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ARGUMENT

Daniel a été illustre par sa sainteté, par son grand zèle et par les révélations qu’il a eues. Le témoignage que Dieu lui rend dans les chapitres XIV et XXVIII d’Ézéchiel et ce que Jésus-Christ en dit dans l’Évangile prouve que ça a été un très saint homme et un grand prophète. Il vivait à Babylone près de six-cents ans avant la venue de notre Seigneur et il a été connu comme prophète pendant tout le temps de la captivité, et même au-delà, c’est-à-dire pendant plus de 70 ans, de sorte qu’il atteignit une vieillesse fort avancée. Son livre est mêlé d’histoires et de prophéties très remarquables. On y lit le récit de divers événements considérables qui arrivèrent à Babylone, tant aux Rois de ce pays-là, qu’à Daniel lui-même et plusieurs prédictions qui marquent les changements qui devaient arriver dans les empires et en particulier dans l’état des Juifs, aussi bien que la venue du Messie.

Chapitres  CHAPITRE I. CHAPITRE II.  CHAPITRE III.  CHAPITRE IV.   CHAPITRE V.  CHAPITRE VI.  CHAPITRE VII.  CHAPITRE VIII.   CHAPITRE IX. CHAPITRE X.   CHAPITRE XI.   CHAPITRE XII.  LIVRES DU VIEUX TESTAMENT

CHAPITRE I.

On voit dans le premier chapitre comment Daniel fut mené à Babylone et élevé à la cour du roi Nébucadnésar.

1 La troisième année du règne de Jéhojakim, Roi de Juda, Nébucadnésar, Roi de Babylone, vint contre Jérusalem, et l’assiégea.

2 Et le Seigneur livra entre ses mains Jéhojakim, Roi de Juda, et une partie des vaisseaux de la maison de Dieu ; et Nébucadnésar les fit emporter au pays de Scinhar, dans la maison de son dieu, et mit ces vaisseaux-là dans la maison du trésor de son dieu.

3 Et le Roi dit à Asçpénas, chef de ses eunuques, qu’il amenât, d’entre les enfants d’Israël, et de la race royale, et des principaux seigneurs,

4 quelques jeunes hommes en qui il n’y eût aucune tache, beaux de visage, instruits en toute sorte de sagesse, connaissant les sciences, et qui eussent beaucoup d’intelligence, et qui fussent capables de se tenir au palais du Roi, et qu’on leur enseignât les lettres et la langue des Caldéens.

5 Et le Roi leur assigna, pour provision pour chaque jour, une portion de la viande royale, et du vin dont il buvait, afin qu’on les nourrît ainsi trois ans, et qu’après cela, quelques-uns d’entre eux servissent en la présence du Roi.

6 Et il y eut parmi eux, d’entre les enfants de Juda, Daniel, Hanania, Misçaël et Hazaria.

7 Mais le chef des eunuques leur mit d’autres noms ; car il appela Daniel Beltesçatsar ; et Hanania Sçadrac, et Misçaël Mesçac ; et Hazaria Habed-Négo.

8 Or Daniel prit la résolution dans son cœur de ne se pas souiller par la portion de la viande du Roi, et du vin que le Roi buvait ; c’est pourquoi il pria le chef des eunuques de lui permettre de ne se point souiller.

9 Et Dieu fit que le chef des eunuques eut de la bonté pour Daniel, et qu’il eut des égards pour lui.

10 Cependant, le chef des eunuques dit à Daniel : Je crains le Roi mon maître, qui a ordonné votre manger et votre boire. Pourquoi verrait-il vos visages plus défaits que ceux des autres jeunes hommes vos semblables, et rendriez-vous ma tête coupable vers le Roi ?

11 Mais Daniel dit à Meltsar, qui avait été ordonné par le chef des eunuques sur Daniel, Hanania, Misçaël et Hazaria :

12 Eprouve, je te prie, tes serviteurs, pendant dix jours, et qu’on nous donne des légumes à manger, et de l’eau à boire.

13 Après cela regarde nos visages et les visages des jeunes hommes qui mangent la portion de la viande royale ; alors fais avec tes serviteurs selon ce que tu auras vu.

14 Et il leur accorda cela, et il les éprouva pendant dix jours.

15 Et au bout des dix jours leurs visages parurent en meilleur état et avec plus d’embonpoint que ceux de tous les jeunes hommes qui mangeaient la portion de la viande royale.

16 Ainsi Meltsar prenait la portion de leur viande, et le vin qu’ils devaient boire, et leur donnait des légumes.

17 Et Dieu donna à ces quatre jeunes hommes de la science et de la connaissance dans toutes les lettres, et de la sagesse ; et Daniel avait de l’intelligence en toutes sortes de visions, et dans les songes divins.

18 Et au bout des jours que le Roi avait dit qu’on les amenât, le chef des eunuques les amena en la présence de Nébucadnésar.

19 Et le Roi leur parla ; mais entre tous il ne s’en trouva point de tels que Daniel, Hanania, Misçaël et Hazaria ; et ils assistèrent en la présence du Roi.

20 Et dans toutes les affaires de sagesse et d’intelligence que le Roi leur demandait, il en trouva en eux dix fois plus que dans tous les devins et les astrologues qu’il y avait dans tout son royaume.

21 Et Daniel y fut jusqu’à la première année du Roi Cyrus.

REFLEXIONS

Il y a trois réflexions à faire sur ce chapitre :

I. La première, que Dieu voulut que Daniel fût mené captif à Babylone avec d’autres Juifs, qu’il y fût élevé à la cour du Roi et qu’il s’y rendît illustre par sa sagesse et par le don de la prophétie. La providence ménageait ainsi tous ces événements pour la consolation des Juifs captifs, pour rendre le nom du vrai Dieu célèbre dans ce pays-là parmi ces peuples idolâtres et même pour l’instruction et la consolation de l’Église dans tous les temps.

II. On a un bel exemple de tempérance, de piété et de confiance en Dieu dans la conduite de Daniel et de ses trois compagnons. Ils ne se nourrirent que d’eau et de légumes et ils refusèrent de manger des viandes du roi, parce que les Babyloniens mangeaient de certains animaux dont il n’était pas permis aux Juifs de manger et parce que ces viandes étaient le plus souvent consacrées aux idoles. Cette tempérance et cette piété de Daniel et de ses amis qui, étant encore jeunes et dans l’âge où l’on est le plus porté aux plaisirs et vivant au milieu d’une cour idolâtre et adonnée aux voluptés, gardèrent ainsi leur conscience pure, apprennent à tout le monde, et surtout aux jeunes gens et à ceux qui vivent chez les grands, à fuir les délices, à être sobres et à ne jamais rien faire contre la religion et la conscience.

III. On voit ici que Dieu accorda à Daniel, avec la santé du corps, des lumières et des dons extraordinaires et qu’il le fit parvenir à des emplois considérables. Comme Dieu destinait Daniel à de grandes choses, il l’y prépara, dès sa jeunesse, par les grands dons qu’il lui communiqua et par la considération où il le mit auprès d’un prince puissant et de ses successeurs, jusqu’à ce que la monarchie passa des Caldéens aux Perses.

C’est ainsi que Dieu met ses grâces dans les personnes sobres et pieuses, qu’il bénit ceux qui le craignent et qu’il leur accorde même souvent des bénédictions temporelles en récompense de leur piété.

CHAPITRE II.

Le Roi Nébucadnésar voit en songe une statue composée de divers métaux. Les astrologues n’ayant pu deviner ni expliquer ce songe furent condamnés à mort. Mais Daniel le récita et l’expliqua au Roi qui reconnut que le Dieu que Daniel adorait était le vrai Dieu et qui éleva ce prophète et ses trois amis à de grands honneurs.

1 La seconde année du règne de Nébucadnésar, Nébucadnésar fit des songes, dont son esprit fut étonné, et son sommeil fut interrompu.

2 Alors le Roi commanda qu’on appelât les magiciens, les astrologues, les enchanteurs, et les Caldéens pour lui expliquer ses songes ; et ils vinrent, et se présentèrent devant le Roi.

3 Et le Roi leur dit : J’ai fait un songe, et mon esprit s’est étonné, et j’ai tâché de me rappeler ce songe.

4 Et les Caldéens répondirent au Roi en langue syriaque : Roi, vis éternellement, dis le songe à tes serviteurs, et nous en donnerons l’interprétation.

5 Mais le Roi répondit, et dit aux Caldéens : La chose m’est échappée : si vous ne me dites le songe et ne m’en donnez l’interprétation, vous serez mis en pièces, et vos maisons seront réduites en voirie.

6 Mais si vous me dites le songe et que vous m’en donniez l’interprétation, vous recevrez de moi des dons, des présents, et de grands honneurs. Quoi qu’il en soit, dites-moi le songe et m’en donnez l’interprétation.

7 Ils répondirent pour la seconde fois, et dirent : Que le Roi dise le songe à ses serviteurs, et nous en donnerons l’interprétation.

8 Le Roi répondit, et dit : Je connais maintenant que vous cherchez à gagner du temps, parce que vous voyez que la chose m’est échappée.

9 Que si vous ne me dites pas le songe, il y a une même sentence contre vous ; car vous vous êtes préparés pour dire devant moi quelque parole fausse et trompeuse, en attendant que le temps change. Quoi qu’il en soit, dites-moi le songe, et je connaîtrai par-là que vous m’en pouvez donner l’interprétation.

10 Les Caldéens répondirent au roi, et dirent : Il n’y a aucun homme sur la terre, qui puisse satisfaire à ce que demande le Roi ; aussi n’y a-t-il aucun roi, ni seigneur, ni gouverneur qui ait jamais demandé une telle chose à quelque magicien, astrologue, ou Caldéen que ce soit.

11 Car ce que le Roi demande est si difficile, qu’il n’y a que les dieux, qui n’ont aucune communication avec la chair, qui puissent le révéler au Roi.

12 Sur cela le Roi se mit en colère et entra dans une grande indignation, et il commanda qu’on fît mourir tous les sages de Babylone.

13 La sentence fut donc publiée, et on tuait les sages ; et on cherchait Daniel et ses compagnons pour les faire mourir.

14 Alors Daniel détourna l’exécution du dessein et de l’arrêt qui avait été donné à Arjoc, prévôt de l’hôtel du Roi, lequel était sorti pour faire mourir les sages de Babylone.

15 Et il demanda, et dit à Arjoc, commissaire du Roi : Pourquoi la sentence est-elle si précipitée de la part du Roi ? Et Arjoc dit toute cette affaire à Daniel.

16 Et Daniel entra, et pria le Roi qu’il lui donnât quelque temps, et qu’il donnerait l’interprétation au Roi.

17 Alors Daniel alla dans sa maison, et informa de cette affaire Hanania, Misçaël, et Hazaria ses compagnons.

18 Et ils implorèrent la miséricorde du Dieu des cieux pour la révélation de ce secret, afin qu’on ne mît point à mort Daniel et ses compagnons, avec le reste des sages de Babylone.

19 Alors le secret fut révélé à Daniel dans une vision pendant la nuit ; et Daniel bénit le Dieu des cieux,

20 Et dit : Béni soit le nom de Dieu, depuis un siècle jusqu’à l’autre, car c’est à lui qu’est la sagesse et la force.

21 Et c’est lui qui change les temps et les saisons ; qui ôte les Rois, et qui établit les Rois ; qui donne la sagesse aux sages, et la connaissance à ceux qui ont de l’intelligence.

22 C’est lui qui découvre les choses profondes et cachées ; il connaît les choses qui sont dans les ténèbres, et la lumière demeure avec lui.

23 Ô Dieu de nos pères ! je te célèbre et je te loue, de ce que tu m’as donné de la sagesse et de la force, et de ce que tu m’as révélé maintenant ce que nous t’avons demandé, en nous faisant connaître ce que requiert le Roi.

24 C’est pourquoi Daniel alla vers Arjoc, que le Roi avait ordonné pour faire mourir les sages de Babylone ; et il lui parla ainsi : Ne fais pas mourir les sages de Babylone ; mais fais-moi entrer devant le Roi, et je donnerai au Roi l’interprétation de son songe.

25 Alors Arjoc fit promptement entrer Daniel devant le Roi, et il lui dit : J’ai trouvé un homme d’entre ceux qui ont été emmenés captifs de Juda, qui donnera au Roi l’interprétation de son songe.

26 Le Roi prit la parole, et dit à Daniel, qui s’appelait Beltesçatsar : Pourras-tu me dire le songe que j’ai eu, et m’en donner l’interprétation ?

27 Et Daniel répondit en la présence du Roi, et dit : Le secret que le Roi demande est tel, que ni les astrologues, ni les magiciens, ni les devins ne sauraient absolument le révéler au Roi.

28 Mais il y a un Dieu dans les cieux qui révèle les secrets, et qui a fait connaître au Roi Nébucadnésar ce qui doit arriver dans les temps à venir. Ton songe, et les visions de ta tête, que tu as eues, sur ton lit, sont telles :

29 Ô Roi ! il t’est monté des pensées sur ton lit, touchant ce qui arrivera ci-après, et celui qui révèle les secrets t’a déclaré ce qui doit arriver.

30 Et ce secret m’a été révélé, non point par quelque sagesse qui soit en moi, plus qu’en aucun des vivants ; mais afin d’en donner l’interprétation au Roi, et que tu connaisses les pensées de ton cœur.

31 Toi donc, ô Roi ! tu regardais, et tu voyais une grande statue, et cette grande statue dont la splendeur était extraordinaire, était debout devant toi, et son regard était terrible.

32 La tête de cette statue était d’or très fin ; sa poitrine et ses bras d’argent ; son ventre et ses hanches d’airain ;

33 ses jambes de fer, et ses pieds en partie de fer, et en partie de terre.

34 Tu la contemplais, lorsqu’une pierre fut détachée de la montagne sans main, qui frappa la statue dans ses pieds de fer et de terre, et les brisa.

35 Alors le fer, la terre, l’airain, l’argent et l’or furent brisés ensemble, et devinrent comme la paille de l’aire en été, que le vent jette çà et là ; et on n’en trouva plus rien en aucun lieu ; mais cette pierre qui avait frappé la statue devint une grande montagne, et remplit toute la terre.

36 C’est là le songe. Nous dirons maintenant son interprétation en la présence du roi.

37 Toi, ô Roi ! tu es le Roi des rois, parce que le Dieu des cieux t’a donné le royaume, la puissance, la force et la gloire.

38 Et il a mis en ta main les enfants des hommes, les bêtes des champs, et les oiseaux des cieux, en quelque lieu qu’ils habitent, et il t’a fait dominer sur eux tous ; c’est toi qui es la tête d’or.

39 Et après toi il s’élèvera un autre royaume moindre que toi ; puis un autre troisième royaume d'airain, qui dominera sur toute la terre.

40 Et le quatrième royaume sera comme le fer, parce que le fer brise et rompt toutes choses ; et comme le fer met en pièces toutes choses, ainsi ce royaume brisera et mettra tout en pièces.

41 Et ce que tu as vu que les pieds et les orteils étaient en partie de terre de potier, et en partie de fer, c’est que ce royaume sera divisé : il y aura bien en lui la force du fer, parce que tu as vu le fer mêlé avec la terre de potier ;

42 mais comme les orteils des pieds étaient en partie de fer, et en partie de terre, ce royaume sera en partie fort, et en partie fragile.

43 Et quant à ce que tu as vu le fer mêlé avec la terre de potier, c’est qu'ils se mêleront par des alliances humaines ; mais ils ne demeureront pas unis l’un avec l’autre, comme le fer ne peut pas s’allier avec la terre.

44 Et dans le temps de ces Rois le Dieu des cieux suscitera un royaume qui ne sera jamais détruit ; et ce royaume ne passera point à un autre peuple, mais il brisera et consumera tous ces royaumes-là, et il sera établi éternellement.

45 Comme tu as vu qu’une pierre de la montagne en a été détachée sans main, et qu’elle a brisé le fer, l’airain, la terre, et l’or ; le grand Dieu a fait connaître au Roi ce qui arrivera ci-après. Le songe est véritable, et son interprétation est certaine.

46 Alors le Roi Nébucadnésar tomba sur sa face, et se prosterna devant Daniel ; et il dit qu’on lui donnât de quoi faire des oblations et des offrandes de bonne odeur.

47 Le Roi parla aussi à Daniel, et lui dit : Certainement votre Dieu est le Dieu des dieux et le Seigneur des Rois, et il révèle les secrets, puisque tu as pu découvrir celui-ci.

48 Alors le Roi éleva en honneur Daniel, et lui fit beaucoup de grands présents, et l’établit gouverneur sur toute la province de Babylone, et le plus grand seigneur de tous ceux qui avaient la surintendance sur tous les sages de Babylone.

49 Et sur la demande que Daniel en fit au Roi, le Roi établit sur les affaires de la province de Babylone Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo ; mais Daniel était à la porte du Roi.

REFLEXIONS

Les réflexions qu’il faut faire sur ce chapitre sont les suivantes :

I. Dieu envoya un songe à Nébucadnésar et permit ensuite qu’il l’oubliât afin que Daniel lui en rappelant le souvenir, ce prince fut disposé par là à recevoir et à croire ce que Daniel lui dirait et qu’il reconnut que ce songe venait de Dieu qui seul connait l’avenir.

II. L’impuissance où les sages de Babylone furent de deviner ce songe montre que ces gens-là étaient des imposteurs et qu’il n’y a que le vrai Dieu qui puisse découvrir les choses cachées.

III. La promesse que Daniel fit au Roi de lui dire et de lui expliquer le songe qu’il avait eu, marque une foi admirable et une grande confiance en Dieu, vu que s’il n’avait pu le faire, il n’aurait pas évité la mort. Et puisque Dieu accorda aux prières de Daniel et de ses amis la révélation et l’interprétation du songe de Nébucadnésar, on voit par-là combien les prières des gens de bien ont de vertu. Mais ce qu’il y a principalement à observer ici, c’est l’interprétation de ce songe. Daniel dit qu’il y aurait quatre puissants empires qui se succèderaient.

Le premier était celui des Caldéens qui subsistait encore alors et dont Nébucadnésar était roi, mais qui devait bientôt finir.

Le second devait être celui des Perses et des Mèdes.

Le troisième celui d’Alexandre le grand et des grecs.

Pour ce qui est du quatrième empire :

Les uns veulent que ce soit celui des Rois de Syrie et d’Égypte qui régnèrent après Alexandre le grand et ils croient que ce qui est dit ici marque ce qui devait arriver aux Juifs sous ces Rois-là et en particulier sous le règne d’Antiochius Épiphane, le cruel persécuteur du peuple de Dieu,

D’autres prétendent que le quatrième empire est l’empire romain, se fondant principalement sur ce que devait être dans le temps cette quatrième domination que Dieu établirait son règne par Jésus-Christ. Et c’est ainsi que tous les anciens ont entendu cet oracle.

Ce qu’il y a de certain, c’est que ces empires se sont succédés les uns aux autres et qu’après toutes ces révolutions, le règne de Dieu a été manifesté par Jésus-Christ notre Seigneur.

On ne saurait assez admirer cette prophétie qui s’étend à tant de siècles. Elle servit autrefois, comme on le voit sur la fin de ce chapitre, à faire connaître le vrai Dieu parmi un peuple idolâtre et elle rendit le Roi de Babylone favorable aux Juifs.

Elle doit faire beaucoup plus d’impression sur nous qui en voyons l’accomplissement et nous convaincre pleinement qu’il y a un Dieu à qui l’avenir est parfaitement connu. Nous devons aussi en conclure que l’élévation et le renversement des royaumes et des états et les divers changements qui arrivent dans le monde procèdent de la providence qui a toujours en vue le bien de ceux qui le craignent et celui de l’église.

CHAPITRE III.

Le Roi Nébucadnésar fait faire une grande statue et commanda que chacun l’adore. Ce que les trois amis de Daniel n’ayant pas voulu faire, le Roi les fit jeter dans une fournaise ardente. Mais Dieu les y préserva miraculeusement en sorte que Nébucadnésar, frappé par cette merveille, reconnut et publia la puissance de Dieu.

1 Le Roi Nébucadnésar fit faire une statue d’or dont la hauteur était de soixante coudées, et la largeur de six coudées ; et il la dressa dans la campagne de Dura, dans la province de Babylone.

2 Et le Roi Nébucadnésar fit assembler les satrapes, les magistrats, les officiers, les intendants, les receveurs, les conseillers, les prévôts, et tous les gouverneurs des provinces, afin qu’ils vinssent à la dédicace de la statue qu’il avait dressée.

3 Ainsi les satrapes, les magistrats, les officiers, les intendants, les receveurs, les conseillers, les prévôts, et tous les gouverneurs des provinces furent assemblés pour la dédicace de la statue que le Roi Nébucadnésar avait dressée ; et ils se tenaient debout devant cette statue.

4 Alors un héraut cria à haute voix, et dit : On vous fait savoir, ô peuples de toutes nations et de toutes langues,

5 qu’à l’heure que vous entendrez le son de la trompette, du clairon, de la harpe, de la sambuque, du psaltérion, de la symphonie, et de toute sorte de musique, vous ayez à vous jeter bas et à vous prosterner devant la statue d’or que le Roi Nébucadnésar a dressée.

6 Et quiconque ne se sera pas jeté bas et ne se sera pas prosterné, sera jeté à cette même heure au milieu de la fournaise embrasée.

7 C’est pourquoi au même instant, aussitôt que tous les peuples entendirent le son de la trompette, du clairon, de la harpe, de la sambuque, du psaltérion, et de toute sorte de musique, tous les peuples, de quelque nation et de quelque langue qu’ils fussent, se jetèrent bas et se prosternèrent devant la statue d’or que le Roi avait dressée.

8 A cette occasion et dans le même temps certains Caldéens s’approchèrent et accusèrent les Juifs.

9 Et ils parlèrent au Roi Nébucadnésar, et lui dirent : O roi, vis à jamais !

10 O Roi ! tu as fait un édit, que tout homme qui aurait entendu le son de la trompette, du clairon, de la harpe, de la sambuque, du psaltérion, de la symphonie, et de toute sorte de musique, se jetât bas, et se prosternât devant la statue d’or ;

11 et que quiconque ne se serait pas jeté bas et ne se serait pas prosterné, serait jeté au milieu de la fournaise embrasée.

12 Or il y a certains Juifs que tu as établis sur les affaires de la province de Babylone, savoir, Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo ; ces gens-là, ô Roi ! n’ont eu aucun égard pour toi ; ils ne servent point tes dieux, et ils ne se prosternent point devant la statue d’or que tu as dressée.

13 Alors le Roi Nébucadnésar étant en colère et en fureur, commanda qu’on amenât Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo. Et ces gens-là furent amenés devant le roi.

14 Et le Roi Nébucadnésar prenant la parole leur dit : Est-il vrai, Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo, que vous ne servez pas mes dieux, et que vous ne vous prosternez pas devant la statue d’or que j’ai dressée.

15 Maintenant donc n’êtes-vous pas prêts, au moment que vous entendrez le son de la trompette, du clairon, de la harpe, de la sambuque, du psaltérion, de la symphonie, et de toute sorte de musique, de vous jeter bas et de vous prosterner devant la statue que j’ai faite ? Que si vous ne vous prosternez pas, vous serez jetés à cette même heure au milieu de la fournaise embrasée. Et qui est le Dieu qui vous délivrera de mes mains ?

16 Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo répondirent et dirent au Roi Nébucadnésar : Il n’est pas besoin que nous te répondions sur ce sujet-là.

17 Voici, notre Dieu que nous servons peut nous délivrer de la fournaise embrasée ; il peut même nous délivrer de ta main, ô Roi !

18 Que s’il ne trouve pas à propos de le faire, sache, ô Roi ! que nous ne servirons point tes dieux, et que nous ne nous prosternerons point devant la statue d’or que tu as dressée.

19 Alors Nébucadnésar fut rempli de fureur, et l’air de son visage fut changé contre Scadrac, Mesçac et Habed-Négo ; et il prit la parole et commanda qu’on allumât la fournaise sept fois autant qu’elle avait accoutumé d’être allumée.

20 Et il commanda aux hommes les plus forts et les plus vaillants qui fussent dans son armée, de lier Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo, pour les jeter dans la fournaise de feu ardent.

21 En même temps ces hommes-là furent liés avec leurs caleçons, leurs chaussures, leurs tiares et leurs vêtements, et ils furent jetés au milieu de la fournaise embrasée.

22 Et comme l’ordre du Roi était pressant, et que la fournaise était extraordinairement allumée, la flamme tua les hommes qui y avaient jeté Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo.

23 Et ces trois hommes-là, savoir, Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo tombèrent tout liés au milieu de la fournaise embrasée.

24 Alors le Roi Nébucadnésar fut étonné, et il se leva tout d’un coup, et il prit la parole et dit à ses conseillers : N’avons-nous pas jeté trois hommes au milieu du feu, tout liés ? Ils répondirent au Roi : Il est vrai, ô Roi !

25 Et le Roi leur dit : Voici, je vois quatre hommes déliés, qui marchent au milieu du feu, et ils n’en sont point endommagés, et la forme du quatrième est semblable à un fils de Dieu.

26 Alors Nébucadnésar s’approcha vers l’entrée de la fournaise du feu ardent, et il prit la parole et dit : Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo, serviteurs du Dieu souverain, sortez et venez. Alors Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo sortirent du milieu du feu.

27 Puis les satrapes, les magistrats, les gouverneurs et les conseillers du Roi s’assemblèrent pour considérer ces hommes-là, sur le corps desquels le feu n’avait eu aucune puissance, de sorte qu’aucun cheveu de leur tête n’était grillé, que leurs caleçons n’étaient point changés, et que l’odeur du feu n’avait pas même passé sur eux.

28 Alors Nébucadnésar prit la parole et dit : Béni soit le Dieu de Sçadrac, de Mesçac et d’Habed-Négo, lequel a envoyé son ange, et a délivré ses serviteurs qui ont eu espérance en lui, et qui ont violé l’édit du Roi, et ont abandonné leurs corps, afin de ne servir aucun dieu que leur Dieu, et de ne se prosterner devant aucun autre.

29 De ma part donc est fait un édit : Que tout homme, de quelque nation et langue qu’il soit, qui dira quelque chose de mal convenable contre le Dieu de Sçadrac, de Mesçac et d’Habed-Négo, soit mis en pièces, et que sa maison soit réduite en voirie, parce qu’il n’y a aucun Dieu qui puisse délivrer comme lui.

30 Alors le Roi avança Sçadrac, Mesçac et Habed-Négo dans la province de Babylone.

REFLEXIONS

Dans la mémorable histoire qui est ici rapportée, il y a ces quatre choses à remarquer :

I. La folie, l’orgueil et l’impiété de Nébucadnésar, qui commanda à tous ses sujets, sous peine de mort, d’adorer la statue d’or qu’il avait fait faire. On voit en cela que l’idolâtrie et la superstition est toujours extravagante et cruelle et nous avons en Nébucadnésar une image des princes orgueilleux idolâtres et persécuteurs.

II. On voit ici l’admirable constance et la généreuse résolution des trois Hébreux qui répondirent sans hésiter qu’ils aimaient mieux être jetés dans la fournaise que d’obéir au commandement du Roi.

C’est là un illustre exemple de foi et de constance qui fait voir que les gens de bien ne sont jamais retenus par la crainte des hommes lorsqu’il s’agit d’être fidèles à Dieu, ils ne délibèrent point sur le parti qu’ils ont à prendre dans ces occasions et ils sont toujours prêts à exposer courageusement leur vie pour sa gloire et pour maintenir la vérité.

III. Ceux qui jetèrent les trois amis de Daniel dans la fournaise furent consumés par les flammes et les trois Hébreux y furent miraculeusement conservés par l’ange du Seigneur. Ce fut ainsi que Dieu voulut punir les Caldéens idolâtres et cruels, leur faire sentir sa puissance, rendre le miracle qu’il fit en faveur des trois Hébreux plus certain et plus sensible et récompenser la fidélité et le zèle de ses serviteurs qui avaient exposés leur vie pour l’amour de lui. St. Paul attribue en particulier cette merveilleuse délivrance à la foi des trois amis de Daniel lorsqu’il dit : que ce fut par la foi qu’ils éteignirent la force du feu.

Reconnaissons par-là que la foi est d’une grande efficace, que Dieu ne manque jamais de puissance pour délivrer ceux qui souffrent à cause de lui, qu’il est avec eux dans les plus grands dangers et qu’il peut toujours leur en donner une heureuse issue.

Enfin, le zèle que Nébucadnésar témoigna pour la gloire du Dieu que Daniel adorait, les hommages qu’il lui rendit et les louanges qu’il donna à la fidélité des trois Hébreux doivent nous inciter à reconnaître et à adorer la puissance de ce grand Dieu qui seul fait des choses merveilleuses et qui déploie son pouvoir en faveur de ceux qui le craignent et qui mettent leur espérance en lui.

La conduite de ce prince païen doit aussi engager les princes et les magistrats chrétiens à honorer Dieu, à faire révérer la religion, à réprimer l’impiété et les outrages qui sont faits à la majesté divine.

CHAPITRE IV.

Ce chapitre a trois parties : I. La première contient le récit d’un songe dans lequel le Roi Nébucadnésar vit un grand arbre dont les branches furent coupées. II. La seconde comprend l’interprétation que Daniel donna de ce songe en disant au Roi qu’il allait être chassé de son royaume, mais qu’il y serait rétabli. III. Dans la troisième, on voit l’accomplissement de tout ce que Daniel avait prédit à Nébucadnésar.

1 Le Roi Nébucadnésar à tous les peuples et aux nations de toutes langues qui habitent dans toute la terre : Que votre paix soit multipliée !

2 Il m’a semblé bon de vous informer des signes et des merveilles que le Dieu souverain a faits envers moi.

3 Oh ! que ses signes sont grands, et que ses merveilles sont faites avec force ! Son règne est un règne éternel, et sa puissance est de génération en génération.

4 Moi Nébucadnésar, j’étais tranquille dans ma maison, et florissant dans mon palais.

5 Je fis un songe qui m’épouvanta, et les pensées que j’eus dans mon lit, et les visions de ma tête me troublèrent.

6 Et un édit fut fait de ma part, pour faire venir tous les sages de Babylone, afin qu’ils me donnassent l’interprétation du songe.

7 Les mages, les astrologues, les Caldéens et les devins vinrent donc, et je récitai le songe devant eux ; mais ils ne purent m’en donner l’interprétation.

8 Mais à la fin Daniel, qui s’appelle Beltesçatsar, selon le nom de mon dieu, et dans lequel est l’esprit des dieux saints, entra devant moi, et je récitai le songe en sa présence et je lui dis :

9 Beltesçatsar, chef des mages, comme je connais que l’esprit des dieux saints est en toi, et que nul secret ne t’est difficile, écoute les visions que j’ai eues en songe, et dis-m’en l’interprétation.

10 Les visions donc de ma tête sur mon lit étaient telles : Je voyais un arbre au milieu de la terre, dont la hauteur était grande.

11 Cet arbre-là était devenu grand et fort, et sa cime touchait les cieux, et il se faisait voir jusqu’au bout de toute la terre.

12 Son branchage était beau et son fruit abondant, et il y avait de quoi manger pour tous ; les bêtes des champs se mettaient à l’ombre sous lui, et les oiseaux des cieux se tenaient dans ses branches, et toute chair en était nourrie.

13 Dans ces visions de ma tête, sur mon lit, je regardais, et voici, un veillant et un saint descendit des cieux,

14 et il cria à haute voix, et dit : Coupez l’arbre et l’ébranchez ; jetez çà et là ses branches et répandez son fruit ; que les bêtes s’écartent de dessous, et les oiseaux d’entre ses branches.

15 Toutefois laissez le tronc de ses racines dans la terre ; qu’il soit lié avec des liens de fer et d’airain, parmi l’herbe des champs, et qu’il soit arrosé de la rosée des cieux, et qu’il ait sa portion avec les bêtes dans l’herbe ;

16 que son cœur soit changé pour n’être plus un cœur d’homme, et qu’on lui donne un cœur de bête, et que sept temps passent sur lui.

17 La chose est arrêtée par le décret des veillants, et la sentence par la parole des saints, afin que les vivants connaissent que le Souverain domine sur les royaumes des hommes, et qu’il les donne à qui il lui plaît et y établit le plus abject des hommes.

18 Moi Nébucadnésar roi, j’ai eu ce songe ; toi donc Beltesçatsar, donnes-en l’interprétation ; car aucun des sages de mon royaume ne me la peut donner ; mais pour toi, tu le peux ; car l’esprit des dieux saints est en toi.

19 Alors Daniel, duquel le nom était Beltesçatsar, demeura tout étonné environ une heure, et ses pensées le troublaient ; et le Roi prenant la parole lui dit : Beltesçatsar, que le songe ni son interprétation ne te troublent point. Beltesçatsar lui répondit : O mon seigneur ! que le songe arrive à ceux qui te haïssent, et son interprétation à tes ennemis !

20 L’arbre que tu as vu, qui était devenu grand et fort, dont la cime touchait les cieux, et qui se faisait voir par toute la terre ;

21 et dont le branchage était beau, et le fruit abondant, et auquel il y avait de quoi manger pour tous, sous lequel les bêtes des champs demeuraient, et dans les branches duquel les oiseaux des cieux se tenaient ;

22 c’est toi, ô Roi ! qui es devenu grand et puissant, de sorte que ta grandeur s’est accrue, et qu’elle s’est élevée jusqu’aux cieux, et que ta domination s’est étendue jusqu’au bout de la terre.

23 Mais ce que le Roi a vu un veillant et un saint, qui descendait des cieux et disait : Coupez l’arbre et l’ébranchez ; toutefois laissez le tronc de ses racines dans la terre, et qu’il soit lié avec des liens de fer et d’airain parmi l’herbe des champs, qu’il soit arrosé de la rosée des cieux, et qu’il ait sa portion avec les bêtes des champs, jusqu’à ce que sept temps soient passés sur lui :

24 c’est ici l’interprétation, ô Roi ! et c’est le décret du Souverain, de ce qui arrivera au Roi mon seigneur.

25 C’est qu’on te chassera d’entre les hommes, et ton habitation sera avec les bêtes des champs ; et tu seras nourri d’herbe comme les bœufs, et tu seras arrosé de la rosée des cieux, et sept temps passeront sur toi, jusqu’à ce que tu connaisses que le souverain domine sur le règne des hommes, et qu’il le donne à qui il lui plaît.

26 Mais ce qui a été dit, qu’on laissât le tronc des racines de cet arbre, cela marque que ton royaume te sera rendu, dès que tu auras connu que les cieux dominent.

27 C’est pourquoi, ô Roi ! agrée mon conseil, et rachète tes péchés par la justice, et tes iniquités en faisant miséricorde aux pauvres ; voici, ce sera une prolongation à ta prospérité.

28 Toutes ces choses arrivèrent au Roi Nébucadnésar.

29 Au bout de douze mois il se promenait sur le palais royal de Babylone ;

30 et le Roi prenant la parole dit : N’est-ce pas ici la grande Babylone, que j’ai bâtie pour être la demeure royale, par le pouvoir de ma force, et pour la gloire de ma magnificence ?

31 La parole était encore dans la bouche du roi, quand une voix vint des cieux, qui dit : Roi Nébucadnésar, on te fait savoir que ton règne t’est ôté ;

32 et on te chassera d’entre les hommes, et ton habitation sera avec les bêtes des champs ; tu seras nourri d’herbe comme les bœufs, et sept temps passeront sur toi, jusqu’à ce que tu connaisses que le Souverain domine sur les royaumes des hommes, et qu’il les donne à qui il lui plaît.

33 A cette même heure-là cette parole fut accomplie sur Nébucadnésar ; il fut chassé d’entre les hommes, et il mangea l’herbe comme les bœufs ; son corps fut arrosé de la rosée des cieux, en sorte que son poil crût comme les plumes d’un aigle, et ses ongles comme ceux des oiseaux.

34 Mais à la fin de ces jours-là, moi Nébucadnésar, je levai mes yeux vers les cieux, et mon sens me revint ; et je bénis le Souverain, et je louai et j’honorai celui qui vit éternellement, dont la puissance est une puissance éternelle, dont le règne est de génération en génération ;

35 devant qui tous les habitants de la terre sont estimés un néant, et qui fait ce qui lui plaît, tant dans l’armée des cieux, que parmi les habitants de la terre ; et il n’y a personne qui empêche sa main, et qui lui dise : Qu’as-tu fait ?

36 En ce temps-là mon sens me revint, et je retournai à la gloire de mon royaume, et ma majesté et ma splendeur me furent rendues ; mes conseillers et mes grands me redemandèrent ; et je fus rétabli dans mon royaume, et une plus grande magnificence me fut ajoutée.

37 Maintenant donc, moi Nébucadnésar, je loue, j’exalte, et je glorifie le Roi des cieux, duquel toutes les œuvres sont véritables, et les voies justes, et qui peut abaisser ceux qui marchent avec orgueil.

REFLEXIONS

Cette histoire renferme diverses instructions :

I. Ce qui arriva à Nébucadnésar lorsqu’il était dans sa plus grande gloire nous apprend que la prospérité est un état dangereux, que l’on tombe aisément dans l’orgueil et dans la sécurité quand on est dans l’élévation et dans l’abondance et que c’est alors que l’on est le plus menacé des jugements de Dieu, l’orgueil allant ordinairement devant la ruine.

II. Il faut remarquer en second lieu, que, comme Dieu s’était autrefois révélé extraordinairement à Pharaon dans un songe, il voulut aussi se révéler à Nébucadnésar par un songe qui l’instruisait de ce qui devait lui arriver et qui lui fut expliqué par Daniel, afin que ce prince reconnût que son abaissement procédait de Dieu.

C’est ainsi que le Seigneur, par un effet de sa bonté, fait avertir les hommes des malheurs qui les menacent et qu’il leur enseigne en même temps les moyens de les prévenir.

III. Le conseil que Daniel donna au Roi de racheter ses péchés par des aumônes nous apprend qu’il faut réparer par toutes les voies possibles les péchés qu’on a commis et qu’en particulier les œuvres de charité ont une grande efficace pour fléchir la colère de Dieu quand elles procèdent d’une vraie repentance.

IV. On doit bien considérer la punition de Nébucadnésar qui fut chassé de son royaume, privé de son bon sens et réduit à l’état des bêtes, ce prince étant tombé dans la manie et dans une mélancolie noire qui l’abrutit pour un temps et qui l’éloigna du commerce des hommes. Cet événement, dont les historiens païens font mentions fut dispensé, comme cela est dit dans ce chapitre et comme ce Roi le confessa afin que les hommes reconnussent que le Dieu souverain domine sur les Rois, qu’il fait tout ce qu’il veut, qu’il élève et qu’il abaisse ceux qu’il lui plaît et surtout qu’il est juste et qu’il confond les orgueilleux.

V. Enfin, Nébucadnésar revint à lui-même, il s’humilia, il donna même des marques publiques de la crainte qu’il avait du vrai Dieu en ordonnant à tous ses sujets de le révérer et alors aussi il fut rétabli dans son royaume.

Voilà comment les châtiments de Dieu servent à faire rentrer les hommes dans leur devoir et à leur procurer le retour de sa faveur.

Au reste, la reconnaissance solennelle que Nébucadnésar fit de la grandeur de Dieu et de sa justice. Instruit les princes et les grands du monde de l’obligation où ils sont de rendre à Dieu leurs hommages et de procurer de tout leur pouvoir l’avancement de sa gloire.

CHAPITRE V.

Le Roi Belsçatsar étant à table, dans le temps que Babylone était assiégée par les Mèdes, et profanant les vaisseaux sacrés du temple de Jérusalem, voit une main qui écrivait sur la paroi l’arrêt de sa mort, comme Daniel le lui expliqua. Cet arrêt s’exécuta sur l’heure, Belsçatsar ayant été tué en cette même nuit et Babylone prise par Darius. Par ce moyen la monarchie des Caldéens passa aux Mèdes et aux Perses, selon que Daniel et les autres prophètes l’avaient prédit.

1 Le Roi Belsçatsar fit un grand festin à mille de ses principaux seigneurs, et il buvait le vin devant ces personnes-là.

2 Et ayant un peu bu, il commanda qu’on apportât les vaisseaux d’or et d’argent, que Nébucadnésar son père avait tirés du temple de Jérusalem ; afin que le Roi, et ses gentilshommes, ses femmes, et ses concubines bussent dedans.

3 Alors on apporta les vaisseaux d’or qu’on avait tirés du temple de la maison de Dieu, qui était à Jérusalem ; et le Roi, et ses gentilshommes, ses femmes, et ses concubines y burent.

4 Ils y burent du vin, et ils louèrent leurs dieux d’or, d’argent, d’airain, de fer, de bois, et de pierre.

5 A cette même heure-là des doigts d’une main d’homme sortirent, qui écrivaient devant le chandelier, sur l’enduit de la muraille du palais royal, et le Roi voyait cette partie de main qui écrivait.

6 Alors le visage du Roi fut changé, et ses pensées le troublèrent, et les jointures de ses reins se relâchèrent, et ses genoux heurtaient l’un contre l’autre.

7 Et le Roi cria à haute voix qu’on fît venir les astrologues, les Caldéens, et les devins ; et le Roi dit aux sages de Babylone : Quiconque lira cette écriture, et m’en donnera l’interprétation, sera vêtu d’écarlate, et il aura un collier d’or au cou et dominera sur la troisième partie du royaume.

8 Alors tous les sages du Roi entrèrent ; mais ils ne purent lire l’écriture, ni en donner au Roi l’interprétation.

9 de sorte que le Roi Belsçatsar fut fort troublé, et son visage fut changé : et ses principaux seigneurs furent aussi éperdus.

10 Et la reine entra dans la maison du festin, à cause de ce qui était arrivé au Roi et à ses principaux seigneurs ; et la reine parla et dit : Roi, vis à jamais ; que tes pensées ne te troublent point ; et que ton bon visage ne se change point.

11 Il y a un homme dans ton royaume, en qui est l’esprit des dieux saints ; et dans les temps de ton père on trouva en lui une lumière, une intelligence et une sagesse semblables à la sagesse des dieux ; et le Roi Nébucadnésar ton père, ton père lui-même, ô Roi ! l’établit chef des mages, des astrologues, des Caldéens, et des devins ;

12 parce qu’on trouve en lui, savoir, en Daniel, auquel le Roi imposa le nom de Beltesçatsar, un plus grand esprit et plus de connaissance et d’intelligence, pour interpréter les songes, et expliquer les questions obscures, et résoudre les choses difficiles. Maintenant donc, que Daniel soit appelé, et il en donnera l’interprétation.

13 Alors Daniel fut amené devant le Roi ; et le Roi, prenant la parole, dit à Daniel : Es-tu ce Daniel qui est d’entre ceux qui ont été emmenés captifs de Juda, que le Roi mon père a fait emmener de Juda ?

14 J’ai ouï dire de toi, que l’esprit des dieux saints est en toi, et qu’on a trouvé en toi une lumière, une intelligence, et une sagesse singulière.

15 Et maintenant les sages et les astrologues ont été amenés devant moi, afin qu’ils lussent cette écriture, et qu’ils m’en donnassent l’interprétation, mais ils ne peuvent point me la donner.

16 Mais j’ai ouï dire de toi, que tu peux expliquer et résoudre les choses difficiles. Maintenant donc, si tu peux lire cette écriture, et m’en donner l’interprétation, tu seras vêtu d’écarlate, et tu porteras au cou un collier d’or, et tu domineras sur la troisième partie du royaume.

17 Alors Daniel répondit, et dit devant le Roi : Que tes dons te demeurent, et donne tes présents à un autre ; cependant je lirai l’écriture au roi, et je lui en donnerai l’interprétation.

18 Ô Roi ! le Dieu souverain avait donné à Nébucadnésar ton père ce royaume, cette magnificence, cette gloire et cet honneur.

19 Et à cause de la grandeur qu’il lui avait donnée, tous les peuples et les nations de toutes langues tremblaient devant lui et le redoutaient ; car il faisait mourir ceux qu’il voulait, et il sauvait la vie à ceux qu’il voulait, et il élevait ceux qu’il voulait, et il abaissait ceux qu’il voulait.

20 Mais son cœur s’étant élevé, et son esprit s’étant affermi dans son orgueil, il fut déposé de son trône royal, et on le dépouilla de sa gloire ;

21 et il fut chassé d’entre les hommes ; son cœur fut rendu semblable à celui des bêtes, et son habitation fut avec les ânes sauvages ; il fut nourri d’herbe, comme les bœufs, et son corps fut arrosé de la rosée des cieux, jusqu’à ce qu’il connût que le Dieu souverain a puissance sur les royaumes des hommes, et qu’il y établit qui il lui plaît.

22 Toi aussi Belsçatsar, qui es son fils, tu n’as point humilié ton cœur, quoique tu susses toutes ces choses ;

23 mais tu t’es élevé contre le Seigneur des cieux, et on a apporté les vaisseaux de sa maison devant toi, et vous y avez bu du vin, toi, et tes principaux seigneurs, tes femmes, et tes concubines, et tu as loué les dieux d’argent, d’or, d’airain, de fer, de bois, et de pierre, qui ne voient, ni n’entendent, ni ne connaissent point ; et tu n’as pas glorifié le Dieu qui a ton souffle et toutes tes voies dans sa main.

24 C’est pourquoi cette partie de main a été envoyée de sa part, et cette écriture a été écrite.

25 Or, c’est ici l’écriture qui a été écrite : MENE’ MENE’ THEKEL UPHARSIN.

26 Et voici l’interprétation de ces paroles : MENÉ, Dieu a calculé ton règne, et il y a mis fin.

27 THEKEL, tu as été pesé dans la balance, et tu as été trouvé léger.

28 PERES, ton royaume a été divisé, et a été donné aux Mèdes et aux Perses.

29 Alors, par le commandement de Belsçatsar, on vêtit Daniel d’écarlate, et on lui mit au cou un collier d’or, et on publia qu’il dominerait sur la troisième partie du royaume.

30 Cette même nuit-là, Belsçatsar, Roi de Caldée, fut tué.

31 Et Darius de Méde prit possession du royaume, étant âgé environ de soixante et deux ans.

REFLEXIONS

C’est une histoire tout à fait mémorable que celle qui est récitée dans ce chapitre et voici ce qu’il faut principalement remarquer :

I. C’est que dans le temps que le Roi Belsçatsar faisait un grand festin aux seigneurs de son royaume, qu’il se livrait à la joie et qu’il déshonorait le vrai Dieu en buvant dans les vaisseaux sacrés du temple de Jérusalem en l’honneur des idoles, Dieu fit paraître une main qui écrivait sa condamnation, afin que ce prodige et que l’explication que Daniel en donna persuadât ces peuples idolâtres que le même Dieu dont Nébucadnésar, aïeul de Belsçatsar, avait détruit le temple allait renverser l’empire des Caldéens.

II. Le trouble extrême et l’inquiétude que Belsçatsar ressentit à la vue de cette main fait voir que rien n’est plus faible, ni plus craintif qu’une mauvaise conscience et que le jugement de Dieu surprend les méchants lorsqu’ils croient être le plus en sûreté.

III. Il faut observer que Daniel reprocha au Roi de n’avoir pas profité des châtiments que Dieu avait envoyé à Nébucadnésar son grand-père, d’avoir persévéré dans son orgueil et de s’être élevé contre Dieu en profanant les vases du temple de Jérusalem et en louant ses idoles, au lieu de donner gloire à Dieu. C’est là un effet visible de la justice divine sur ceux dont le cœur s’enfle dans la prospérité, sur les profanes et les impies, qui au lieu de révérer celui de qui ils tiennent la vie et toutes choses, ont l’audace de s’élever contre lui et sur ceux qui ne profitent pas des avertissements que Dieu leur donne, des châtiments dont il les visite et des exemples qu’ils ont devant les yeux.

IV. Enfin, la mort de Belsçatsar et la ruine de l’empire des Babyloniens qui passa aux Mèdes et aux Perses est un événement d’autant plus remarquable qu’il avait été annoncé à l’avance, non seulement par Daniel, mais aussi par Ésaïe, par Jérémie et par les autres prophètes qui avaient prédit expressément que Babylone serait prise dans une nuit que le Roi et les principaux se livreraient à la joie, ce qui est aussi confirmé par les historiens profanes.

Ainsi nous devons reconnaître dans ce récit la divinité des livres sacrés et la vérité de la religion et y adorer la puissance de Dieu, sa connaissance infinie et les merveilles de sa providence qui dirige avec tant de sagesse, de justice et de bonté tout ce qui arrive dans le monde.

CHAPITRE VI.

Daniel est élevé par le Roi Darius à de grands honneurs, de quoi les seigneurs du royaume étant jaloux, obtiennent un édit qui défendait de faire aucune prière pendant trente jours à quelque Dieu ou à quelque homme que ce fût, sinon au Roi. Mais Daniel, ayant continué à adorer Dieu publiquement, comme il avait accoutumé, fut accusé d’avoir violé l’édit du Roi et fut jeté dans la fosse aux lions où Dieu le garantit miraculeusement. Le Roi, frappé de cette merveille, commande que le Dieu de Daniel soit adoré de tout le monde.

1 Il plut à Darius d’établir cent vingt satrapes sur le royaume, pour être sur tout le royaume.

2 Et il mit au-dessus d’eux trois gouverneurs, dont Daniel était l’un, auxquels ces satrapes rendissent compte, afin que le Roi ne souffrît point de dommage.

3 Mais Daniel était au-dessus des autres gouverneurs et satrapes, parce qu’il y avait plus d’esprit en lui ; et le Roi pensait à l’établir sur tout le royaume.

4 Et les gouverneurs et les satrapes tâchaient de trouver quelque occasion d’accuser Daniel, au sujet des affaires du royaume ; mais ils n’en pouvaient trouver aucune occasion ; car il était fidèle, et il ne se trouvait en lui aucun crime, ni aucune faute.

5 Ces hommes dirent donc : Nous ne trouverons point d’occasion contre ce Daniel, à moins que nous ne la trouvions contre lui dans la loi de son Dieu.

6 Alors ces gouverneurs et ces satrapes s’assemblèrent, et vinrent vers le Roi, et ils lui dirent : Roi Darius, vis à jamais !

7 Tous les gouverneurs de ton royaume, les magistrats, les satrapes, les conseillers, et les capitaines ont été d’avis d’établir une ordonnance royale, et de faire un décret ferme, que quiconque fera aucune prière à quelque Dieu ou à quelque homme que ce soit, pendant trente jours, sinon à toi, ô Roi ! sera jeté dans la fosse des lions.

8 Maintenant donc, ô Roi ! confirme cet édit, et fais-en écrire des patentes, afin qu’on ne le change point, selon que la loi des Mèdes et des Perses est irrévocable.

9 C’est pourquoi le Roi Darius écrivit la lettre et l’édit.

10 Cependant, Daniel ayant appris que ces lettres étaient écrites, entra dans sa maison, et les fenêtres de sa chambre étant ouvertes du côté de Jérusalem, il se mettait trois fois le jour à genoux, et priait et célébrait son Dieu comme il faisait auparavant.

11 Et ces hommes s’assemblèrent, et trouvèrent Daniel qui priait et qui faisait requête à son Dieu.

12 Alors ils s’approchèrent, et dirent au roi, au sujet de l’édit royal : N’as-tu pas ordonné par un édit, que tout homme qui ferait requête à quelque Dieu ou à quelque homme que ce fût pendant trente jours, sinon à toi, ô Roi ! serait jeté dans la fosse des lions ? Et le Roi répondit et dit : La chose est constante, selon la loi des Mèdes et des Perses, qui est irrévocable.

13 Alors ils dirent au Roi : Daniel, qui est de ceux qui ont été amenés captifs de Juda, n’a eu aucun égard pour toi, ô Roi ! ni pour l’édit que tu as donné ; mais il prie et fait sa requête trois fois le jour.

14 Alors le Roi ayant entendu cela, en eut en lui-même un fort grand déplaisir, et prit à cœur de délivrer Daniel, et il travailla jusqu’au soleil couché à le délivrer.

15 Mais ces hommes-là s’assemblèrent vers le roi, et lui dirent : O Roi ! sache que la loi des Mèdes et des Perses est telle, que tout décret et ordonnance que le roi aura établie, ne se doit point changer.

16 Alors le Roi commanda qu’on amenât Daniel, et qu’on le jetât dans la fosse des lions. Et le Roi prenant la parole dit à Daniel : Ton Dieu que tu sers sans cesse est celui qui te délivrera.

17 Et on apporta une pierre qui fut mise sur l’ouverture de la fosse, et le Roi la scella de son anneau, et de l’anneau de ses principaux seigneurs, afin qu’on ne changeât rien à l’égard de Daniel.

18 Alors le Roi s’en alla dans son palais, et il passa la nuit sans souper, et on ne lui fit point venir des instruments de musique, même il ne put point dormir.

19 Et le Roi se leva au point du jour, dès qu’il commença à luire, et il s’en alla en diligence vers la fosse des lions.

20 Et comme il approchait de la fosse, il appela Daniel d’une voix triste ; Daniel, dit-il, serviteur du Dieu vivant, ton Dieu que tu sers sans cesse, te pourrait-il avoir délivré des lions ?

21 Alors Daniel, dit au Roi : Ô roi, vis à jamais !

22 Mon Dieu a envoyé son ange, et il a fermé la gueule des lions, et ils ne m’ont fait aucun mal, parce que j’ai été trouvé innocent ; et même, ô Roi ! je n’ai commis aucune faute à ton égard.

23 Alors le Roi fut extrêmement réjoui, et il commanda qu’on tirât Daniel de la fosse. Et on ne trouva en lui aucune blessure, parce qu’il avait cru en son Dieu.

24 Et par le commandement du Roi, ces hommes qui avaient accusé Daniel, furent amenés et jetés dans la fosse des lions, eux, leurs enfants, et leurs femmes ; mais avant qu’ils fussent venus jusqu’au pavé de la fosse, les lions s’en rendirent maîtres et brisèrent tous leurs os.

25 Alors le Roi Darius écrivit des lettres de telle teneur : A tous peuples et nations de toutes langues qui habitent sur toute la terre : Que votre paix soit multipliée !

26 Un édit est fait de ma part, que, dans toute l’étendue de mon royaume, on ait de la crainte et de la frayeur pour le Dieu de Daniel ; car c’est le Dieu vivant, et qui demeure à toujours ; et son royaume ne sera point dissipé, et sa domination sera jusqu’à la fin.

27 Il sauve et il délivre, et il fait des prodiges et des merveilles dans les cieux et sur la terre, tellement qu’il a délivré Daniel de la puissance des lions.

28 Ainsi Daniel prospéra sous le règne de Darius, et sous le règne de Cyrus, Roi de Perse.

REFLEXIONS

Il y a d’importantes réflexions à faire sur ce chapitre :

I. La fidélité avec laquelle Daniel servit le Roi Darius apprend à tous ceux qui sont dans les charges publiques à les exercer avec intégrité.

II. Dans l’édit que Darius donna à la sollicitation des ennemis de Daniel, on remarque d’un côté la folie et l’impiété d’un prince qui veut se faire adorer comme un dieu et de l’autre les maux qui arrivent par l’envie et la jalousie et combien il est dangereux d’écouter ceux qui emploient la calomnie, la ruse et la violence pour perdre les innocents.

III. L’on voit ici le zèle de Daniel. Il avait été religieux et dévot dans sa plus haute fortune, il l’est encore lorsqu’il est menacé. L’édit du Roi ne l’intimide point, il continue à adorer son Dieu et il le fait publiquement, sans craindre le danger auquel il s’exposait par-là, de peur que s’il l’eut fait en secret, on n’eut cru qu’il dissimulait sa croyance et qu’il obéissait à l’ordre que le Roi avait donné.

C’est dans des occasions semblables qu’il faut faire une profession publique de sa foi sans user d’aucune dissimulation et sans trahir sa conscience par la crainte qu’on pourrait avoir des hommes.

IV. Il est à remarquer que Darius eut la faiblesse de consentir à la mort de Daniel, bien qu’il le crût innocent. Dieu ne voulut pas garantir son serviteur par le moyen du Roi Darius, mais il permit qu’on le jetât aux lions pour être dévoré, parce qu’il voulait le délivrer lui-même d’une manière plus magnifique en envoyant son ange. L’Écriture dit que Daniel fut ainsi préservé

parce qu’il avait été trouvé innocent et qu’il avait cru en son Dieu.

Ce fut là une récompense bien glorieuse de sa fidélité et un effet admirable de sa foi, comme Saint Paul le remarque dans l’épître aux Hébreux.

C’est ainsi que Dieu protège les siens. Il semble quelquefois les abandonner, jusque-là qu’on croirait qu’il n’y a plus de ressource pour eux, mais il les tire heureusement de toutes leurs épreuves.

V. Une cinquième réflexion qu’il faut faire est que les lions ne touchent point Daniel et que ses ennemis sont dévorés sur le champ. Cela rend la protection de Dieu sur Daniel plus sensible et c’est ainsi que Dieu fait retomber sur les méchants le mal qu’il voulait faire aux autres.

VI. Enfin, la reconnaissance solennelle que Darius fit de la grandeur de Dieu nous engage à adorer la bonté, la justice et la toute-puissance du Seigneur et à publier ses œuvres merveilleuses. Il faut aussi admirer les voies de la providence qui se servit de l’édit de ce monarque, de ceux de Nébucadnésar et de plusieurs autres princes païens pour répandre sa connaissance dans ces pays-là où l’idolâtrie régnait. C’est sur quoi les princes chrétiens doivent faire une attention particulière s’ils ne veulent pas que ces Rois idolâtres s’élèvent en jugement contre eux.

CHAPITRE VII.

Daniel rapporte dans ce chapitre une vision qu’il eut de quatre bêtes. Et l’explication qu’un ange lui donna de cette vision en lui disant qu’il y aurait quatre grands empires et que, dans le temps du quatrième, le règne de Dieu s’établirait.

1 La première année du règne de Belsçatsar, Roi de Babylone, Daniel étant sur son lit, fit un songe, et eut des visions dans sa tête, et il écrivit le songe, et il en dit le sommaire.

2 Daniel donc parla et dit : Je regardais de nuit dans ma vision : et voilà les quatre vents des cieux qui donnaient sur la grande mer.

3 Ensuite quatre grandes bêtes montèrent de la mer, différentes l’une de l’autre.

4 La première était comme un lion, et elle avait des ailes d’aigle ; et je la regardai, jusqu’à ce que les plumes de ses ailes fussent arrachées, et qu’elle se fût levée de terre, et dressée sur ses pieds comme un homme, et qu’un cœur d’homme lui fût donné.

5 Et voici une seconde bête semblable à un ours, laquelle se tenait sur un côté, et avait trois crocs dans sa gueule parmi ses dents ; et on lui disait : Lève-toi, mange beaucoup de chair.

6 Après celle-là, je regardai, et en voici une autre semblable à un léopard, qui avait sur son dos quatre ailes d’oiseaux ; et cette bête avait quatre têtes, et la domination lui fut donnée.

7 Après celle-là je regardais dans mes visions de la nuit, et voici une quatrième bête, qui était épouvantable, terrible, et très forte, elle avait de grandes dents de fer ; elle dévorait et elle brisait et foulait à ses pieds ce qui restait ; elle était différente de toutes les bêtes qui avaient été avant elle, et elle avait dix cornes.

8 Je considérais ces cornes-là, et voici une autre petite corne qui montait du milieu des autres, et trois des premières cornes furent arrachées devant elle, et voici, des yeux semblables aux yeux d’un homme étaient dans cette corne, et une bouche qui disait de grandes choses.

9 Je regardais jusqu’à ce que des trônes furent placés, et que l’ancien des jours s’assit ; son vêtement était blanc comme de la neige, et les cheveux de sa tête étaient comme de la laine la plus fine ; son trône était comme des flammes de feu, et ses roues comme un feu ardent.

10 Un fleuve de feu se répandait et sortait de devant lui, mille milliers le servaient, et dix mille millions assistaient devant lui ; le jugement se tint, et les livres furent ouverts.

11 Je regardais alors, à cause du bruit des grandes paroles que cette corne prononçait, et je regardai, jusqu’à ce que la bête fût tuée, et que son corps fut donné pour être brûlé au feu.

12 La domination fut aussi ôtée aux autres bêtes, quoiqu’une longue vie leur eût été donnée jusqu’à un certain temps.

13 Je regardais dans ces visions de la nuit, et je vis comme le Fils de l’homme qui venait dans les nuées des cieux, et il vint jusqu’à l’ancien des jours, et on le fit approcher de lui.

14 Et il lui donna la seigneurie, et l’honneur, et le règne ; et tous les peuples et les nations de toutes langues le serviront ; sa domination est une domination éternelle, qui ne passera point, et son règne ne sera point détruit.

15 Alors mon esprit fut saisi, à moi Daniel, et je frémis dans tout mon corps, et les visions que j’avais eues dans ma tête me troublèrent.

16 Et je m’approchai de l’un des assistants, et lui demandai la vérité de toutes ces choses. Et il me parla, et m’en donna l’interprétation.

17 Ces quatre grandes bêtes, me dit-il, sont quatre Rois, qui s’élèveront de la terre.

18 Et les saints du Souverain recevront le royaume et y régneront jusqu’au siècle et au siècle des siècles.

19 Alors je voulus savoir la vérité touchant la quatrième bête, qui était différente de toutes les autres et fort terrible, dont les dents étaient de fer, et les ongles d’airain, qui dévorait, et qui brisait et foulait à ses pieds ce qui restait ;

20 et touchant les dix cornes qui étaient sur sa tête, et touchant l’autre corne qui montait, en présence de laquelle trois des autres étaient tombées, et de ce que cette corne-là avait des yeux, et une bouche qui prononçait de grandes choses, et qu’elle avait plus d’apparence que les autres.

21 J’avais regardé comment cette corne faisait la guerre contre les saints et prévalait sur eux ;

22 jusqu’à ce que l’ancien des jours vint, et que le jugement fut donné aux saints du Souverain, et que le temps vint que les saints entrassent en possession du royaume.

23 Et il me dit ainsi : La quatrième bête sera un quatrième royaume sur la terre, lequel sera différent de tous les royaumes, et dévorera toute la terre ; et la foulera et la brisera.

24 Mais les dix cornes, ce sont dix Rois qui s’élèveront de ce royaume-là ; et un autre s’élèvera après eux, qui sera différent des premiers et abattra trois Rois.

25 Il prononcera des paroles contre le Souverain, et détruira les saints du Souverain, et pensera de pouvoir changer le temps et la loi, et les saints seront livrés dans sa main jusqu’à un temps, et des temps, et une moitié de temps.

26 Mais le jugement se tiendra, et on lui ôtera sa domination, en le détruisant et le faisant périr, jusqu’à en voir la fin ;

27 afin que le règne et la domination, et la grandeur des royaumes, qui sont sous tous les cieux, soit donnée au peuple des saints du Souverain. Son royaume est un royaume éternel, et tous les empires lui seront assujettis et lui obéiront.

28 C’est ici la fin de ce qui me fut dit : Pour ce qui est de moi, Daniel, mes pensées me troublèrent fort, et mon visage en fut tout changé ; toutefois je conservai ces paroles-là dans mon cœur.

REFLEXIONS

Voici une prophétie qui doit être considérée avec une grande attention. Ce songe mystérieux que Dieu envoya à Daniel et l’explication qu’un ange lui en donna marque la même chose que la vision de la statue qui est rapportée au chapitre II de ce livre. C’est que quatre grands empires se succèderaient les uns aux autres.

I. Celui des Babyloniens.

II. Celui des Perses et des Mèdes.

III. Celui des Grecs.

Le quatrième est, ainsi qu’il a été dit sur le chapitre second, ou celui des Rois de Syrie et d’Égypte, appelés les Séleucides et les Lagides ou celui des Romains.

Suivant la première explication, cette corne, c’est-à-dire cette puissance qui devait faire la guerre aux saints, mais qui devait être détruite, est le Roi Antiochus qui fit tant de maux aux Juifs et les réduisit aux dernières extrémités.

Suivant la seconde, cette puissance c’est l’antéchrist qui devait paraître dans l’église mais que Dieu détruirait, après quoi on verrait la pleine manifestation du règne de Dieu.

Ces prophéties qui s’étendent à tant de siècles et qui annonçaient si longtemps à l’avance ces grandes révolutions, font voir que Daniel parlait par l’inspiration divine, que l’avenir est parfaitement connu à Dieu et qu’il préside sur toutes choses.

Il faut principalement reconnaître que parmi tous ces changements, Dieu avait en vue l’établissement de son règne parmi les hommes et que ce célèbre oracle qui prédit : que le Fils de l’homme recevrait de Dieu l’empire et la domination sur toutes choses et que son règne n’aurait point de fin et que les saints règneraient avec lui

Regarde incontestablement Jésus-Christ notre Seigneur et qu’il assure une parfaite félicité et une gloire éternelle à tous les saints et à tous les vrais fidèles.

CHAPITRE VIII.

Ce chapitre a deux parties : I. La vision d’un bélier et d’un bouc qui combattaient l’un contre l’autre.

II. L’explication que l’ange Gabriel donna de cette vision et qui revient à ceci :

- C’est qu’un Roi de Javan, c’est-à-dire de la Grèce, viendrait détruire le royaume des Perses et des Mèdes. Cela arriva lorsque Alexandre le Grand vainquit Darius, Roi de Perse, l’ange dit ensuite qu’après la mort d’Alexandre, il s’élèverait quatre cornes, ce qui signifie que son empire serait partagé en quatre principaux royaumes et que dans l’un de ces royaumes il y aurait un Roi superbe et cruel qui persécuterait les Juifs, qui ferait cesser le service divin pendant trois ans et demi, mais qu’il serait détruit. Ce Roi est Antiochus Épiphane, Roi de Syrie.

1 La troisième année du règne de Belsçatsar, moi Daniel, j’eus une vision, outre celle que j’avais déjà eue auparavant.

2 J’eus, dis-je, une vision ; et alors j’étais à Susan, ville capitale, qui est dans la province d’Hélam ; et dans ma vision, il me semblait que j’étais sur le fleuve d’Ulaï.

3 Et j’élevai mes yeux, et je regardai, et je vis un bélier qui se tenait auprès du fleuve ; et il avait deux cornes, et ces deux cornes étaient hautes ; mais l’une était plus haute que l’autre, et la plus haute s’avançait en arrière.

4 Je vis ce bélier heurtant des cornes contre l’occident, et contre l’aquilon, et contre le midi ; et pas une bête ne pouvait subsister devant lui ; et il n’y avait personne qui lui pût rien ôter, mais il faisait tout ce qu’il voulait, et il devint fort puissant.

5 Et comme je regardais attentivement, voici, un bouc d’entre les chèvres venait de l’occident sur le dessus de toute la terre, et il ne touchait point à terre ; et ce bouc avait une corne qui paraissait entre ses yeux.

6 Et il vint jusqu’au bélier, qui avait deux cornes, lequel j’avais vu, se tenant auprès du fleuve ; et il courut contre lui dans la fureur de sa force.

7 Et je le vis approcher du bélier, et s’irritant contre lui, il le heurta, et brisa ses deux cornes, et il n’y eut aucune force au bélier pour tenir bon contre lui ; et quand il l’eut jeté par terre, il le foula, et personne ne put délivrer le bélier de sa puissance.

8 Alors le bouc d’entre les chèvres devint fort grand, et sitôt qu’il fut devenu puissant, sa grande corne fut rompue, et au lieu d’elle il en crût quatre, qui paraissaient vers les quatre vents des cieux.

9 Et de l’une d’elles sortit une autre petite corne, qui s’agrandit vers le midi, et vers l’orient, et vers le pays de la gloire.

10 Et elle s’agrandit jusqu’à l’armée des cieux, et elle renversa une partie de l’armée des étoiles ; et les foula aux pieds.

11 Elle s’agrandit même jusqu’au chef de l’armée, et le sacrifice continuel fut ôté, et le domicile de son sanctuaire fut renversé par cette corne-là.

12 Et un certain temps lui fut donné contre le sacrifice continuel, à cause des péchés ; elle jeta la vérité par terre, et fit de grands exploits, et elle prospéra.

13 Alors j’entendis un saint qui parlait ; et un saint disait à un certain autre qui parlait : Jusqu’à quand durera cette vision, touchant le sacrifice continuel, et le péché qui cause cette désolation, pour livrer le sanctuaire et l’armée à être foulés aux pieds ?

14 Et il me dit : Jusqu’à deux mille et trois cents soirs et matins ; puis le sanctuaire sera purifié.

15 Et après que moi, Daniel, eus vu la vision, et que j’en eus demandé l’intelligence, voici, je vis comme une figure d’homme, qui se tint devant moi.

16 Et j’entendis la voix d’un homme au milieu du fleuve d’Ulaï, qui cria, et dit : Gabriel, explique la vision à cet homme-là.

17 Et Gabriel vint près du lieu où je me tenais, et lorsqu’il fut venu, je fus épouvanté, et je tombai sur ma face, et il me dit : Fils de l’homme, écoute, car il y a un temps marqué pour cette vision.

18 Et comme il me parlait je m’assoupis la face contre terre ; puis il me toucha, et me fit tenir debout dans le lieu où j’étais.

19 Et il me dit : Voici, je te ferai savoir ce qui arrivera jusqu’à ce que l’indignation finisse ; car il y a un temps déterminé pour cela.

20 Le bélier que tu as vu, qui avait deux cornes, ce sont les Rois des Mèdes et des Perses ;

21 et le bouc velu c’est le Roi de Javan ; et la grande corne qui était entre ses yeux, c’est le premier roi.

22 Et ce qu’elle s’est rompue, et que quatre cornes se sont élevées en sa place, ce sont quatre royaumes qui s’élèveront de cette nation ; mais non pas selon sa force.

23 Et à la fin de leur règne, quand le nombre des déloyaux sera accompli, il s’élèvera un Roi fier de visage, et entendu en subtilités ;

24 et sa puissance s’accroîtra, non pas toutefois par sa force ; il fera de prodigieux dégâts, et il prospérera, et il fera de grands exploits, et détruira les puissants et le peuple des saints ;

25 et par le moyen de ses artifices, il fera prospérer la fraude dans sa main ; il s’élèvera dans son cœur, et dans la prospérité il en fera périr plusieurs ; il résistera contre le Seigneur des seigneurs ; mais il sera brisé sans main.

26 La vision du soir et du matin, qui a été dite, est très véritable ; mais toi scelle la vision, car elle n’arrivera de longtemps.

27 Et moi, Daniel, je fus tout défait et malade pendant quelques jours ; puis je me levai, et je fis les affaires du Roi, et j’étais tout étonné de la vision ; mais il n’y eut personne qui l’entendît.

REFLEXIONS

La prophétie qui est contenue dans ce chapitre a eu son entier accomplissement et elle a été tellement éclaircie par l’événement qu’il n’y reste pas la moindre obscurité.

L’empire des Perses et des Mèdes s’éleva à une grande puissance, mais il fut détruit par Alexandre le grand qui vainquit Darius dernier Roi des Perses.

La monarchie d’Alexandre fut partagée en quatre royaumes principaux après sa mort et de l’un de ces royaumes, qui fut celui de Syrie, on vit s’élever Antiochus, surnommé l’illustre, qui persécuta cruellement les Juifs et qui abolit le service divin à Jérusalem pendant trois ans et demi, après quoi cette persécution cessa, le temple fut purifié et Antiochus éprouva la vengeance céleste.

De tout cela, il suit incontestablement que Daniel, qui a marqué tous ces événements si longtemps auparavant, était inspiré de Dieu.

À cette réflexion générale, qui établit si fortement la vérité de la religion, il faut ajouter une considération particulière, c’est que Dieu voulut révéler toutes ces choses à Daniel et lui faire connaître qu’Antiochus ferait de grands maux aux Juifs, mais qu’ils seraient affranchis de la tyrannie de ce prince. Il était nécessaire que les Juifs fussent avertis de cela, afin que, quand cette persécution arriverait, ils la soutinssent avec constance. Ceci nous oblige à considérer que Dieu, dont la providence conduit toutes choses, préside d’une façon particulière sur les événements qui intéressent l’église, il permet quelquefois qu’elle soit opprimée, mais il ne l’abandonne jamais et il donne toujours des bornes à la malice des persécuteurs.

Enfin, nous devons souhaiter, que comme le sanctuaire fut autrefois nettoyé des abominations d’Antiochus y avait introduites, Dieu vienne aussi purifier son église et repurger le christianisme de tant de souillures qui y règnent.

CHAPITRE IX.

Ce chapitre contient : I. Une prière dans laquelle Daniel confesse les péchés des Juifs et prie Dieu d’être apaisé envers eux. II. Une prophétie qui marque que depuis le rétablissement de Jérusalem jusqu’au Messie, il s’écoulerait soixante et dix semaines d’années, c’est-à-dire quatre cents et nonante ans. Cette prophétie marque de plus que le Messie mourrait, que les Romains prendraient Jérusalem, qu’ils détruiraient cette ville et qu’ils causeraient une désolation générale dans tout le pays des Juifs.

1 La première année du règne de Darius, fils d’Assuérus, de la race des Mèdes, lequel avait été établi Roi sur le royaume des Caldéens ;

2 la première année, dis-je, de son règne, moi, Daniel, ayant entendu, par les livres, que le nombre des ans dont l’Éternel avait parlé par le prophète Jérémie, pour finir les désolations de Jérusalem, était de soixante et dix ans ;

3 je tournai mon visage vers le Seigneur Dieu, cherchant à faire requête et supplication, avec jeûne, et en prenant le sac et la cendre.

4 Et je priai l’Éternel mon Dieu, et je lui fis confession, et je dis : Hélas, Seigneur ! qui es le Dieu fort, le Grand, le Terrible, qui gardes l’alliance et la miséricorde à ceux qui t’aiment et qui observent tes commandements !

5 Nous avons péché, nous avons commis l’iniquité, nous avons fait de méchantes actions, nous avons été rebelles, et nous nous sommes détournés de tes commandements et de tes jugements ;

6 et nous n’avons pas obéi aux prophètes tes serviteurs, qui ont parlé en ton nom à nos Rois, aux principaux d’entre nous, à nos pères, et à tout le peuple du pays.

7 Ô Seigneur ! à toi est la justice, et à nous la confusion de face, qui couvre aujourd’hui les hommes de Juda, les habitants de Jérusalem, et tous ceux d’Israël, qui sont près et qui sont loin, dans tous les pays auxquels tu les as chassés, à cause de leur perfidie qu’ils ont commise contre toi.

8 Seigneur ! à nous est la confusion de face, à nos Rois, aux principaux d’entre nous, et à nos pères, parce que nous avons péché contre toi.

9 Les compassions et les pardons sont du Seigneur notre Dieu ; car nous nous sommes rebellés contre lui.

10 Et nous n’avons point écouté la voix de l’Éternel notre Dieu, pour marcher dans ses lois, qu’il avait mises devant nous, par le moyen de ses serviteurs les prophètes.

11 Tous ceux d’Israël ont transgressé ta loi, et se sont détournés, pour ne point écouter ta voix ; et l’imprécation et le serment écrit dans la loi de Moïse, serviteur de Dieu, ont fondu sur nous, parce que nous avons péché contre lui.

12 Et il a accompli ses paroles qu’il avait prononcées contre nous, et contre nos chefs qui nous ont gouvernés, tellement qu’il a fait venir sur nous un grand mal, tel qu’il n’en est point arrivé sous tous les cieux de semblable à celui qui est arrivé à Jérusalem.

13 Tout ce mal-là est venu sur nous, selon qu’il est écrit dans la loi de Moïse ; et nous n’avons point supplié l’Éternel notre Dieu, pour nous retirer de nos iniquités, et nous rendre attentifs à sa vérité.

14 Et l’Éternel a veillé sur le mal, et l’a fait venir sur nous ; car l’Éternel notre Dieu est juste dans toutes les œuvres qu’il a faites à notre égard ; mais nous n’avons point obéi à sa voix.

15 Et maintenant, Seigneur notre Dieu ! qui as tiré ton peuple du pays d’Égypte par une main forte, et qui t’es acquis un renom, tel qu’il paraît aujourd’hui, nous avons péché, nous avons été méchants.

16 Seigneur ! je te prie, que selon toutes tes justices, ta colère et ton indignation soient détournées de ta ville de Jérusalem, qui est la montagne de ta sainteté ; car c’est à cause de nos péchés et des iniquités de nos pères, que Jérusalem et ton peuple sont en opprobre à tous ceux qui sont autour de nous.

17 Ecoute donc maintenant, ô notre Dieu ! la requête de ton serviteur et ses supplications ; et, pour l’amour du Seigneur, fais reluire ta face sur ton sanctuaire qui est désolé.

18 Mon Dieu, prête l’oreille et écoute ; ouvre tes yeux et regarde nos désolations, et la ville sur laquelle ton nom a été invoqué ; car ce n’est pas sur nos justices que nous présentons nos supplications devant ta face ; mais c’est sur tes grandes compassions.

19 Seigneur ! exauce ; Seigneur ! pardonne ; Seigneur ! sois attentif et opère, à cause de toi-même, ô mon Dieu ! ne tarde point ; car ton nom a été invoqué sur ta ville et sur ton peuple.

20 Or, comme je parlais encore, et que je faisais ma requête, et que je confessais mon péché, et le péché de mon peuple d’Israël, et que je présentais ma supplication, en la présence de l’Éternel mon Dieu, pour la sainte montagne de mon Dieu ;

21 comme, dis-je, je parlais encore dans ma prière, alors cet homme, Gabriel, que j’avais vu en vision auparavant, volant promptement, me toucha, environ le temps de l’oblation du soir.

22 Et il m’instruisit, me parla, et me dit : Daniel, je suis sorti maintenant, afin de t’apprendre une chose digne d’être entendue :

23 La parole est sortie, dès le commencement de tes prières, et je suis venu pour te la déclarer, parce que tu es agréable à Dieu. Ecoute donc la parole, et comprends la vision.

24 Il y a soixante et dix semaines déterminées sur ton peuple, et sur la ville sainte, pour abolir le crime, pour consumer le péché, pour faire propitiation pour l’iniquité, et pour amener la justice des siècles, et pour accomplir la vision et la prophétie, et pour oindre le Saint des saints.

25 Tu sauras donc et tu l’entendras, que, depuis que la parole sera sortie, pour s’en retourner et pour rebâtir Jérusalem, jusqu’au CHRIST le Conducteur, il y a sept semaines et soixante-deux semaines ; et les places et la brèche seront rebâties dans un temps fâcheux.

26 Et après ces soixante-deux semaines, le CHRIST sera retranché, et non pas pour soi ; puis le peuple d’un conducteur qui viendra, détruira la ville et le sanctuaire, et la fin en sera avec débordement, et les désolations qui ont été déterminées arriveront à la fin de la guerre.

27 Et il confirmera l’alliance à plusieurs, dans une semaine ; et à la moitié de cette semaine-là, il fera cesser le sacrifice et l’oblation ; puis, par le moyen des ailes abominables, qui causeront la désolation, jusqu’à l’entière ruine qui a été déterminée, la désolation fondra sur le désolé.

REFLEXIONS

La prière de Daniel est un excellent modèle de l’humilité avec laquelle nous devons reconnaître et confesser nos péchés devant Dieu, surtout dans le temps de la calamité. Cette prière nous apprend que ce sont les péchés des hommes qui allument la colère de Dieu contre eux et que le moyen de l’apaiser est de recourir à sa miséricorde avec une sincère repentance. Et les vœux que Daniel formait pour le rétablissement de Jérusalem et de son temple nous montrent que le devoir de tous les vrais membres de l’église est de s’intéresser pour elle et de faire des prières ardentes et continuelles pour sa prospérité.

La prophétie des soixante et dix semaines est l’une des plus expresses qu’il y ait dans le Vieux Testament. Elle désigne clairement le temps qui devait s’écouler depuis l’édit qui serait donné pour rebâtir Jérusalem jusqu’à la mort du Messie. L’ange qui parlait à Daniel dit que ce temps serait de 490 ans, lesquels doivent être comptés depuis l’édit qu’Artaxerxes, surnommé Longue main, donna en faveur des Juifs. Cet oracle marque formellement

- Que le Messie paraîtrait à la fin de ce terme,

- Qu’il ferait l’expiation des péchés par sa mort,

- Qu’il établirait et qu’il confirmerait l’alliance de Dieu avec les hommes et

- Qu’après cela les Romains viendraient détruire pour toujours la ville de Jérusalem et son

Toutes ces choses sont arrivées dans le temps et de la manière qu’elles avaient été prédites, comme on le sait très certainement par l’histoire.

Ainsi nous avons dans ces oracles un appui inébranlable de notre foi, ils prouvent invinciblement la divinité de l’Écriture et la vérité de la religion chrétienne. Ils font voir de la manière la plus claire que Jésus est le Messie et qu’il est venu racheter les hommes par sa mort, ils établissent enfin très fortement l’obligation où nous sommes de le recevoir comme notre Sauveur et de nous soumettre à la doctrine qu’il a annoncée.

CHAPITRE X.

Ce chapitre et les deux suivants contiennent une révélation qui fut adressée à Daniel et dont le but était de l’instruire de ce qui arriverait aux Juifs depuis le règne de Cyrus Roi de Perse jusqu’à la fin de la persécution d’Antiochus.

Dans le chapitre X, Daniel rapporte la vision qu’il eut d’un ange qui s’apparut à lui sous la forme d’un homme vêtu de lin, la frayeur que cette vision lui causa et comment cet ange le rassura et le prépara à écouter ce qu’il avait à lui dire.

Ce que l’ange dit à Daniel dans ce chapitre revient à ceci :

- Que les prières de ce prophète en faveur des Juifs avaient été exaucées, mais que les Rois de Perse leur seraient contraire,

- Que les Juifs seraient traversés dans le dessein de rebâtir le temple,

- Que cependant Dieu les protègerait,

- Que le prince de Javan ou des Grecs, c’est Alexandre le grand, viendrait contre les Perses.

Et que les principaux anges, tels qu’était celui qui parlait à Daniel et Michel l’archange, seraient employés de Dieu pour défendre et assister les Juifs et pour fortifier les Rois qui leur seraient favorables, comme il est dit au commencement du chapitre suivant, que l’ange qui parle ici avait fortifié le Roi Darius.

1 La troisième année du règne de Cyrus, Roi de Perse, une parole fut révélée à Daniel, qui était nommé Beltesçatsar, et cette parole est véritable ; mais le temps déterminé en est long ; et il entendit la parole, et il eut l’intelligence de cette vision.

2 En ce temps-là, moi Daniel, je fus dans le deuil pendant trois semaines entières ;

3 je ne mangeai point de pain d’appétit, et il n’entra point de chair ni de vin dans ma bouche, et je ne m’oignis point jusqu’à ce que ces trois semaines entières fussent accomplies.

4 Et le vingt-quatrième jour du premier mois j’étais sur le bord du grand fleuve qui est Hiddékel ;

5 et j’élevai mes yeux, et je regardai, et je vis un homme vêtu de lin, et dont les reins étaient ceints d’une ceinture d’or fin d’Uphaz.

6 Et son corps était comme de chrysolithe, son visage brillait comme un éclair, ses yeux étaient comme des lampes allumées, et ses bras et ses pieds paraissaient comme de l’airain poli, et le bruit de ses paroles était comme le bruit d’une multitude de gens.

7 Et moi, Daniel, je vis seul la vision, et les hommes qui étaient avec moi ne la virent point ; mais une grande frayeur tomba sur eux, et ils s’enfuirent pour se cacher.

8 Et étant laissé tout seul, je vis cette grande vision, et il ne demeura point de force en moi ; mon visage fut changé jusqu’à être tout défait, et je ne conservai aucune force.

9 Car j’entendis la voix de ces paroles, et sitôt que je l’eus entendue, je tombai assoupi sur mon visage, et mon visage était contre terre.

10 Alors une main me toucha, et me fit mettre sur mes genoux et sur les paumes de mes mains.

11 Puis il me dit : Daniel, homme agréable à Dieu, écoute les paroles que je te dis, et tiens-toi debout sur tes pieds ; car j’ai été envoyé maintenant vers toi. Et quand il m’eut dit cette parole, je me tins debout en tremblant.

12 Et il me dit : Ne crains point, Daniel ; car dès le premier jour que tu as appliqué ton cœur à entendre ces choses, et à t’affliger en la présence de ton Dieu, tes paroles ont été exaucées, et c’est à cause de tes paroles que je suis venu.

13 Mais le chef du royaume de Perse m’a résisté vingt et un jours : et voici, Micaël, l’un des principaux chefs, est venu pour m’aider, et je suis demeuré là chez le Roi de Perse.

14 Et je viens maintenant pour te faire entendre ce qui doit arriver à ton peuple dans les derniers jours ; car la vision s’étend jusqu’à ces jours-là.

15 Et comme il me tenait ces discours, je mis mon visage contre terre et je me tus.

16 Et voici, quelqu’un qui avait la ressemblance d’un homme toucha mes lèvres ; et ouvrant ma bouche, je parlai et dis à celui qui était auprès de moi : Mon Seigneur, mes jointures se sont relâchées en moi par cette vision, et je n’ai conservé aucune force ;

17 et comment le serviteur de mon Seigneur pourrait-il parler avec mon Seigneur, puisque dès maintenant il n’est resté en moi aucune force, et que je perds même la respiration ?

18 Alors celui qui ressemblait à un homme me toucha encore et me fortifia.

19 Et il me dit : Ne crains point, homme agréable à Dieu ; la paix est avec toi ; prends courage, prends courage ; et comme il parlait avec moi, je repris courage, et je dis : Que mon Seigneur parle, car tu m’as fortifié.

20 Et il me dit : Ne sais-tu pas pourquoi je suis venu vers toi ? Et maintenant je m’en retournerai pour combattre contre le chef de Perse ; après cela je sortirai, et voici, le chef de Javan viendra.

21 Au reste, je te déclarerai ce qui est écrit dans l’Ecriture de vérité ; cependant il n’y a personne qui m’assiste dans ces choses, sinon Micaël votre chef.

REFLEXIONS

I. L’affliction et le jeûne de Daniel, qui fut dans le deuil pendant trois semaines, doivent être considérés comme un effet de son zèle pour le rétablissement des Juifs.

C’est ainsi que les personnes pieuses et zélées s’affligent lorsque la gloire de Dieu n’est pas avancée et prient pour la paix de l’église.

II. On voit ici combien Dieu aime ceux qui le craignent et qui le servent avec fidélité et combien il a d’égard à leurs prières et à leur affliction. C’est ce que marque l’apparition de cet ange qui fut envoyé à Daniel et la manière pleine de bonté dont il lui parla en l’assurant qu’il était un homme agréable à Dieu et que ses prières avaient été exaucées.

III. Ce que l’ange dit à Daniel, qu’il avait travaillé et combattu en faveur des Juifs contre ceux qui cherchaient à leur nuire, est une preuve du soin que Dieu a de son église pour la protéger dans les temps fâcheux et pour lui susciter des moyens de délivrance. Cela marque aussi que Dieu se sert du ministère des anges pour exécuter ses desseins et pour le bien de ceux qu’il favorise. Mais ce qui doit surtout nous remplir de confiance, c’est que Jésus-Christ, le Chef et le roi de l’église, veille toujours pour elle et qu’il déploie sa puissance en sa faveur.

CHAPITRE XI.

L’ange continue à parler à Daniel et à lui révéler les choses qui doivent arriver. Cette prophétie a trois parties. Elle marque :

I. La fin de l’empire des Perses et l’établissement de la monarchie des Grecs qui serait fondée par Alexandre le grand.

II. Le partage qui se ferait de cette monarchie après sa mort et les guerres qu’il y aurait entre les Rois d’Égypte et les Rois de Syrie.

III. Le règne d’Antiochus, Roi de Syrie, ses guerres avec le Roi d’Égypte et surtout la persécution qu’il ferait aux Juifs pour tâcher d’abolir le culte de Dieu et d’établir l’idolâtrie et enfin la ruine de ce prince impie et cruel.

1 Or, la première année du règne de Darius de Mède, j’assistais pour l’aider et pour le fortifier.

2 Et maintenant aussi je te déclarerai la vérité. Voici, il y aura encore trois Rois en Perse ; puis le quatrième possédera de grandes richesses par-dessus tous les autres ; et s’étant fortifié par ses richesses, il soulèvera tout le monde contre le royaume de Javan.

3 Mais un Roi puissant se lèvera, et il dominera avec une grande puissance, et fera tout ce qu’il voudra.

4 Et aussitôt qu’il sera affermi, son règne sera détruit et partagé vers les quatre vents des cieux, et il ne passera point à sa postérité, et ne conservera pas la même puissance avec laquelle il aura dominé ; car son royaume sera extirpé, et même il sera donné à d’autres outre ceux-là.

5 Et le Roi du Midi se fortifiera ; et un autre d’entre les principaux gouverneurs se fortifiera par-dessus lui ; et il dominera, et sa domination sera une grande domination.

6 Et au bout de quelques années ils s’allieront, et la fille du Roi du Midi épousera le Roi de l’Aquilon, pour rétablir les choses ; mais elle ne conservera pas la force du bras, et ni elle ni son bras ne subsisteront point, mais elle sera livrée, et ceux qui l’auront amenée, et celui qui sera né d’elle et qui la soutenait en ces temps-là.

7 Mais un rejeton du royaume du Midi s’élèvera de ses racines pour le soutenir ; il viendra avec une armée, et il entrera dans les forteresses du Roi de l’Aquilon et y fera de grands exploits et se fortifiera.

8 Et même il emmènera en captivité en Egypte leurs dieux, avec les vaisseaux de leurs aspersions, et avec leurs vaisseaux précieux d’argent et d’or, et il subsistera quelques années plus que le Roi de l’Aquilon.

9 Et le Roi du Midi entrera dans son royaume, et il retournera en son pays.

10 Mais les fils de celui-là entreront en guerre, ayant assemblé une multitude de grandes armées, et l’un d’eux viendra avec vitesse, et se répandra, et passera, et reviendra, et s’avancera en bataille jusqu’à la forteresse du Roi du Midi.

11 Et le Roi du Midi sera irrité, et il sortira et combattra contre lui, savoir, contre le Roi de l’Aquilon, et il assemblera une grande multitude de gens, et la multitude du peuple du Roi de l’Aquilon sera livrée dans la main du Roi du Midi.

12 Et ayant défait cette multitude, son cœur s’élèvera, et il en abattra à milliers ; mais il n’en sera pas fortifié.

13 Car le Roi de l’Aquilon reviendra et assemblera une plus grande multitude que la première, et au bout de quelque temps et de quelques années, il viendra avec une grande armée et un grand appareil.

14 En ce temps-là plusieurs s’élèveront contre le Roi du Midi, et les enfants des prévaricateurs de ton peuple s’élèveront afin d’accomplir la vision, mais ils tomberont.

15 Et le Roi de l’Aquilon viendra : il fera des terrasses et prendra les villes fortes, et les bras du Midi, ni son peuple d’élite ne pourront pas subsister, car ils n’auront point de force pour résister.

16 Et il fera de celui qui sera venu contre lui tout ce qui lui plaira ; et il n’y aura personne qui subsiste devant lui, et il s’arrêtera dans le pays de gloire, lequel sera détruit.

17 Puis il dressera sa face pour entrer par force dans tout le royaume de l’autre, et ses affaires iront bien, et il fera de grands exploits, et il lui donnera une fille entre les femmes, pour ruiner le royaume ; mais cela ne réussira pas, et elle ne sera point à lui.

18 Ensuite il tournera sa face vers les îles, et en prendra plusieurs ; mais un capitaine fera cesser l’opprobre qu’il lui faisait ; et sans y avoir du déshonneur, il le fera retomber sur lui.

19 De là il tournera sa face vers les forteresses de son pays, et il tombera, et ne sera plus trouvé.

20 Et un autre sera rétabli en sa place, qui enverra l’exacteur pour la gloire du royaume ; mais en peu de jours il périra, non point par rencontre, ni par bataille.

21 Après lui un autre, qui sera méprisé, sera établi en sa place, auquel on ne donnera pas l’honneur royal, mais il viendra en paix et il s’emparera du royaume par des flatteries.

22 Et les bras des grandes eaux seront engloutis devant lui, comme par un déluge, et ils seront détruits aussi bien que le prince de l’alliance.

23 Car après les accords faits avec lui, il usera de tromperie, et il montera, et se fortifiera avec peu de gens.

24 Il entrera dans la province paisible, et dans ses lieux gras ; il fera des choses que ses pères, ni les pères de ses pères n’avaient pas faites ; il leur répandra le pillage, le butin et les richesses, et il formera des desseins contre les forteresses, et cela jusqu’à un certain temps.

25 Après cela il réveillera sa force et son courage contre le Roi du Midi, avec une grande armée ; et le Roi du Midi s’avancera en bataille avec une grande et très forte armée, mais il ne subsistera point, parce qu’on formera des complots contre lui.

26 Et ceux qui mangent les mets de sa table le ruineront, et son armée sera accablée comme d’un déluge, et plusieurs tomberont blessés à mort.

27 Et le cœur de ces deux Rois ne cherchera qu’à s’entre-nuire ; et ils parleront dans une même table avec tromperie, ce qui ne réussira pas, parce que la fin sera différée à un autre temps.

28 Il retournera donc en son pays avec de grandes richesses ; son cœur se déclarera contre la sainte alliance, et il fera de grands exploits, puis il retournera en son pays.

29 Il retournera au temps marqué, et il viendra contre le Midi, mais cette dernière fois ne sera pas comme la précédente.

30 Car les navires de Kittim viendront contre lui, de quoi il sera indigné, et il s’en retournera, et il se dépitera contre la sainte alliance, et il fera de grands exploits, et retournera, et s’entendra avec les apostats de la sainte alliance.

31 Et les forces seront de son côté, et on souillera le sanctuaire qui est la forteresse, et on fera cesser le sacrifice continuel, et on y mettra l’abomination qui causera la désolation.

32 Et il fera pécher par ses flatteries ceux qui prévariqueront dans l’alliance ; mais le peuple de ceux qui connaîtront leur Dieu prendra courage et fera de grands exploits.

33 Et ceux qui seront intelligents parmi le peuple en instruiront plusieurs ; et il y en aura qui tomberont par l’épée et par la flamme ; ils iront en captivité, et ils seront en proie plusieurs jours.

34 Mais dans le temps qu’ils seront ainsi abattus, ils seront un peu secourus, et plusieurs se joindront à eux avec un beau semblant.

35 Et quelques-uns de ces plus intelligents tomberont, afin qu’il y en ait d’entre eux qui soient éprouvés, purifiés et blanchis, jusqu’au temps marqué, car cela durera encore pendant un certain temps.

36 Ce Roi fera donc au gré de ses désirs ; et il s’élèvera, et il s’agrandira au-dessus de tout dieu ; il parlera insolemment contre le Dieu des dieux, et il prospérera jusqu’à ce que la colère de Dieu finisse ; car la détermination en a été faite.

37 Et il ne se souciera point du dieu de ses pères, ni de désirer des femmes ; même il ne se souciera de quelque dieu que ce soit, car il s’élèvera par-dessus tout.

38 Toutefois il honorera dans son lieu le dieu des forces, il honorera avec l’or et l’argent, les pierreries, et les choses les plus désirables, le dieu que ses pères n’avaient point connu.

39 Et il fera des forteresses à Maosim, ce dieu étranger ; et à ceux qui le reconnaîtront il leur multipliera la gloire, et les fera dominer sur plusieurs, et leur partagera le pays à prix d’argent.

40 Et au temps marqué le Roi du Midi le heurtera de ses cornes ; mais le Roi de l’Aquilon s’élèvera contre lui comme une tempête, avec des chariots et de la cavalerie, et avec plusieurs navires ; et il entrera dans ses terres, et les inondera, et il passera outre.

41 Et il entrera au pays de la gloire, et plusieurs pays seront ruinés ; mais ceux-ci échapperont de sa main, savoir, Edom, et Moab, et le principal lieu des enfants de Hammon.

42 Il mettra donc la main sur ces pays-là, et le pays d’Egypte n’échappera point.

43 Il sera maître des trésors d’or et d’argent, et de toutes les choses précieuses de l’Egypte ; les Libyens et ceux de Cus seront à sa suite.

44 Mais des nouvelles viendront de l’Orient et de l’Aquilon, qui le troubleront, et il sortira avec une grande fureur, pour en détruire et en exterminer plusieurs.

45 Et il dressera les tentes de sa maison royale entre les mers, vers la montagne glorieuse et sainte ; il viendra jusqu’à sa fin, et il n’y aura personne pour le secourir.

REFLEXION

Voici le sens et la substance de ce chapitre :

C’est qu’il y aurait trois Rois en Perse depuis Cyrus qui régnait alors :

Bien que ce chapitre ait de l’obscurité pour ceux qui ne savent pas l’histoire ancienne, la lecture n’en doit pas être omise parce que c’est l’une des prophéties les plus claires et les plus circonstanciées qu’il y ait dans le Vieux Testament. Elle comprend l’histoire d’environ quatre cents ans et l’on trouve dans les historiens de ces temps-là un récit très exact des événements qui sont ici prédits.

Ce chapitre est donc tout à fait remarquable, il nous fournit les preuves les plus évidentes et les plus fortes qu’on puisse imaginer de la divinité de l’Écriture. Il nous présente aussi diverses réflexions particulières sur les révolutions et les guerres qui arrivent dans le monde, sur les desseins de Dieu dans ces divers événements, sur les persécutions auxquelles l’Église est exposée, sur les délivrances que Dieu lui accorde et sur la fin tragique que font ordinairement les princes tyrans et persécuteurs.

CHAPITRE XII.

C’est ici la suite de la prophétie qui est contenue dans le chapitre précédent. L’ange qui parlait à Daniel y marque ces deux choses. I. La délivrance des Juifs et la glorieuse récompense que Dieu donnerait à ceux qui auraient été exposés à la persécution d’Antiochus. II. La durée de cette persécution qui devait être de trois ans et demi. 

1 En ce temps-là, Micaël, ce grand chef qui tient ferme pour les enfants de ton peuple, s’élèvera, et ce sera un temps de détresse, tel qu’il n’y en a point eu depuis qu’il y a eu des nations jusqu’à ce temps-là, et en ce temps-là ton peuple échappera, savoir, quiconque sera trouvé écrit dans le livre.

2 Et plusieurs de ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle, et les autres pour des opprobres et une infamie éternelle.

3 Et ceux qui auront été intelligents brilleront comme la splendeur de l’étendue, et ceux qui en auront amené plusieurs à la justice, luiront comme les étoiles, à toujours et à perpétuité.

4 Mais toi, Daniel, ferme ces paroles, et scelle ce livre jusqu’au temps marqué, auquel plusieurs le parcourront, et auquel la connaissance sera augmentée.

5 Alors moi, Daniel, je regardai, et voici deux autres hommes qui se tenaient debout, l’un au deçà, sur le bord du fleuve, et l’autre au-delà, sur le bord du même fleuve.

6 Et on dit à l’homme vêtu de lin, qui était sur les eaux du fleuve : Quand sera la fin de ces merveilles ?

7 Et j’entendis l’homme vêtu de lin, qui était sur les eaux du fleuve, lequel éleva sa droite et sa gauche vers les cieux, et jura par celui qui vit éternellement, que ce sera jusqu’à un temps, à des temps, et une moitié de temps, et que quand il aura achevé de disperser la force du peuple saint, toutes ces choses-là seront accomplies.

8 Ce que j’entendis bien, mais je ne le compris point, et je dis : Mon Seigneur, quelle sera l’issue de ces choses ?

9 Et il me dit : Va, Daniel ; car ces paroles sont closes et scellées jusqu’au temps marqué.

10 Il y en aura plusieurs nettoyés, blanchis et éprouvés ; mais les méchants agiront avec méchanceté ; et aucun des méchants n’aura de l’intelligence ; mais les intelligents comprendront ces choses.

11 Or depuis le temps que le sacrifice continuel aura cessé, et qu’on aura mis l’abomination de désolation, il y aura mille deux cent quatre-vingt-dix jours.

12 Heureux celui qui attendra et qui atteindra jusqu’à mille trois cent trente-cinq jours.

13 Mais pour toi, va à ta fin ; cependant tu te reposeras et tu demeureras dans ton état jusqu’à la fin de tes jours.

REFLEXIONS

Les considérations qu’il faut faire sur ce chapitre sont :

I. Que Dieu a été dans tous les temps le défenseur de son église et qu’il l’a toujours protégée, lors même qu’elle a été attaquée avec le plus de violence. Nous en avons une preuve dans ce qui est dit ici, que Michel l’archange tiendrait le parti des Juifs et dans la glorieuse délivrance que Dieu leur accorda, après qu’ils eurent été cruellement persécutés par Antiochus.

II. Il faut faire beaucoup d’attention à ces paroles : Que ceux qui dorment dans la poussière de la terre se réveilleront, les uns pour la vie éternelle et les autres pour un opprobre éternel.

Comme c’est ici une promesse qui regarde ces Juifs zélés qui auraient soutenus la religion et souffert la mort sous la persécution d’Antiochus, on ne peut douter aussi que ces paroles ne se rapportent à la résurrection des morts et à la distinction qu’il y aura dans la vie à venir entre les bons et les méchants. C’est la doctrine que Jésus-Christ nous a enseignée encore plus clairement dans l’Évangile et à peu près dans les mêmes termes que Daniel.

III. Ce que l’ange dit que les Juifs éclairés qui auraient signalé leur fidélité dans les temps de persécution seraient couronnés d’une gloire particulière mérite aussi d’être bien considéré et doit nous inspirer un grand zèle pour soutenir les intérêts de la gloire de Dieu, même au péril de notre vie et pour contribuer au salut et à l’édification des hommes par tous les moyens qui sont en notre puissance.

Enfin, puisque le temps de la persécution d’Antiochus et le nombre de jours qu’elle devait durer est ici marqué d’une manière si précise, nous devons apprendre de là que Dieu tient les temps en sa puissance, qu’il a fixé un terme que les ennemis de sa gloire ne passeront point et que ce qu’il a résolu s’exécute toujours dans le temps et de la manière qu’il l’a arrêté.

Ce sont là, pour l’église en général, et pour les fidèles en particulier, de grands motifs :

- A se confier en Dieu, même dans les temps les plus fâcheux,

- A se reposer sur sa providence