L'HISTOIRE DE SUZANNE

 LIVRES DES APOCRYPHES.

Ajoutée dans la version grecque du livre de Daniel, à la fin du Chapitre XII en sorte qu’elle y fait un treizième chapitre.

Susan accusé faussement d'adultère, 14. est condamnée à mort. 42. Elle recommande sa cause à Dieu, 44. qui la délivrent par le moyen de Daniel. 

 

  1. Il y avait un homme nommé Joakim, qui demeurait à Babylone.
  2. Il prit une femme nommée Susanne, fille de helcia, fort belle, et qui craignait le Seigneur.
  3. Car ses père et mère étaient des gens de bien, et ils avaient enseigné leur fille selon la loi de Moïse.
  4. Or Joakim était fort riche, et il avait un jardin de plaisance proche de sa maison ; et les juifs s’assemblaient chez lui, parce que c'était un homme considérable par-dessus tous les autres.
  5. Or cette année-là deux anciens du peuple furent créées Juges, desquels le Seigneur a dit : que l'iniquité est issue de Babylone des anciens et des juges qu’on estimait gouverner le peuple.
  6. Ils hantaient dans la maison de Joakim, et tous ceux qui avaient quelque procès y venaient à eux.
  7. Puis quand le peuple s'en était allé sur le midi, Suzanne entrait et se promenait au jardin de son mari.
  8. Et les deux anciens la voyaient tous les jours, y entrer et se promener, de sorte qu'ils en furent épris de convoitises.
  9. Ayant renverser leur entendement et détourner leurs yeux, pour ne point regarder vers le ciel, et ne se point souvenir des justes jugements ;
  10. Ils étaient tous deux blessés de son amour, mais ils ne se le dirent par l'un à l'autre leur blessure.
  11. Car ils avaient honte de déclarer l'un à l'autre, l'envie qu'ils avaient de coucher avec Susan :
  12. Mais ils cherchaient avec soin tous les jours, les moyens de la voir.
  13. Un jour donc ils se dirent l'un à l'autre : allons-nous en à la maison ; car c'est l'heure de dîner.
  14. Et étant sorti ils se séparèrent l'un de l'autre ; puis ayant rebroussé chemin, ils se retrouvèrent en un même lieu ; se demandant l'un à l'autre la cause de leur retour, ils se confessèrent leur passion. Et d'un lorsqu'ils marquèrent ensemble le temps qu'il la pourrait trouver seule.
  15. Or il arriva, comme ils épiaient un jour qui leur fut propre, que Susanne entra comme auparavant, seulement avec deux servantes, et se voulut baigner au jardin, car il faisait chaud.
  16. Et il n’y avait là personne que les deux anciens cachés qui l’épiaient.
  17. Elle dit donc aux servantes : apportez-moi de l’huile, et les oignements, et fermez les portes du jardin, afin que je me baigne ;
  18. Ce qu’elles firent comme elle avait dit : et les portes du jardin étant fermées, elles sortirent par la fausse porte, pour apporter ce qu’elle leur avait commandé, ne sachant point que les anciens y fussent cachés.
  19. Aussitôt que les servantes furent sorties, les deux anciens se levèrent, et accoururent à elle disant :
  20. Voici les portes du jardin sont fermées, et nul ne nous voit, et nous te désirons avec ardeur ; c’est pourquoi accorde-nous que nous ayons ta compagnie.
  21. Que si tu ne le veux pas faire, nous témoignerons contre toi, qu’il y avait un jeune homme avec toi, et que c’est pour cela que tu as fait sortir les servantes.
  22. Alors Suzanne soupira et dit : je suis en angoisse de tous côtés ; car si je fais cela je mérite la mort ; et si je ne le fais pas, je n’échapperai point de vos mains.
  23. Mais il me vaut mieux tomber entre vos mains, sans avoir mal fait, que de pécher en la présence du Seigneur.
  24. Et sur cela Suzanne s’écria à haute voix, et les deux anciens aussi s’écrièrent contre elle.
  25. Et l’un courut aux portes du jardin, et les ouvrit.
  26. Or quand les serviteurs de la maison eurent ouï les cris au jardin, ils entrèrent promptement par la fausse porte, afin de voir ce que c’était.
  27. Mais sitôt que les anciens eurent dit leurs raisons ; les serviteurs furent fort honteux ; car jamais telle parole n’avait été dite de Suzanne.
  28. Puis le lendemain, le peuple étant assemblé chez Joakim, mari de Suzanne, les deux anciens aussi vinrent, pleins de mauvaises pensées contre elle, pour la faire mourir.
  29. Et ils dirent devant le peuple : envoyez vers Suzanne fille de Helcia, femme de Joakim ; et aussitôt on y envoya.
  30. Elle vint avec son père, et sa mère, ses enfants et tous ses parents.
  31. Or Suzanne était forte délicate, et belle de visage.
  32. Et ces méchants commandèrent qu’on la découvrît (car elle était couverte), afin de se repaître au moins de sa beauté.
  33. Mais tous ceux qui étaient autour d’elle et tous ceux qui la connaissait pleuraient.
  34. Alors les deux anciens s’étant levés au milieu du peuple, mirent leurs mains sur la tête de Suzanne ;
  35. Qui en pleurant regarda vers le ciel ; car son cœur avait confiance au Seigneur.
  36. Et les anciens dirent : Comme nous nous promenions tout seuls au jardin, elle y est entrée avec deux servantes, et ayant fermés les portes du jardin ; elle a renvoyé les servantes.
  37. Puis un jeune homme qui était caché est venu vers elle, et a couché avec elle.
  38. Alors nous qui étions à un coin du jardin, voyant l’iniquité, sommes accourus à eux. Et les avons vu comme ils étaient ensemble.
  39. Mais pour lui nous ne l’avons pas pu prendre, parce qu’il était plus fort que nous, tellement qu’en ouvrant la porte, il est sorti.
  40. Mais ayant saisi cette femme, nous lui avons demandé qui il était, et elle n’a point voulu nous le dire. Nous sommes témoins de ce fait.
  41. Ceux donc de l’assemblée les crurent, comme anciens et juges du peuple et la condamnèrent à la mort.
  42. Et Suzanne s’écria à haute voix, disant : O Dieu Eternel, qui connait les choses secrètes, et qui fait toutes choses avant qu’elles soient faites.
  43. Tu sais qu’ils ont rendu un faux témoignage contre moi ; et voici je meurs, quoique je n’ai commis aucune des choses qu’ils ont controuvées méchamment contre moi.
  44. Alors le Seigneur exauça sa prière.
  45. Car comme on la menait pour la faire mourir, le Seigneur suscita l’esprit Saint d’un jeune enfant nommé Daniel.
  46. Lequel s’écria à haute voix disant : je suis innocent du sang de cette femme.
  47. Et tout le peuple se retournant vers lui, dit : quel est ce propos que tu tiens.
  48. Et Daniel étant au milieu d’eux, dit : êtes-vous si fous, enfant d’Israël ? que sans avoir examiné, ni connu ce qui est véritable, vous avez condamné une fille d’Israël ?
  49. Retournez au siège de la justice ; car ceux-ci ont rendu un faux témoignage contre cette femme.
  50. Le peuple donc retourna promptement ; Et les anciens lui dirent viens et t’assieds au milieu de nous, et nous déclare comment Dieu t’a donné la charge d’ancien.
  51. Alors Daniel leur dit séparez ceux-ci l’un de l’autre, et je les examinerai.
  52. Quand donc ils furent séparés l’un de l’autre, il appela l’un d’eux, et lui dit : Ô toi qui a vieilli dans une longue malice, maintenant sont venus à leur comble les péchés que tu commettais auparavant.
  53. En rendant des sentences injustes, condamnant les innocents, et absolvant les coupables, quoique le Seigneur dise : tu ne feras point mourir le juste ni l’innocent.
  54. Maintenant donc, si tu as vu celle-ci en faute, dis : sous quel arbre les as-tu vu ensemble ? il répondit : sous un lentisque.
  55. Alors Daniel dit : vraiment tu as menti contre ta propre tête ; car voici le messager de Dieu, qui ayant reçu de lui l’arrêt te coupera par le milieu.
  56. Et après l’avoir fait retirer à part, il commanda qu’on lui amena l’autre, et il lui dit : O semence de Canaan, et non de Juda, la beauté t’a séduit, et la convoitise a perverti ton cœur.
  57. C’est ainsi que vous faisiez aux filles d’Israël ; et elles souffraient d’avoir votre compagnie, par la peur qu’elles avaient ; mais la fille de Juda n’a point souffert votre iniquité.
  58. Maintenant donc dis-moi sous quel arbre, les as-tu trouvés ensemble ? Il répondit : sous un chêne vert.
  59. Et Daniel lui dit : Et toi aussi tu as vraiment menti contre ta propre tête ; car le messager du Seigneur est prêt, ayant l’épée pour te scier par le milieu afin qu’il vous extermine.
  60. Alors toute l’assemblée s’écria à haute voix, et elle bénit Dieu, qui sauve ceux qui ont l’espérance en lui.
  61. Et tous s’élevèrent contre les deux anciens ; car Daniel les avait convaincus de faux témoignages par leur propre bouche.
  62. Et suivant la loi de Moïse, ils les traitèrent de même qu’ils avaient méchamment pensé de faire à leur prochain, en les mettant à mort ; et ainsi le sang innocent fût sauvé en ce jour-là.
  63. Et Helcia et sa femme louèrent Dieu, à cause de leur fille Suzanne, avec son mari Joakim, et tous ses parents ; parce qu’il ne s’était trouvé en elle aucune action déshonnête.
  64. Et depuis ce jour-là Daniel fut fort estimé du peuple.