les princes chrétiens surtout devraient profiter.

III. La victoire que Jephté remporta sur le roi des Hammonites fait voir que Dieu, après avoir supporté les rois qui entreprennent des guerres injustes, les punit à la fin.

IV. On remarque dans le vœu de Jephthé du zèle et en même temps de l’imprudence. La vive douleur qu’il ressentit à la vue de sa fille et ce qu’il fit ensuite de ce vœu nous apprend à éviter les vœux téméraires et à accomplir cependant les vœux que nous avons faits autant que nous pouvons le faire légitimement. Il ne faut pourtant pas croire que Jephté sacrifiât sa fille et la brulât, ce qui aurait été une action barbare et abominable devant Dieu, mais il la consacra à Dieu en sorte qu’elle ne se maria pas comme cela est dit dans ce chapitre. Et l’affliction que Jephthé fit paraître procédait de ce que, n’ayant que cette fille, il n’en verrait point de postérité.

Enfin, la généreuse résolution de la fille de Jephté, qui ne voulait pas que son père en manquant à accomplir son vœu attirât sur lui et sur le peuple la vengeance céleste, nous enseigne que nous devons sacrifier nos intérêts particuliers et tout ce que nous avons de plus cher à la gloire de Dieu et au bien public.

CHAPITRE XII

Jephté étant attaqué par ceux d’Éphraïm, leur fait la guerre et en tue un grand nombre. Il meurt après avoir gouverné six ans. Après sa mort, Ibtsan fut le dixième juge, Elon le onzième et Habdon le douzième.

 1 Les hommes d’Ephraïm s’étant assemblés, passèrent vers le septentrion, et dirent à Jephthé : Pourquoi es-tu passé pour combattre contre les Hammonites ? Et pourquoi ne nous as-tu point appelés pour aller avec toi ? Nous brûlerons ta maison, et nous te brûlerons aussi.

2 Et Jephthé leur dit : J’ai eu de grands différends avec les Hammonites, moi et mon peuple, et quand je vous ai appelés, vous ne m’avez point délivré de leurs mains.

3 Et voyant que vous ne me délivriez pas, j’ai exposé ma vie, et je suis passé jusqu’où étaient les Hammonites, et l’Éternel les a livrés en ma main. Pourquoi donc êtes-vous montés aujourd’hui contre moi pour me faire la guerre ?

4 Puis Jephthé, ayant assemblé tous les gens de Galaad, combattit contre Ephraïm, et ceux de Galaad battirent Ephraïm, parce qu’ils avaient dit : Vous êtes des fugitifs d’Ephraïm ; Galaad est au milieu d’Ephraïm, au milieu de Manassé.

5 Et les Galaadites s’emparèrent des passages du Jourdain, avant que ceux d’Ephraïm y arrivassent. Et quand quelqu’un de ceux d’Ephraïm, qui étaient échappés, disait : Laissez-moi passer ; les gens de Galaad lui disaient : Es-tu Ephratien ? et il répondait : Non.

6 Alors ils lui disaient : Dis un peu Schibboleth ; et il disait Sibboleth ; car il ne pouvait pas prononcer comme il faut ; alors, le saisissant, ils le mettaient à mort au passage du Jourdain. Et en ce temps-là il y eut quarante-deux mille hommes d’Ephraïm qui furent tués.

7 Et Jephthé jugea Israël six ans, puis Jephthé, Galaadite, mourut, et fut enseveli dans une des villes de Galaad.

8 Après lui, Ibtsan de Bethléhem jugea Israël.

9 Il eut trente fils, et il maria hors de sa maison trente filles ; il prit aussi de dehors trente filles pour ses fils, et il jugea Israël sept ans.

10 Puis Ibtsan mourut et fut enseveli à Bethléhem.

11 Après lui, Elon, Zabulonite, jugea Israël, et le jugea dix ans.

12 Puis Elon, Zabulonite, mourut, et fut enseveli à Ajalon, dans la terre de Zabulon.

13 Après lui Habdon, fils d’Hillel, Pirhathonite, jugea Israël.

14 Il eut quarante fils, et trente petits-fils, qui montaient sur soixante et dix ânons ; et il jugea Israël huit ans.

15 Puis Habdon, fils d’Hillel, Pirhathonite, mourut, et fut enseveli à Pirhathon, dans la terre d’Ephraïm, sur la montagne de l’Hamalékite.

REFLEXIONS

La défaite de ceux d’Éphraïm par Jephthé fut une juste punition de leur orgueil et de ce qu’ils avaient déclaré injustement la guerre à Jephthé auquel le peuple d’Israêl avait de si grandes obligations. C’est là un exemple du juste jugement de Dieu sur ceux qui troublent la paix et qui attaquent les autres sans une cause légitime.

Ce qui est dit sur la fin de ce chapitre que Dieu suscita d’autres juges après que Jephthé fut mort nous met devant les yeux le support du Seigneur envers les Israélites, puisque, nonobstant leurs fréquentes rebellions, il leur envoyait de temps en temps des juges et des chefs pour les gouverner et pour les délivrer de ceux qui les opprimaient.

CHAPITRE XIII

Les Israélites étant opprimés par les Philistins, Dieu envoie un ange à la femme de Manoab et ensuite à Manoab lui-même pour leur promettre la naissance d’un fils qui délivrerait Israël. Cet ange confirma cette promesse en consumant par le feu du Ciel un sacrifice que Manoab offrait à Dieu. Quelque temps après Samson nâquit et il fut dans la suite le treizième juge du peuple d’Israël.

1 Les enfants d’Israël recommencèrent à faire ce qui est mauvais devant l’Eternel ; et l’Eternel les livra entre les mains des Philistins, pendant quarante ans.

2 Or, il y avait un homme de Tsorah, d’une famille de ceux de Dan, dont le nom était Manoah, et sa femme était stérile, et n’avait jamais eu d’enfant.

3 Et un ange de l’Eternel apparût à cette femme-là, et lui dit : Voici, tu es stérile, et tu n’as jamais eu d’enfant ; mais tu concevras et tu enfanteras un fils.

4 Prends donc bien garde dès maintenant, de ne point boire de vin ni de cervoise, et de ne manger aucune chose souillée ;

5 car, voici, tu vas être enceinte, et tu enfanteras un fils, et le rasoir ne passera point sur sa tête, parce que l’enfant sera Nazarien de Dieu, dès le ventre de sa mère, et ce sera lui qui commencera à délivrer Israël de la main des Philistins.

6 Or, la femme vint, et parla à son mari, disant : Un homme de Dieu est venu à moi, dont la face est semblable à la face d’un ange de Dieu fort vénérable ; je ne lui ai point demandé d’où il était, et il ne m’a point dit son nom,

7 mais il m’a dit : Voici, tu vas être enceinte, et tu enfanteras un fils ; maintenant donc, ne bois point de vin ni de cervoise, et ne mange aucune chose qui soit souillée ; car cet enfant sera Nazarien de Dieu dès le ventre de sa mère, jusqu’au jour de sa mort.

8 Et Manoah pria instamment l’Eternel, et dit : Hélas ! Seigneur, que l’homme de Dieu que tu as envoyé, vienne encore, je te prie, vers nous, et qu’il nous enseigne ce que nous devons faire à l’enfant quand il sera né.

9 Et Dieu exauça la prière de Manoah. Ainsi l’ange de Dieu vint encore à la femme, comme elle était assise dans un champ ; mais Manoah, son mari n’était point avec elle.

10 Et la femme courut vite le rapporter à son mari, lui disant : Voici, l’homme qui était venu l’autre jour vers moi, m’est apparu.

11 Et Manoah se leva, et suivit sa femme ; et venant vers l’homme, il lui dit : Es-tu cet homme qui a parlé à cette femme ? Et il répondit : C’est moi.

12 Et Manoah dit : Que tout ce que tu as dit, arrive ! Mais quelle conduite faudra-t-il tenir, envers l’enfant, et que lui faudra-t-il faire ?

13 Et l’ange de l’Éternel répondit à Manoah : La femme se gardera de toutes les choses dont je l’ai avertie.

14 Elle ne mangera rien du produit de la vigne, elle ne boira ni vin ni cervoise, et elle ne mangera aucune chose qui soit souillée ; elle prendra garde à tout ce que je lui ai commandé.

15 Alors Manoah dit à l’ange de l’Éternel : Je te prie, que nous te retenions, et nous t’apprêterons un chevreau de lait.

16 Et l’ange de l’Éternel répondit à Manoah : Quand tu me retiendrais, je ne mangerais point de ton pain ; mais si tu fais un holocauste, tu l’offriras à l’Éternel ; car Manoah ne savait point que ce fût un ange de l’Éternel.

17 Manoah dit encore à l’ange de l’Éternel : Quel est ton nom, afin que nous l’honorions, quand ce que tu as dit sera arrivé ?

18 Et l’ange de l’Éternel lui dit : Pourquoi t’informes-tu ainsi de mon nom ? Il est admirable.

19 Alors Manoah prit un chevreau de lait, et un gâteau, et il les offrit à l’Éternel, sur le rocher. Et l’ange fit une chose merveilleuse, à la vue de Manoah et de sa femme ;

20 c’est que, la flamme montant de dessus l’autel vers les cieux, l’ange de l’Éternel monta aussi avec la flamme de l’autel. Ce que Manoah et sa femme ayant vu, ils tombèrent le visage contre terre.

21 Et l’ange de l’Éternel n’apparut plus à Manoah ni à sa femme. Alors Manoah connut que c’était l’ange de l’Éternel.

22 Et Manoah dit à sa femme : Certainement, nous mourrons, parce que nous avons vu Dieu.

23 Mais sa femme lui répondit : Si l’Éternel nous eût voulu faire mourir, il n’eût pas pris de notre main l’holocauste, ni le gâteau, et il ne nous eût point fait voir toutes ces choses-là, et, au temps où nous sommes, il ne nous eût pas fait entendre les choses que nous avons entendues.

24 Puis cette femme-là enfanta un fils et l’appela Samson ; et l’enfant devint grand, et l’Éternel le bénit.

25 Et l’esprit de l’Éternel commença de l’animer à Mahané-dan, entre Tsorah et Esçtaol.

REFLEXIONS

Voici les réflexions que nous devons faire sur cette lecture :

I. Que Dieu par un effet de sa bonté envers les Israélites fit naître Samson dans un temps où ils étaient asservis aux Philistins déjà depuis quarante ans.

II. Que la naissance de Samson fut miraculeuse, qu’un ange l’annonça à sa mère qui était stérile et que la promesse de l’ange fut confirmée par un miracle signalé, le feu du Ciel ayant consumé l’oblation de Manoah le père de Samson. Tout cela marquait que Samson serait un homme suscité de Dieu extraordinairement.

Il paraît en troisième lieu par cette histoire que Manoah et sa femme étaient des personnes pieuses et que la naissance du fils que Dieu leur donna fut une récompense de leur piété.

Enfin, il faut remarquer que l’ange de l’Éternel avertit Manoah et sa femme que l’enfant qui naîtrait serait consacré à Dieu par le vœu du nazaréat, ce qui marquait que Dieu destinait Samson à de grandes choses et que ce qu’il ferait d’extraordinaire pendant sa vie viendrait de Dieu.

CHAPITRE XIV

L’historien sacré rapporte ici le mariage de Samson et l’énigme qu’il proposa au sujet du miel qu’il avait trouvé dans le corps d’un lion qu’il avait tué. Cette histoire est rapportée parce que ce fut ici le commencement et l’occasion de la guerre que Samson fit aux Philistins.

1 Or, Samson étant descendu à Timna, il y vit une femme d’entre les filles des Philistins.

2 Et étant remonté en sa maison, il le déclara à son père et à sa mère, et leur dit : J’ai vu une femme à Timna, d’entre les filles des Philistins ; maintenant donc, prenez-la, afin qu’elle soit ma femme.

3 Et son père et sa mère lui dirent : N’y a-t-il point de femme parmi les filles de tes frères, et parmi tout ton peuple, que tu ailles prendre une femme d’entre les Philistins incirconcis ? Et Samson dit : Prenez-la-moi ; car elle plaît à mes yeux.

4 Or, son père et sa mère ne savaient point que cela venait de l’Éternel ; car Samson cherchait que les Philistins lui donnassent quelque occasion. Et en ce temps-là, les Philistins dominaient sur Israël.

5 Samson donc descendit avec son père et sa mère à Timna, et ils vinrent jusqu’aux vignes de Timna, et voici, un jeune lion rugissant venait contre lui.

6 Et l’esprit de l’Éternel ayant saisi Samson, Samson déchira le lion comme s’il eût déchiré un chevreau, sans avoir rien en sa main ; et il ne déclara point à son père ni à sa mère ce qu’il avait fait.

7 Il descendit donc, et il parla à la femme, et la femme lui plut.

8 Puis retournant quelques jours après pour la prendre, il se détourna pour voir le corps du lion ; et voici, il y avait dans le corps du lion un essaim d’abeilles et du miel.

9 Et il en prit en sa main, et continua son chemin en mangeant ; et étant arrivé vers son père et vers sa mère, il leur en donna, et Ils en mangèrent ; mais il ne leur déclara pas qu’il avait pris ce miel dans le corps du lion.

10 Son père donc descendit vers cette femme-là, et Samson fit là un festin ; car c’est ainsi que les jeunes gens avaient accoutumé de faire.

11 Et sitôt qu’on l’eut vu, on prit trente convives, pour lui faire compagnie.

12 Et Samson leur dit : Je vous proposerai maintenant une énigme ; et si vous me l’expliquez pendant les sept jours du festin, et la devinez, je vous donnerai trente chemises et trente robes de rechange ;

13 mais si vous ne me l’expliquez pas, vous me donnerez trente chemises et trente robes de rechange. Et ils lui répondirent : Propose ton énigme, et nous l’entendrons.

14 Et il leur dit : De celui qui dévorait est procédée la viande, et la douceur est sortie de celui qui est fort. Et ils ne purent expliquer l’énigme, pendant trois jours.

15 Et au septième jour ils dirent à la femme de Samson : Persuade à ton mari de nous expliquer l’énigme, autrement nous te brûlerons, toi et la maison de ton père. Nous avez-vous appelés ici pour avoir notre bien, ou non ?

16 La femme de Samson donc pleura auprès de lui, en disant : Certainement tu me hais, et tu ne m’aimes point ; n’as-tu pas proposé une énigme aux enfants de mon peuple, et tu ne me l’as point expliquée ? Et il lui répondit : Voici, je ne l’ai point expliquée à mon père, ni à ma mère, et te l’expliquerais-je ?

17 Elle pleura ainsi auprès de lui durant les sept jours du festin ; et au septième jour il la lui expliqua, parce qu’elle le tourmentait, puis elle l’expliqua aux enfants de son peuple.

18 Les gens de la ville lui dirent donc au septième jour, avant que le soleil se couchât : Qu’y a-t-il de plus doux que le miel, et qu’y a-t-il de plus fort que le lion ? Et il leur dit : Si vous n’eussiez point labouré avec ma génisse, vous n’eussiez point trouvé mon énigme.

19 Et l’esprit de l’Éternel le saisit, et il descendit à Asçkélon ; et ayant tué trente hommes de ceux d’Asçkélon, il prit leurs dépouilles, et donna les robes de rechange à ceux qui avaient expliqué l’énigme ; et étant dans une furieuse colère, il monta en la maison de son père.

20 Et la femme de Samson fut mariée à son compagnon, qui était son intime ami.

REFLEXIONS

Il faut remarquer sur la vie de Samson en général que, quoi que Dieu se servit de lui pour la délivrance du peuple d’Israël, Samson fit cependant plusieurs choses qui ne doivent point être imitées et qui même sont condamnables.

Son mariage avec une Philistine était contre la loi de Dieu, cependant Dieu permit qu’il le fit parce que cela donna lieu à Samson de faire la guerre aux Philistins. C’est ainsi que Dieu permet plusieurs choses pour les vues qu’il se propose, quoiqu’il n’approuve pas ces choses-là.

Enfin, il parait clairement de ce récit que la grande force de Samson et tout ce qu’il fit contre les Philistins procédait de l’assistance du Seigneur.

CHAPITRE XV

Samson irrité de ce qu’on avait donné sa femme à un autre brûle les blés des Philistins et les défaits. Ensuite, ayant été livré aux Philistins, il rompt les cordes dont il était lié, il en tue mille avec une mâchoire d’âne et étant pressé par la soif, Dieu fait un miracle pour le désaltérer.

1 Quelques jours après, au temps de la moisson des blés, Samson alla visiter sa femme, lui portant un chevreau de lait, et il dit : J’entrerai vers ma femme, en sa chambre ; mais son père ne lui permit point d’y entrer ;

2 car il lui dit : J’ai cru que tu avais de l’aversion pour elle, c’est pourquoi je l’ai donnée à ton compagnon. Sa sœur puînée n’est-elle pas plus belle qu’elle ? Je te prie donc, qu’elle soit ta femme au lieu d’elle.

3 Et Samson leur dit : À présent je serai innocent à l’égard des Philistins, quand je leur ferai du mal.

4 Samson donc s’en alla, et prit trois cents renards ; il prit aussi des flambeaux, et il tourna les queues des renards les unes contre les autres, et il mit un flambeau entre les deux queues, au milieu.

5 Puis, ayant allumé les flambeaux, il lâcha les renards aux blés des Philistins. Il brûla donc tant le blé qui était en gerbes que celui qui était sur pied, même jusqu’aux vignes et jusqu’aux oliviers.

6 Et les Philistins dirent : Qui a fait ceci ? Et on répondit : Samson, le beau-fils du Timnien, parce qu’il lui a pris sa femme, et qu’il l’a donnée à son compagnon. Les Philistins donc montèrent et la brûlèrent, elle et son père.

7 Alors Samson leur dit : En usez-vous ainsi ? Cependant, je ne cesserai point que je ne me sois vengé de vous.

8 Et il les battit dos et ventre, et il y eut une grande défaite ; puis il descendit et il s’arrêta dans un quartier du rocher de Hétam.

9 Alors les Philistins montèrent et campèrent en Juda, et se répandirent à Lehi.

10 Et les hommes de Juda dirent : Pourquoi êtes-vous montés contre nous ? Ils répondirent : Nous sommes montés pour lier Samson, afin que nous lui fassions comme il nous a fait.

11 Alors trois mille hommes de Juda descendirent vers le quartier du rocher de Hétam, et dirent à Samson : Ne sais-tu pas que les Philistins dominent sur nous ? Pourquoi donc nous as-tu fait ceci ? Il leur répondit : Je leur ai fait comme ils m’ont fait.

12 Ils lui dirent encore : Nous sommes descendus pour te lier, afin que nous te livrions entre les mains des Philistins. Et Samson leur dit : Jurez-moi que vous ne vous jetterez point sur moi.

13 Et ils répondirent, et dirent : Non, mais nous te lierons très bien, afin que nous te livrions entre leurs mains ; toutefois nous ne te tuerons point. Ils le lièrent donc de deux cordes neuves, et le firent monter hors du rocher.

14 Or, quand il fut venu jusqu’à Lehi, les Philistins jetèrent des cris de joie à sa rencontre ; et l’Esprit de l’Éternel le saisit, et les cordes qui étaient sur ses bras devinrent comme du lin où l’on a mis le feu ; ses liens se défirent et tombèrent de ses mains.

15 Et ayant trouvé une mâchoire d’âne, qui n’était pas encore desséchée, il avança sa main, et l’ayant prise, il en tua mille hommes.

16 Puis Samson dit : Avec une mâchoire d’âne, un monceau, deux monceaux, avec une mâchoire d’âne j’ai tué mille hommes.

17 Et quand il eut achevé de parler, il jeta de sa main la mâchoire, et nomma ce lieu-là Ramathlehi.

18 Et il fut fort pressé de la soif, et criant à l’Éternel, il dit : Tu as accordé à ton serviteur cette grande délivrance ; et maintenant mourrais-je de soif, et tomberais-je entre les mains des incirconcis ?

19 Alors Dieu fendit une des grosses dents de cette mâchoire d’âne, et il en sortit de l’eau ; et quand Samson eut bu, la force lui revint et il reprit courage. C’est pourquoi ce lieu-là a été appelé jusqu’à ce jour : Hen-hakkore, qui est à Lehi.

20 Et il jugea Israël au temps des Philistins, pendant vingt ans.

REFLEXIONS

Il faut considérer sur ce récit que Dieu permit que l’on ôtât à Samson sa femme et que les Philistins brûlassent la maison de son beau-père afin que cela donnât occasion à Samson de leur nuire et même d’en faire mourir un grand nombre. Ainsi, ce que Samson fit par un esprit de vengeance, fut un moyen dans la main de Dieu pour abattre l’orgueil et la tyrannie des Philistins qui opprimaient les Israélites. Les divers événements qui sont rapportés dans cette histoire montrent que pendant que Samson garda le vœu du naziréat, rien ne pouvait lui nuire, Dieu lui ayant donné une force extraordinaire et surnaturelle, en sorte qu’il rompit les cordes dont on l’avait lié et qu’il tua mille Philistins, même à sa prière Dieu lui donna de l’eau par un miracle.

Mais nous verrons dans la suite qu’il fut privé de sa force et de tous ses avantages pour n’avoir pas gardé religieusement son vœu. Cependant, ces événements miraculeux étaient dispensés par la providence parce qu’ils étaient très propres à faire une grande impression tant sur les Israélites que sur les Philistins afin que les uns et les autres reconnussent en Samson la puissance du vrai Dieu et qu’ils le regardassent comme un homme qui avait été suscité extraordinairement pour la délivrance du peuple d’Israël.

CHAPITRE XVI

Samson enlève les portes de la ville de Gaza. Ensuite une femme nommée Délila l’ayant engagé à lui déclarer que sa force consistait dans ses cheveux, elle le livra aux Philistins qui lui crevèrent les yeux. Quelque temps après, il renversa le temple de dagon et fit périr un grand nombre de Philistins. Il mourut aussi dans cette occasion-là.

1 Or, Samson s’en alla à Gaza, et ayant vu là une femme débauchée, il alla vers elle.

2 Et on dit à ceux de Gaza : Samson est venu ici ; et ils l’environnèrent, et lui dressèrent une embuscade toute la nuit à la porte de la ville, et se tinrent cois les toute la nuit, disant : Qu’on ne bouge point jusqu’à la pointe du jour, et nous le tuerons.

3 Mais Samson, après avoir dormi jusqu’à minuit, se leva, et se saisit des portes de la ville et des deux poteaux, et les ayant enlevés avec la barre, il les mit sur ses épaules, et les porta sur le haut de la montagne qui est vis-à-vis de Hébron.

4 Après cela, il aima une femme qui se tenait près du torrent de Sçorek, dont le nom était Délila.

5 Et les gouverneurs des Philistins montèrent vers elle et lui dirent : Flatte-le, et sache de lui en quoi consiste sa grande force, et comment nous pourrions le vaincre, afin que nous le liions pour le dompter ; et nous te donnerons chacun onze cents pièces d’argent.

6 Délila donc dit à Samson : Déclare-moi, je te prie, en quoi consiste ta grande force, et avec quoi il faudrait bien te lier pour te dompter.

7 Et Samson lui répondit : Si on me liait de sept cordes fraîches, qui ne fussent point encore sèches, je deviendrais sans force, et je serais comme un autre homme.

8 Les gouverneurs donc des Philistins lui envoyèrent sept cordes fraîches, qui n’étaient point encore sèches, et elle l’en lia.

9 Or, il y avait des gens chez elle, dans la chambre, qui étaient cachés ; et elle lui dit : Les Philistins sont sur toi, Samson. Alors il rompit les cordes, comme se romprait un filet d’étoupes dès qu’il sent le feu ; et sa force ne fut point connue.

10 Puis Délila dit à Samson : Voici, tu t’es moqué de moi ; car tu m’as dit des mensonges. Je te prie, déclare-moi maintenant avec quoi tu pourras être bien lié.

11 Et il lui répondit : Si on me liait serré de grosses cordes neuves, dont on ne se serait jamais servi, je deviendrais sans force, et je serais comme un autre homme.

12 Délila donc prit de grosses cordes neuves, et elle lia Samson ; puis elle lui dit : Les Philistins sont sur toi, Samson. Or, il y avait des gens cachés dans la chambre ; et il rompit les grosses cordes de dessus ses bras comme un filet.

13 Puis Délila dit à Samson : Tu t’es moqué de moi jusqu’ici, et tu m’as dit des mensonges. Déclare-moi avec quoi il te faudrait lier. Et il lui dit : Ce serait si tu avais tissu sept tresses de ma tête autour d’une ensuble.

14 Et elle les mit dans l’ensuble avec la cheville ; et elle dit : Les Philistins sont sur toi, Samson. Alors il se réveilla de son sommeil, et enleva la cheville du métier avec l’ensuble.

15 Alors elle lui dit : Pourquoi dis-tu que tu m’aimes, puisque ton cœur n’est point avec moi ? Tu t’es moqué de moi trois fois, et tu ne m’as point déclaré en quoi consiste ta grande force.

16 Et elle le tourmentait tous les jours par ses paroles, et le pressait jusqu’au bout, de sorte que son âme en était affligée jusqu’à la mort.

17 Alors il lui ouvrit tout son cœur, et lui dit : Le rasoir n’a jamais passé sur ma tête ; car je suis Nazarien de Dieu, dès le ventre de ma mère. Si j’étais rasé, ma force m’abandonnerait et je deviendrais sans force, et je serais comme tous les autres hommes.

18 Délila donc, voyant qu’il lui avait ouvert tout son cœur, envoya appeler les gouverneurs des Philistins, et leur fit dire : Montez à cette fois ; car il m’a ouvert tout son cœur. Les gouverneurs des Philistins montèrent donc vers elle, portant l’argent en leurs mains.

19 Et elle l’endormit sur ses genoux, et ayant appelé un homme, elle lui fit raser sept tresses des cheveux de sa tête, et commença de le dompter, et sa force l’abandonna.

20 Alors elle dit : Les Philistins sont sur toi, Samson. Et il s’éveilla de son sommeil, disant en lui-même : J’en sortirai comme les autres fois, et je me dégagerai de leurs mains ; mais il ne savait pas que l’Eternel s’était retiré de lui.

21 Les Philistins donc le saisirent et lui crevèrent les yeux, et ils le menèrent à Gaza, et le lièrent de deux chaînes d’airain ; et il tournait la meule dans la prison.

22 Et les cheveux de sa tête commencèrent à revenir, comme ils étaient, lorsqu’il fut rasé.

23 Or, les gouverneurs des Philistins s’assemblèrent pour offrir un grand sacrifice à Dagon leur dieu, et pour se réjouir ; et ils dirent : Notre dieu a livré entre nos mains Samson notre ennemi.

24 Le peuple aussi, l’ayant vu, loua son dieu disant : Notre dieu a livré entre nos mains notre ennemi, le destructeur de notre pays, et celui qui en a tant tué d’entre nous.

25 Or, comme ils avaient le cœur joyeux, ils dirent : Faites venir Samson, afin qu’il nous divertisse. Ils appelèrent donc Samson et le tirèrent de la prison, et il jouait devant eux ; et ils le firent tenir entre les piliers.

26 Alors Samson dit au garçon qui le tenait par la main : Mets-moi d’une telle manière que je puisse toucher les piliers qui soutiennent la maison, afin que je m’appuie dessus.

27 Or, la maison était pleine d’hommes et de femmes, et tous les gouverneurs des Philistins y étaient ; il y avait même sur la plate-forme près de trois mille personnes, tant d’hommes que de femmes, qui regardaient Samson jouer.

28 Alors Samson invoqua l’Eternel, et dit : Seigneur Eternel, je te prie, souviens-toi de moi ; ô Dieu, je te prie, fortifie-moi seulement cette fois, et que je me venge des Philistins pour la perte de mes deux yeux.

29 Samson donc embrassa les deux piliers du milieu, sur lesquels la maison était appuyée, et se tint à eux ; l’un était à sa droite et l’autre à sa gauche.

30 Et il dit : Que je meure avec les Philistins. Il s’étendit donc de toute sa force, et la maison tomba sur les gouverneurs et sur tout le peuple qui y était. Et il fit mourir beaucoup plus de gens dans sa mort qu’il n’en avait fait mourir pendant sa vie.

31 Ensuite ses frères et toute la maison de son père descendirent, et l’emportèrent ; et étant remontés ils l’ensevelirent entre Tsorah et Esçtaol, dans le sépulcre de Manoah son père. Il avait jugé Israël vingt ans.

REFLEXIONS

Il parait d’ici que Dieu fut avec Samson pendant qu’il garda le vœu du nazaréat, mais que ce qui causa sa perte fut qu’il s’attacha à des femmes et en particulier à Délila qui, par ses artifices, l’engagea à lui dire en quoi consistait sa force, ce que Samson ne pouvait lui déclarer sans violer son vœu et sans s’exposer à perdre sa force et tous les précieux avantages qu’il avait eus jusqu’alors. Ce changement qui arriva à Samson et l’état honteux où il se vit réduit par ces mêmes Philistins dont il avait été la terreur fait bien voir dans quels malheurs se précipitent ceux qui sont infidèles à Dieu et à leur vocation et comment il abandonne enfin ceux qui se livrent aux infâmes désirs de la chair, aussi bien que ceux qui méprisent les dons et les grâces qu’ils ont reçues de lui.

Il faut remarquer cependant que Dieu rendit à Samson avant sa mort la force qu’il avait perdue en sorte qu’il fit périr trois mille philistins en mourant. Dieu fit cela pour sa gloire, afin d’abattre la puissance et la fierté de ces peuples idolâtres et de leur montrer que le vrai Dieu protégeait les Israélites.

Enfin, il faut considérer sur toute l’histoire de Samson qu’il a fait plusieurs choses mauvaises et tout à fait criminelles, mais que Dieu se sert de toutes sortes de personnes, même de celles qui n’ont pas une véritable piété pour exécuter ses desseins, c’est de quoi nous voyons divers exemples dans l’Écriture. Ainsi la conduite de Samson et de tous ceux dont l’histoire sainte fait mention, desquels la vie n’a pas été bien réglée n’est à imiter que dans ce que l’on y voit de bon et de conforme à la volonté de Dieu.

CHAPITRE XVII

Un homme nommé Mica fait faire deux idoles et il établit un de ses fils pour en être le sacrificateur, jusqu’à ce qu’ayant trouvé un Lévite, il l’établit à la place de son fils. On ne saurait déterminer précisément en quel temps ce qui est récité dans ce chapitre et dans les suivants arriva. Il semble que cela doit être rapporté aux temps qui suivirent la mort de Josué et des anciens, lorsque Phinées, fils du grand sacrificateur Eléazar et petit-fils d’Aaron vivait encore. Voyez Chap XX. 28.

1 Il y avait eu un homme de la montagne d’Ephraïm, dont le nom était Mica,

2 qui dit à sa mère : Les onze cents pièces d’argent qui te furent prises, pour lesquelles tu fis tant d’imprécations, lesquelles même tu prononças en ma présence, voici, cet argent-là est entre mes mains, je l’avais pris. Alors sa mère dit : Que mon fils soit béni par l’Eternel !

3 Et quand il rendit à sa mère les onze cents pièces d’argent, sa mère dit : J’avais dédié de ma main cet argent à l’Eternel pour mon fils, afin d’en faire une image taillée, et une de fonte ; et maintenant je te le rendrai.

4 Après donc qu’il eut rendu cet argent-là à sa mère, elle en prit deux cents pièces, et les donna au fondeur, qui en fit une image taillée, et une de fonte ; et elles furent dans la maison de Mica.

5 Ainsi cet homme, savoir, Mica, eut une maison de Dieu, et fit un éphod et des marmousets, et consacra l’un de ses fils, qui lui servit de sacrificateur.

6 En ce temps-là il n’y avait point de roi en Israël, chacun faisait ce qui lui semblait bon.

7 Or, il y eut un jeune homme de Bethléhem de Juda (située dans la famille de Juda), qui était Lévite, et qui avait fait son séjour là,

8 qui partit de cette ville-là, savoir, de Bethléhem de Juda, pour aller demeurer où il trouverait son avantage. Et il vint, en continuant son chemin, en la montagne d’Ephraïm, jusqu’à la maison de Mica.

9 Et Mica lui dit : D’où viens-tu ? Le Lévite lui répondit : Je suis de Bethléhem de Juda, et je m’en vais pour demeurer où je trouverai mon avantage.

10 Et Mica lui dit : Demeure avec moi, et sois-moi pour père et pour sacrificateur, et je te donnerai dix pièces d’argent par an, et ce que te coûteront tes habits et ta nourriture. Et le Lévite y alla.

11 Ainsi le Lévite convint de demeurer avec cet homme-là, et ce jeune homme lui fut comme un de ses enfants.

12 Et Mica consacra le Lévite, et ce jeune homme lui servit de sacrificateur, et demeura en sa maison.

13 Alors Mica dit : Maintenant je connais que l’Eternel me fera du bien, parce que j'ai un Lévite pour sacrificateur.

REFLEXIONS

Il y a deux réflexions à faire sur ce chapitre :

I. L’on voit dans cette histoire de Mica que la corruption était très grande parmi les Israélites en ce temps-là et qu’ils conservaient toujours un penchant extrême pour l’idolâtrie, puisque Mica, qui faisait profession de servir Dieu, établit chez lui un culte particulier et même superstitieux et idolâtre.

Par là nous devons reconnaître qu’il est très dangereux de s’écarter du service que Dieu a prescrit dans sa parole et que les hommes ne peuvent que s’égarer lorsqu’ils veulent établir des cultes qu’ils ont eux-mêmes inventés.

II. L’on doit faire attention au désir qu’eut Mica d’avoir un Lévite chez lui et la persuasion où il était que Dieu le bénirait à cause de cela, quoique cette persuasion fut mal fondée à cause du culte qui était établi chez lui était mêlé d’idolâtrie.

Nous devons cependant recueillir de là que l’on ne saurait faire trop de cas du service divin et du Saint ministère pourvu qu’il soit exercé dans sa pureté et qu’on doit regarder cet avantage comme la source de tout notre bonheur.

CHAPITRE XVIII

Ceux de la tribu de Dan étant trop resserrés dans le pays qu’ils habitaient envoyèrent des espions pour reconnaître la ville de Laïs et la prirent ensuite, après avoir consulté le Seigneur, par le moyen du Lévite qui était chez Mica, lequel même ils emmenèrent avec eux pour être leur sacrificateur.

1 En ce temps-là il n’y avait point de roi en Israël ; et en ce même temps la tribu de Dan cherchait un héritage pour elle, afin d’y demeurer ; car jusqu’alors il ne lui en était point échu entre les tribus d’Israël, pour le posséder.

2 C’est pourquoi les descendants de Dan envoyèrent, de leur famille, cinq hommes d’une et d’autre qualité, gens vaillants, de Tsorah et d’Esçtaol, pour épier le pays et le bien reconnaître ; et ils leur dirent : Allez et reconnaissez bien le pays. Ils vinrent donc à la montagne d’Ephraïm jusqu’à la maison de Mica, et ils y passèrent la nuit.

3 Et quand ils furent auprès de la maison de Mica, ils reconnurent la voix du jeune homme Lévite ; et s’étant détournés vers cette maison-là, ils lui dirent : Qui t’a amené par deçà, qu’y fais-tu, et qu’as-tu ici ?

4 Et il répondit : Mica a fait pour moi telle et telle chose, et il m’a donné des gages, et je lui sers de sacrificateur.

5 Ils dirent encore : Nous te prions que tu consultes Dieu, afin que nous sachions si le voyage que nous entreprenons sera heureux.

6 Et le sacrificateur leur dit : Allez en paix, l’Éternel a devant ses yeux le voyage que vous entreprenez.

7 Ces cinq hommes donc s’en allèrent et arrivèrent à Laïs, et ils virent le peuple de cette ville-là, qui était habitée en assurance, et que ce peuple vivait en repos et en assurance, à la façon des Sidoniens, et qu’il n’y avait personne au pays qui leur fît de la peine en aucune chose, parce qu’ils étaient libres ; aussi ils étaient éloignés des Sidoniens, et ils n’avaient à faire avec personne.

8 Puis étant revenus à leurs frères à Tsorah et Esçtaol, leurs frères leur dirent : Que rapportez-vous ?

9 Et ils répondirent : Allons, montons contre eux ; car nous avons vu le pays, et nous l’avons trouvé très bon. Quoi ! vous êtes encore sans rien faire ? Ne soyez point paresseux à partir pour aller posséder ce pays.

10 Quand vous y entrerez, vous viendrez vers un peuple qui est dans une pleine assurance, et dans un pays de grande étendue ; car Dieu l’a livré entre vos mains ; c’est un lieu où il ne manque rien de tout ce qui est sur la terre.

11 Il partit donc de là, de la famille de ceux de Dan, savoir, de Tsorah et d’Esçtaol, six cents hommes armés,

12 qui, montant, campèrent à Kirjath-jéharim, qui est en Juda ; et on a appelé ce lieu-là Mahanédan, jusqu’à ce jour, et il est derrière Kirjath-jéharim.

13 Puis de là ils passèrent à la montagne d’Ephraïm, et arrivèrent jusqu’à la maison de Mica.

14 Alors les cinq hommes qui étaient allés pour épier le pays de Laïs, prenant la parole, dirent à leurs frères : Savez-vous que dans ces maisons il y a un éphod et des idoles, une image taillée et une de fonte. Voyez donc maintenant ce que vous aurez à faire.

15 Alors ils se détournèrent vers ce lieu-là, et vinrent dans la maison du jeune homme Lévite, dans la maison de Mica, et le saluèrent.

16 Or, les six cents hommes des descendants de Dan, qui étaient sous les armes s’arrêtèrent à l’entrée de la porte.

17 Mais les cinq hommes qui étaient allés pour épier le pays, étant montés, entrèrent dans la maison, et prirent l’image taillée, l’éphod, les idoles et l’image de fonte, pendant que le sacrificateur était à l’entrée de la porte, avec les six cents hommes armés.

18 Etant donc entrés dans la maison de Mica, ils prirent l’image taillée, l’éphod, les idoles et l’image de fonte. Et le sacrificateur leur dit : Que faites-vous ?

19 Et ils lui dirent : Tais-toi, et mets ta main sur ta bouche, et viens-t’en avec nous, et sois-nous pour père et pour sacrificateur. Lequel vaut mieux, d’être sacrificateur de la maison d’un homme seul, ou d’être sacrificateur d’une tribu et d’une famille en Israël ?

20 Et le sacrificateur eut de la joie en son cœur, et ayant pris l’éphod, les idoles et l’image taillée, il se mit au milieu du peuple.

21 Ils se mirent donc en chemin, et marchèrent, et mirent devant eux les petits enfants, le bétail et le bagage.

22 Quand ils furent éloignés de la maison de Mica, ceux qui étaient dans les maisons voisines de celle de Mica, furent convoqués à grand cri, et ils atteignirent les descendants de Dan,

23 et ils crièrent après eux ; mais eux tournant le visage, dirent à Mica : Qu’as-tu, que tu cries ainsi ?

24 Il répondit : Vous avez enlevé mes dieux que j’avais faits, avec le sacrificateur, et vous vous en êtes allés. Et que me reste-t-il ? Comment donc me dites-vous : Qu’as-tu ?

25 Et les descendants de Dan lui dirent : Ne fais point entendre ta voix après nous, de peur que ces gens, en colère, ne se jettent sur vous, et que vous n’y laissiez la vie, toi et tous ceux de ta famille.

26 Les descendants de Dan continuèrent donc leur chemin, et Mica, ayant vu qu’ils étaient plus forts que lui, tourna visage et s’en revint en sa maison.

27 Ainsi, ayant pris les choses que Mica avait faites, et le sacrificateur qu’il avait, ils arrivèrent à Laïs, vers un peuple qui était tranquille et qui se croyait en sûreté ; et ils les firent passer au fil de l’épée, et ayant mis le feu à la ville, ils la brûlèrent.

28 Et il n’y eut personne qui la délivrât ; car elle était loin de Sidon, ses habitants n’avaient aucun commerce avec personne, et elle était située en la vallée qui appartenait au pays de Beth-réhob. Puis ils bâtirent là une ville, et ils y habitèrent.

29 Et ils nommèrent cette ville-là Dan, selon le nom de Dan leur père, qui était né à Israël ; au lieu qu’auparavant le nom de cette ville était Laïs.

30 Et les descendants de Dan, se dressèrent l’image taillée, et Jonathan, fils de Guersçon, fils de Manassé, lui et ses enfants, furent sacrificateurs pour la tribu de Dan jusqu’au jour que son pays fut pris.

31 Ils se dressèrent donc l’image taillée que Mica avait faite, tout le temps que la maison de Dieu fut à Scilo.

REFLEXIONS

Pour l’intelligence de ce chapitre et pour profiter de cette lecture, il faut y faire ces trois réflexions :

I. Que ceux de la tribu de Dan entreprirent justement la guerre contre la ville de Laïs, puisque les habitants de cette ville étaient de ces Cananéens dont Dieu avait donné le pays aux enfants d’Israël.

II. Que les Israélites de la tribu de Dan, avant que d’exécuter leur dessein, consultèrent le Seigneur par le moyen d’un Lévite et qu’ils voulurent même avoir ce Lévite avec eux pour sacrificateur.

Quoique ces Israélites péchassent en s’adressant à un Lévite qui avait établi un culte illicite, nous devons cependant apprendre d’ici à ne rien entreprendre sans examiner si nos desseins sont conformes à la volonté du Seigneur et à estimer par-dessus toutes choses l’avantage de servir Dieu publiquement, pourvu que nous le fassions de la manière dont il l’a ordonné.

III. Il faut remarquer sur ce récit que bien que Dieu n’approuvât pas le culte qui était établi chez Mica parce que ce culte était mêlé d’idolâtrie, il voulut cependant donner un heureux succès à ceux de la tribu de Dan pour exécuter les desseins de sa providence. Mais cette tribu n’en témoigna pas à Dieu la reconnaissance qu’elle devait puisqu’elle conserva ce culte idolâtre dans son pays.

Au reste, on voit par ce qui est rapporté dans ce chapitre, qu’il y avait beaucoup de désordres parmi les Israélites par rapport à la religion et aux mœurs. C’est ce qui paraît encore par le chapitre suivant.

CHAPITRE XIX

C’est ici le récit du crime que les habitants de la ville de Guibha commirent en violant et en faisant mourir la femme d’un Lévite, ce qui donna lieu à la guerre que toutes les tribus d’Israël firent à la tribu de Benjamin.

1 Il arriva aussi, en ce temps-là, lorsqu’il n’y avait point de roi en Israël, qu’il y eut un Lévite qui demeurait aux côtés de la montagne d’Ephraïm, qui prit une femme concubine de Bethléhem de Juda.

2 Mais sa concubine commit impureté chez lui et s’en alla d’avec lui en la maison de son père à Bethléhem de Juda ; et elle y fut l’espace de quatre mois.

3 Ensuite son mari se leva, et il s’en alla après elle, pour lui parler selon son cœur, et la ramener. Il avait aussi avec soi son serviteur et deux ânes, et elle le fit entrer dans la maison de son père. Et le père de la jeune femme le voyant venir, se réjouit de sa rencontre.

4 Son beau-père donc, père de la jeune femme, le retint chez lui, et il demeura avec lui trois jours ; et ils mangèrent et burent et ils logèrent là.

5 Au quatrième jour, comme ils s’étaient levés de bon matin, il se mit en chemin pour s’en aller ; mais le père de la jeune femme dit à son beau-fils : Prends une bouchée de pain pour te fortifier, et après cela, vous vous en irez.

6 Ils s’assirent donc et mangèrent eux deux, et burent ensemble ; et le père de la jeune femme dit au mari : Je te prie qu’il te plaise de passer encore ici cette nuit, et que ton cœur se réjouisse.

7 Et comme le mari se fut mis en chemin pour s’en aller, son beau-père le pressa tellement, qu’il s’en retourna, et il y passa encore la nuit.

8 Et au cinquième jour il se leva de bon matin pour s’en aller, et le père de la jeune femme dit : Je te prie, fortifie ton cœur ; et ils tardèrent tant, que le jour commença à baisser pendant qu’ils mangeaient eux deux ensembles.

9 Puis le mari se mit en chemin pour s’en aller, lui et sa concubine, et son serviteur. Et son beau-père, père de la jeune femme, lui dit : Voici, maintenant le jour baisse, et le soir approche ; je vous prie, passez ici la nuit ; voici, le jour finit, passe ici la nuit, et que ton cœur se réjouisse ; et demain matin vous vous lèverez pour continuer votre chemin, et tu t’en iras en ta maison.

10 Mais le mari ne voulut point y passer la nuit ; mais il se leva, et s’en alla, et vint jusque vis-à-vis de Jébus, qui est Jérusalem, ayant avec soi ses deux ânes bâtés et sa concubine.

11 Et comme ils étaient près de Jébus, et que le jour était fort avancé, le serviteur dit à son maître : Marchez je vous prie, et détournons-nous vers cette ville des Jébusiens, afin que nous y passions la nuit.

12 Et son maître lui répondit : Nous ne nous détournerons point vers aucune ville d’un peuple étranger, où il n’y a point d’enfants d’Israël ; mais nous passerons jusqu’à Guibha.

13 Il dit aussi à son serviteur : Marche, et nous gagnerons l’un de ces lieux-là, et nous passerons la nuit à Guibha ou à Rama.

14 Ils passèrent donc plus avant, et marchèrent, et le soleil leur coucha près de Guibha, qui appartient à Benjamin.

15 Alors ils se détournèrent vers Guibha, pour y entrer et y passer la nuit ; et étant entrés, ils demeurèrent dans la place de la ville, et il n’y avait personne qui les retirât chez soi pour y passer la nuit.

16 Mais voici, sur le soir, un vieillard qui venait des champs de son travail ; et cet homme-là était de la montagne d’Ephraïm, mais il demeurait à Guibha, dont les habitants étaient Benjamites ;

17 levant ses yeux, il vit ce voyageur assis dans la place de la ville ; alors ce vieillard lui dit : Où vas-tu, et d’où viens-tu ?

18 Et il lui répondit : Nous passons de Bethléhem de Juda vers les côtés de la montagne d’Ephraïm, d’où je suis, parce que j’étais allé jusqu’à Bethléhem de Juda ; mais maintenant je m’en vais à la maison de l’Eternel ; et il n’y a personne qui me retire chez soi,

19 Quoique nous ayons de la paille et du fourrage pour nos ânes, et du pain et du vin pour moi et pour ta servante, et pour le garçon qui est avec tes serviteurs. Nous n’avons besoin de rien que du logement.

20 Et le vieillard lui dit : La paix soit avec toi ! Je me charge de tout ce dont tu auras besoin ; je te prie seulement, que tu ne passes point la nuit dans la place.

21 Alors il le fit entrer dans sa maison, et il donna à manger aux ânes ; et ayant lavé leurs pieds, ils mangèrent et burent.

22 Comme ils faisaient bonne chère, voici, les gens de la ville, qui étaient de méchants garnements, environnèrent la maison, heurtant à la porte, et ils parlèrent au vieillard, qui était maître de la maison, et lui dirent : Fais sortir cet homme qui est entré dans ta maison, afin que nous le connaissions.

23 Mais cet homme, savoir, le maître de la maison, sortit vers eux, et leur dit : Non, mes frères, ne lui faites point de mal, je vous prie ; puisque cet homme est entré en ma maison, ne faites point une action si infâme.

24 Voici, j’ai une fille qui est vierge et cet homme a sa concubine ; je vous les amènerai dehors maintenant, et vous les violerez, et vous ferez d’elles comme il vous semblera bon ; mais ne commettez point une action si infâme à l’égard de cet homme.

25 Mais ces gens-là ne voulurent point l’écouter ; c’est pourquoi cet homme prit sa concubine, et ils abusèrent d’elle toute la nuit jusqu’au matin ; puis ils la renvoyèrent, comme l’aube du jour se levait.

26 Cette femme donc, comme le jour approchait, s’en revint, et étant tombée à la porte de la maison de l’homme où était son mari, elle y demeura jusqu’au jour.

27 Et son mari se leva de bon matin, et ayant ouvert la porte, il sortait pour continuer son chemin ; mais voici sa femme concubine qui était tombée à la porte de la maison, et qui avait les mains sur le seuil ;

28 et il lui dit : Lève-toi, et allons-nous-en ; mais elle ne répondit point. Alors il la chargea sur un âne, et se mit en chemin, et s’en retourna chez lui.

29 Et étant venu dans sa maison, il prit un couteau, et prenant sa concubine, il partagea son corps avec ses os en douze parts, et il en envoya une part dans tous les quartiers d’Israël.

30 Et tous ceux qui virent cela dirent : On n’a jamais fait ni vu rien de pareil, depuis que les enfants d’Israël sont montés hors du pays d’Egypte, jusqu’à ce jour. Pensez à cela, consultez et prononcez.

REFLEXIONS

Cette histoire fait voir que les habitants de Guibha étaient des gens perdus et portés aux crimes les plus abominables et qu’en général il y avait en ce temps-là une étrange confusion et beaucoup de licence parmi les enfants d’Israël. Cela procédait principalement de ce qu’ils n’avaient pas des chefs et des conducteurs qui fissent observer la loi de Dieu et de ce que chacun faisait ce qu’il trouvait à propos. Les peuples qui ont été favorisés de la connaissance de Dieu peuvent tomber dans le dernier abandonnement au mal lorsqu’ils n’observent plus les lois de la religion et de la justice et que ceux qui les violent demeurent impunis.

CHAPITRE XX

Les Israélites déclarent la guerre à la tribu de Benjamin parce qu’elle n’avait pas voulu leur livrer les habitants de la ville de Guibha qui s’étaient rendus coupables du violement et de la mort de la femme d’un Lévite, comme cela est dit dans le chapitre précédent. L’issue de cette guerre fut que les Israélites, après avoir été battus deux fois, prirent Guibha et firent un grand carnage des Benjamites, en sorte que cette tribu fut presque entièrement détruite.

1 Alors tous les enfants d’Israël sortirent, et l’assemblée fut convoquée, comme si ce n’eût été qu’un seul homme, depuis Dan jusqu’à Béer-sçébah, et jusqu’au pays de Galaad, vers l’Eternel, à Mitspa.

2 Et les chefs de tout le peuple, et toutes les tribus d’Israël se trouvèrent dans l’assemblée du peuple de Dieu, au nombre de quatre cent mille hommes de pied qui tiraient l’épée.

3 Et les Benjamites apprirent que les enfants d’Israël étaient montés à Mitspa. Et les enfants d’Israël dirent : Qu’on nous récite comment cette méchante action est arrivée.

4 Et le Lévite, qui était le mari de la femme qu’on avait tuée, répondit et dit : Etant arrivés à Guibha, qui est de Benjamin, moi et ma concubine, pour y passer la nuit,

5 les seigneurs de Guibha se sont élevés contre moi, et ils ont environné de nuit la maison où j’étais, prétendant me tuer, et ils ont tellement violé ma concubine qu’elle en est morte.

6 C’est pourquoi, ayant pris ma concubine, je l’ai mise en pièces, et j’en ai envoyé par tous les quartiers de l’héritage d’Israël ; car ils ont fait un crime énorme, et une action infâme en Israël.

7 Vous voici tous, enfants d’Israël ; délibérez-en ici entre vous, et dites-en votre avis.

8 Et tout le peuple se leva, comme s’ils n’eussent été qu’un seul homme, et ils dirent : Aucun de nous n’ira en sa tente, ni aucun de nous ne se retirera en sa maison ;

9 mais, voici ce que nous ferons maintenant à Guibha ; nous jetterons le sort contre elle ;

10 nous prendrons dix hommes de cent, d’entre toutes les tribus d’Israël, et cent de mille, et mille de dix mille, qui prendront de la provision pour le peuple, afin qu’étant entrés à Guibha de Benjamin, ils la traitent selon l’infamie du crime qu’elle a commis en Israël.

11 Ainsi, tous ceux d’Israël furent assemblés contre cette ville-là, étant unis comme s’ils n’eussent été qu’un seul homme.

12 Alors les tribus d’Israël envoyèrent des hommes vers toute la tribu de Benjamin, pour lui dire : Quelle méchante action a-t-on commis parmi vous ?

13 Maintenant donc, livrez-nous ces méchants garnements qui sont à Guibha, afin que nous les fassions mourir, et que nous ôtions le mal du milieu d’Israël. Mais les Benjamites ne voulurent point écouter la voix de leurs frères, les enfants d’Israël.

14 Et les Benjamites sortant de leurs villes, s’assemblèrent à Guibha, pour sortir en bataille contre les enfants d’Israël.

15 En ce jour-là on fit le dénombrement des enfants de Benjamin, qui étaient dans ces villes-là ; et il se trouva vingt-six mille hommes tirant l’épée, sans les habitants de Guibha, dont on fit aussi le dénombrement, et on y trouva sept cents hommes d’élite.

16 De tout ce peuple-là, il y avait sept cents hommes d’élite, qui ne se servaient point de la main droite ; tous tiraient des pierres avec une fronde à un cheveu, et ils n’en manquaient point.

17 On fit aussi le dénombrement des hommes d’Israël, sans compter ceux de Benjamin, et il s’en trouva quatre cent mille hommes tirant l’épée, tous gens de guerre.

18 Ils partirent donc, et étant montés à la maison du Dieu fort, ils consultèrent Dieu ; les enfants d’Israël dirent donc : Qui est-ce d’entre nous qui montera le premier pour faire la guerre aux Benjamites ? Et l’Éternel répondit : Juda montera le premier.

19 Puis les enfants d’Israël se levèrent de bon matin, et ils campèrent près de Guibha.

20 Et ceux d’Israël sortirent en bataille contre Benjamin, et se rangèrent contre eux en bataille près de Guibha.

21 Alors les Benjamites sortirent de Guibha, et ce jour-là ils mirent par terre vingt-deux mille hommes de l’armée de ceux d’Israël.

22 Toutefois le peuple de ceux d’Israël reprit courage, et se rangea de nouveau en bataille, au lieu où il s’était rangé le premier jour ;

23 parce que les enfants d’Israël étaient montés, et avaient pleuré devant l’Éternel jusqu’au soir, et avaient consulté l’Éternel en disant : M’approcherai-je encore pour combattre contre les descendants de Benjamin, qui est mon frère ? Et l’Éternel avait répondu : Montez contre lui.

24 Le lendemain donc, les enfants d’Israël s’approchèrent des enfants de Benjamin.

25 Les Benjamites sortirent aussi de Guibha ce second jour contre eux, et ils mirent encore par terre dix-huit mille hommes des enfants d’Israël qui tiraient tous l’épée.

26 Alors tous les enfants d’Israël et tout le peuple montèrent, et vinrent à la maison du Dieu fort, et y pleurèrent, et se tinrent là, devant l’Éternel, et jeûnèrent ce jour-là jusqu’au soir, et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de prospérités devant l’Éternel.

27 Ensuite les enfants d’Israël consultèrent l’Éternel (l’arche de l’alliance de Dieu était alors en ce lieu-là ;

28 et Phinées, fils d’Eléazar, fils d’Aaron, se tenait devant l’Éternel ;) ils consultèrent donc l’Éternel, disant : Sortirai-je encore une autre fois en bataille contre les descendants de Benjamin, qui est mon frère, ou m’en déporterai-je ? Et l’Éternel répondit : Montez ; car demain je les livrerai entre vos mains.

29 Et Israël mit des embuscades autour de Guibha.

30 Et les enfants d’Israël montèrent le troisième jour contre les Benjamites, et se rangèrent contre Guibha comme les autres fois.

31 Alors les Benjamites, étant sortis pour rencontrer le peuple, furent attirés hors de la ville, et commencèrent à en frapper quelques-uns du peuple, et il y eut environ trente hommes d’Israël qui furent blessés à mort, comme les autres fois, par les chemins, dont l’un monte à la maison du Dieu fort, et l’autre à Guibha, dans la campagne.

32 Et les Benjamites dirent : Ils tombent devant nous comme la première fois. Mais les enfants d’Israël disaient : Fuyons et les attirons hors de la ville, dans les chemins.

33 Tous ceux d’Israël donc, se levant du lieu où ils étaient, se rangèrent à Bahal-tamar ; et les gens de l’embuscade sortirent aussi de leur poste, savoir, de la prairie de Guibha ;

34 et dix mille hommes d’élite, de tout Israël, vinrent contre Guibha, et la mêlée fut rude, et ceux de benjamin n’aperçurent point le mal qui allait tomber sur eux.

35 Et l’Éternel battit Benjamin devant les Israélites, et les enfants d’Israël, en ce jour-là, mirent par terre vingt-cinq mille et cent hommes de Benjamin, tous tirant l’épée.

36 Les Benjamites virent alors qu’ils étaient battus. Or, ceux d’Israël avaient reculé devant ceux de Benjamin ; car ils s’assuraient sur les embuscades qu’ils avaient mises près de Guibha ;

37 et ceux qui étaient en embuscade se jetèrent incontinent sur Guibha ; ainsi ceux qui étaient en embuscade marchèrent, et firent passer toute la ville au fil de l’épée.

38 Or, ceux d’Israël avaient donné pour signal à ceux qui étaient en embuscade, qu’ils fissent monter beaucoup de fumée de la ville.

39 Ceux d’Israël avaient donc tourné le dos dans la bataille, et les Benjamites avaient commencé de frapper et de blesser à mort environ trente hommes de ceux d’Israël ; car ils disaient : Quoi qu’il en soit, certainement, ils tombent devant nous comme à la première bataille.

40 Mais quand on vit comme une colonne de fumée qui s’élevait, et qui commençait à monter de la ville, ceux de Benjamin regardèrent derrière eux, et voici, la flamme qui consumait toute la ville, montait vers le ciel ;

41 alors ceux d’Israël tournèrent visage, et ceux de Benjamin furent éperdus ; car ils virent que le mal les avait atteints.

42 Et ils tournèrent le dos devant ceux d’Israël, vers le chemin du désert ; mais l’armée d’Israël les serra de près ; et pour ce qui est de ceux des villes, ils les mirent par terre dans leurs propres lieux.

43 Ils environnèrent donc ceux de Benjamin, les poursuivirent et les foulèrent aux pieds, depuis Ménuha jusqu’à l’opposite de Guibha, vers le soleil levant.

44 Et il y eut de la tribu de Benjamin dix-huit mille hommes tués, qui étaient tous vaillants hommes.

45 Alors ceux de Benjamin tournant le dos, fuirent vers le désert au rocher de Rimmon, et ceux d’Israël en grappillèrent, par les chemins, cinq mille hommes ; et les poursuivant de près jusqu’à Guidhom, ils en frappèrent deux mille hommes.

46 Tous ceux donc qui tombèrent morts ce jour-là de Benjamin, furent vingt-cinq mille hommes, tirant tous l’épée, et tous vaillants hommes.

47 Et il y eut six cents hommes, de ceux qui avaient tourné le dos, qui échappèrent vers le désert au rocher de Rimmon, qui demeurèrent au rocher de Rimmon quatre mois.

48 Et ceux d’Israël retournèrent vers les Benjamites, et les firent passer au fil de l’épée, tant les hommes de chaque ville, que les bêtes et tout ce qui se trouva. Ils brûlèrent aussi toutes les villes qui s’y trouvèrent.

REFLEXIONS

La résolution que les tribus d’Israël prirent de faire la guerre à celle de Benjamin parce qu’elle refusa de punir ceux de Guibha de l’action infâme qu’ils avaient commise prouve, que bien qu’il y eût beaucoup de licence parmi les enfants d’Israël, il y avait pourtant encore du zèle et de l’amour pour la justice.

I. Il est à remarquer que les Israélites ne déclarèrent la guerre à ceux de Benjamin qu’après les avoir premièrement requis de punir les coupables.

Cette conduite sage et modérée doit apprendre aux chrétiens qu’il ne faut pas être trop prompt à rompre la paix et qu’avant que d’employer la rigueur, on doit recourir à la remontrance et aux voies de douceur.

III. Il faut considérer ici que quoi que Dieu approuvât cette guerre et que sa volonté fût de châtier les Benjamites, cependant, parce que les autres tribus n’étaient pas innocentes, il permit qu’elles fussent battues deux fois afin de leur faire sentir leurs péchés et qu’il ne leur accorda la victoire qu’après qu’elles eurent donné des marques de leur repentance par leur humiliation et par leur jeûne.

Ceux dont Dieu veut bénir les desseins et dont il veut se servir pour châtier les autres sont souvent coupables eux-mêmes et ont aussi besoin d’être châtiés et Dieu ne déploie sa force et n’accomplit ses promesses qu’en faveur de ceux qui s’humilient sincèrement devant lui.

Enfin, ce qui arriva aux Benjamites pour avoir refusé de punir les habitants de Guibha du crime atroce qui avait été commis dans leur ville fait voir que les péchés de quelques particuliers peuvent devenir les péchés de tout le peuple et attirent même quelques fois sur le public de grands malheurs lorsque les coupables demeurent impunis et qu’ils sont soutenus ou tolérés par ceux qui devraient réprimander le crime et en faire la vengeance.

CHAPITRE XXI

On voit dans ce chapitre :

I. La douleur que les Israélites eurent de la défaite des Benjamites, et en second lieu ce qu’ils firent pour rétablir cette tribu qui avait été presque éteinte.

1 Et ceux d’Israël jurèrent à Mitspa, disant : Nul de nous ne donnera sa fille pour femme aux Benjamites.

2 Puis le peuple vint à la maison du Dieu fort, et ils demeurèrent là jusqu’au soir en la présence de Dieu, et élevant leurs voix ils répandirent des larmes en abondance,

3 et ils dirent : Éternel, Dieu d’Israël, pourquoi ceci est-il arrivé en Israël, qu’une tribu d’Israël ait été aujourd’hui retranchée ?

4 Et le lendemain le peuple se leva de bon matin, et il bâtit là un autel, et ils offrirent des holocaustes et des sacrifices de prospérités.

5 Alors les enfants d’Israël dirent : Qui est celui d’entre toutes les tribus d’Israël qui n’est point monté à l’assemblée vers l’Éternel ? Car on avait fait un grand serment contre celui qui ne monterait point vers l’Éternel à Mitspa, en disant : Un tel sera puni de mort.

6 Car les enfants d’Israël se repentaient de ce qui était arrivé à Benjamin leur frère, et disaient : Aujourd’hui une tribu a été retranchée d’Israël ;

7 que ferons-nous à ceux qui sont demeurés de reste, pour leur donner des femmes, puisque nous avons juré par l’Éternel que nous ne leur donnerions point de nos filles pour femmes ?

8 Ils dirent donc : Y a-t-il quelqu’un d’entre les tribus d’Israël qui ne soit point monté vers l’Éternel à Mitspa ? Et voici, nul de Jabès de Galaad n’était venu au camp, à l’assemblée ;

9 car quand on fit le dénombrement du peuple, nul ne s’y trouva des habitants de Jabès de Galaad.

10 C’est pourquoi l’assemblée y envoya douze mille hommes des plus vaillants, et leur donna ce commandement : Allez et faites passer les habitants de Jabès de Galaad au fil de l’épée, tant les femmes que les petits enfants.

11 Voici donc ce que vous ferez ; vous exterminerez, à la façon de l’interdit, tout mâle, et toute femme qui aura eu la compagnie d’un homme.

12 Et ils trouvèrent, entre les habitants de Jabès de Galaad, quatre cents filles vierges, qui n’avaient point eu la compagnie d’aucun homme, et ils les amenèrent au camp, à Scilo, qui est au pays de Canaan.

13 Alors toute l’assemblée envoya pour parler aux Benjamites qui étaient au rocher de Rimmon, et pour leur annoncer la paix.

14 En ce temps-là, les Benjamites retournèrent, et on leur donna pour femmes celles qui avaient été conservées en vie, d’entre les femmes de Jabès de Galaad ; mais il ne s’en trouva pas assez pour eux.

15 Et le peuple se repentit de ce qui avait été fait à Benjamin ; car l’Éternel avait fait une brèche aux tribus d’Israël ;

16 et les anciens de l’assemblée dirent : Que ferons-nous à ceux qui sont de reste, pour leur donner des femmes ; car les femmes ont été exterminées d’entre les Benjamites.

17 Puis ils dirent : Ceux qui sont réchappés, posséderont ce qui appartenait à Benjamin, afin qu’une tribu ne soit pas retranchée.

18 Cependant, nous ne leur pourrons point donner des femmes d’entre nos filles ; car les enfants d’Israël ont juré, disant : Maudit est celui qui donnera une femme à ceux de Benjamin.

19 Et ils dirent : Voici, la solennité ordinaire de l’Éternel se célèbre à Scilo, qui est vers l’aquilon de Beth-el, et au soleil levant du chemin qui monte de Beth-el à Sichem, et au midi de Lébona.

20 Et ils donnèrent ce commandement aux Benjamites : Allez, et mettez des embuscades dans les vignes ;

21 et quand vous verrez que les filles de Scilo sortiront pour danser avec des flûtes, alors vous sortirez des vignes, et vous enlèverez pour vous chacun sa femme, d’entre les filles de Scilo, et vous vous en irez au pays de Benjamin ;

22 et quand leurs pères ou leurs frères viendront pour se plaindre devant nous, nous leur dirons : Ayez pitié d’eux pour l’amour de nous ; parce que nous n’avons point pris de femmes pour chacun d’eux dans cette guerre, et maintenant vous êtes coupables, parce que vous ne leur en avez point données.

23 Les Benjamites firent donc ainsi, et enlevèrent des femmes, selon leur nombre, d’entre celles qui dansaient, qu’ils ravirent ; puis, s’en allant, ils retournèrent à leur héritage, et ayant rebâti des villes, ils y habitèrent.

24 Les enfants d’Israël retournèrent aussi chacun en sa tribu, à sa famille, et à son héritage.

25 En ces jours-là il n’y avait point de roi en Israël, mais chacun faisait ce qui lui semblait bon.

REFLEXIONS

L’affliction que les Israélites témoignèrent de la défaite de ceux de Benjamin qui étaient leurs frères et qu’ils avaient vaincus nous apprend que nous ne devons jamais nous réjouir des avantages que nous remportons lorsqu’il en arrive du mal aux autres, quand même ils se seraient attiré ce mal par leurs fautes.

On peut encore considérer sur cette histoire qu’il ne faut jamais s’abandonner au ressentiment quelque juste qu’il paraisse, ni châtier les coupables avec trop de rigueur, de peur de faire des choses dont on se repentirait dans la suite. Ce fut ce qui arriva aux Israélites qui, au lieu d’user avec modération de leur victoire sur les Benjamites, en firent un si grand carnage et qui après cela, voyant qu’une des tribus d’Israël était presque détruite, en eurent une vive douleur et un grand repentir.

Enfin, comme les Israélites travaillèrent à rétablir la tribu de Benjamin, l’humanité et la charité veulent que nous contribuions de tout notre pouvoir à la consolation et au soulagement des malheureux, surtout quand ce sont nos frères, et que la gloire de Dieu et le bien de la religion demandent que nous nous intéressions pour eux.